Homélies pour des funérailles


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Le contexte :

Funérailles de Mademoiselle MabelleTchinda Emérine, jeune fille de 24 ans

Homélie :

Chers frères et sœurs en Christ, chers amis de la famille Fomekong,
Nous sommes réunis dans cette église pour confier au Seigneur notre fille Mabelle qui nous a quitté. Il n’est jamais aisé pour moi, de prêcher en pareille circonstance, surtout quand il s’agit du décès d’une jeune. Mabelle ici couchée, n’avait que 24 ans un mois douze jours. Elle venait de décrocher son BTS en Banque et entreprise. Elle était fille unique et chérie de ses parents. Son départ est bouleversant pour chacun de nous et plonge certainement plus d’une personne dans le doute et dans les questionnements. Mais face à cette épreuve, nous ne pouvons que dire comme Job : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris, bénis soit son saint nom ». Pour nous chrétiens, nous sommes convaincus que la mort n’est pas la fin de tout, mais le commencement d’une nouvelle vie. Ce qui fait la valeur d’une vie, ce n’est pas sa longueur, mais sa densité.
La première lecture que nous venons de suivre nous instruit longuement. A nous qui nous demandons comment la mort ne prend que les enfants, le livre de la Sagesse nous répond : «Une vie sans tache vaut une longue vieillesse.
Même s’il meurt avant l’âge, le juste trouvera le repos. Il a su plaire à Dieu, et Dieu l’a aimé ; Il vivait dans ce monde pécheur : il en fut retiré. Il a été repris, de peur que le mal ne corrompe sa conscience, pour que le mensonge n’égare pas son âme ». Nous croyons et nous espérons que Mabelle, tout au long de sa brève existence, a toujours eu le réel désir de plaire à Dieu, malgré les péchés qu’elle aurait commis comme être de chair. Ce qui nous fait croire que ce désir de plaire à Dieu était celui de Mabelle, c’est le baptême qu’elle a reçu et la lecture assidue des Saintes Ecritures. En effet, nous avons reçu comme témoignage que la Bible de Mabelle est remplie des passages soulignés, preuve qu’elle avait constamment recours à la Parole de Dieu.
Au moment où j’ai appris l’âge de Mabelle, j’ai directement pensé à une sainte que nous, catholiques, nous connaissons tous : Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Elle aussi est morte à 24 ans des suites de tuberculose. Mais ce qui est frappant, c’est la qualité de sa vie, une vie entièrement tournée vers l’amour du prochain. Elle disait en effet : ma vocation, je l’ai enfin trouvée. Dans l’Eglise, je serais l’Amour. Elle aimait aussi dire, Je passerai mon ciel à faire du bien sur la terre et au moment de rendre l’âme, elle murmurait : Je ne meure pas, j’entre dans la vie. En très peu de temps, elle a couvert une très longue route, au point d’être présenté comme modèle et docteur de l’Eglise. Je ne meure pas, j’entre dans la vie. Nous pourrons appliquer ces paroles à Mabelle. Dans la foi, Mabelle ne meurt pas, elle entre dans la vie. Telle est notre foi qui peut paraître dénué de sens pour les incroyants.
En effet, pour les incroyants de notre société, on ne meurt jamais ; on est plutôt tué. Et chaque décès donne lieu à des spéculations vides de sens et à des pratiques inhumaines. Pour ne prendre qu’un exemple, je parlerai d’une pratique qui se fait dans les Bamboutos que je maîtrise un peu : l’autopsie traditionnel. Prétendant chercher les causes du décès du mort, des personnes sans scrupules, n’ayant jamais fait de médecine, se permettent d’éventrer le corps du défunt comme on le fait d’habitude pour le porc et sèment des divisions et des haines dans les familles par leurs propos mensongers : Tel l’a tué. Si on avait offert tel sacrifice, elle ne serait pas morte… Que de personnes hélas, se laissent prendre au piège par ces déclarations mensongères.
Nous croyons, comme le dit le livre de la Sagesse, que Dieu veille sur ses amis et qu’aucun tourment n’a de prise sur eux. Devant de pareilles situations, nous ne pouvons que dire : Tu sais tout Seigneur, que tout advienne selon ta sainte volonté.
Le départ de Mabelle est une interpellation pour nous tous. Nous n’avons rien fait pour atteindre l’âge que nous avons. Peut-être Dieu nous laisse le temps pour notre conversion. Nous sommes inviter à nous poser des questions : quel est le sens de ma vie. S’il m’arrivait de mourir maintenant, qu’elle témoignage de vie laisserais-je ?
L’Evangile que nous avons écouté nous demande de restez en tenue de service, d’être prêt, car le maître pourra venir à l’improviste comme un bandit, à l’heure que nous nous attendions le moins. Un philosophe disait « une fois né, l’on est assez vieux pour mourir » et un autre maître spirituel affirmait : « la vie chrétienne est un apprentissage à la mort ». Les deux soulignaient ainsi la nécessité d’être prêt à tout moment pour la rencontre définitive avec notre créateur. Une chose est sûre : tous, nous mourrons. Même ceux qui se disent voyants ou qui prétendent blinder les gens pour qu’ils ne meurent pas mourront eux aussi. Je me souviens de l’histoire de cet homme qui voulait tromper la mort en lui faisant des rendez-vous répétés…..
La question n’est pas de savoir quand est-ce que la mort viendra, mais comment je me prépare pour la vivre. Rester en tenue de service, c’est tout simplement être fidèle à mes engagements baptismaux et pourvoir dire comme Saint Paul : j’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi.
Confions Mabelle à l’intercession de Sainte Thérèse de L’Enfant Jésus et de tous les autres saints jeunes. Que leurs prières soient pour elle un puissant secours et l’aide aussi à se présenter avec pleine assurance devant notre Dieu, pour recevoir la couronne des élus et chanter les louanges du seigneur pour les siècles des siècles. Amen.

Alain Kenfo Tahaba, prêtre du diocèse de Bafoussam (Cameroun)

Koptchou le 03 décembre 2010

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