Le contexte :Funérailles de madame Gilberte Lenoir, veuve de monsieur Henri Flament
Homélie :
Que
ce soit la mort d'une vieille maman, d'une vieille tante ou la mort
d'une jeune mère de famille, pour moi, c'est toujours scandaleux. Et je
pense que mon sentiment de révolte est partagé par beaucoup. Votre
présence dans cette église, pour cette célébration des obsèques, en est
une preuve : elle signifie, sans doute pour beaucoup, protestation,
révolte même. Et en même temps, se posent à nous deux questions : "
Pourquoi ? " et " Et après ? "
D’abord pourquoi ? À cette
question, il n'y a pas de réponse valable. La mort, c'est l'absurdité
totale. On a beau dire : c'est un phénomène naturel, c'est inscrit dans
nos gènes… On a beau penser et c'est vrai qu'on meurt un peu tous les
jours, malgré cela, tout en nous se révolte. Et d'abord parce que la
mort d'un être cher nous renvoie à l'idée de notre propre mort, que
nous ne sommes pas prêts à accepter. C'est d'ailleurs le propre de
l'humanité, ce qui nous fait sortir de l'animalité, de savoir que nous
sommes mortels. Alors, on se retourne vers Dieu ou bien pour s'insurger
contre lui. Qui de nous n'a jamais dit ou pensé : " Qu'est-ce que j'ai
fait au Bon Dieu ? " ou encore : " Je n'ai pas mérité çà ! " ou même :
" S'il y avait un Bon Dieu… ! "
A mon " Pourquoi ", à mon " Et après ? , la Bible donne une réponse. Il nous faut essayer de l'entendre
Dans
la première lettre de saint Jean, il y a cette phrase étonnante :
" Nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie parce que nous
aimons nos frères ". C'est l'inverse du processus naturel, par lequel
nous passons de la vie à la mort ! Que veut-il dire ? Simplement qu'il
faut bien s'entendre sur le sens des mots " vie " et " mort «. Vivre,
c'est aimer, voilà ce que saint Jean nous dit. Mais Jean n'est pas un
naïf. Il sait très bien que le mot amour est un mot piégé. C'est
pourquoi il nous invite à préciser. Voulez-vous savoir ce que
c'est qu'aimer ? Regardez Jésus. Il a donné sa vie par amour. Vous
voulez apprendre à aimer ? Donnez votre vie. Voulez-vous
être un vivant ? Donnez votre vie.
Aimer, c'est être
'éclaté vers’. Précisons encore. Donner sa vie, ce n'est pas d'abord
mourir pour, c'est vivre pour. J'ouvre les Évangiles à n'importe quelle
page, et je vois à l'œuvre l'amour que Jésus porte à chacun dans des
circonstances bien précises : chaque fois, il donne sa vie. « Ma vie
nul ne la prend, mais c'est moi qui la donne » dira-t-il.
Vous
me direz sans doute que tout cela est bel et bon, mais le chemin de
Jésus, en quoi nous concerne-t-il ? Au chapitre 6 de l'Épître aux
Hébreux, il y a une image : Jésus est comparé à la frégate légère
(disons aujourd'hui le remorqueur), qui introduit les cargos dans la
passe jusqu'au port, jusqu'au quai. Vous voulez vivre ? Faites
comme Jésus. Vous voulez vivre éternellement : vivez comme Jésus.
Je regarde le destin de Gilberte dont nous célébrons aujourd'hui les
obsèques : à sa manière, selon ses moyens, elle a vécu cela.
Aujourd'hui, elle a franchi la passe, elle entre au port. Nous avons
confiance qu'elle est entrée dans la vie éternelle !
Amen.
Michel Houyoux, Diacre permanent