Année A

Sommaire année A
Accueil



Solennité de St Pierre et St Paul

        « Sauvé par miracle ! » Combien de fois avons-nous entendu, à l'occasion de catastrophes naturelles ou d'accidents, ces récits de personnes qui ont survécu on ne sait comment, là où tant d'autres parfois ont trouvé la mort. Que ce soit à la suite d'un accident ferroviaire, ou sur la route, ou lors d'un tremblement de terre, d'un tsunami…
Comme dans ces circonstances, on ne trouve généralement pas d'explication rationnelle et objective expliquant pourquoi celui-ci a pu échapper et pas les autres, on a vite fait de crier au miracle. On pourrait plus modestement invoquer le hasard, la chance. Mais non, c'est presque toujours le mot miracle qui est utilisé.

        Aujourd'hui, les textes de la liturgie nous parlent de deux miraculés célèbres et multi-récidivistes, St Pierre et St Paul dont cette année la fête tombe un dimanche. C'est pourquoi nous avons revêtu le rouge, couleur des martyrs, évoquant le sang qu’ils ont versé par fidélité à leur foi en Jésus, Christ et sauveur.
        Car même s'ils ont échappé plusieurs fois à la mort, de manière inespérée, miraculeuse, ils ont bien fini un jour par mourir, parce qu'aucun homme n'est immortel. Eh bien oui ; tout miraculés qu'ils ont été, ils sont morts. Et de mort violente, parfois après de grandes souffrances.
        Alors on pourrait se dire que le miracle, ça ne marche pas à tous les coups ! Des fois, Dieu nous sauve, d'autres fois, il laisse faire ? Pourquoi ? Dieu a-t-il ses humeurs, bonnes ou mauvaises ? S'amuserait-il avec nos vies comme bon lui semble, à la manière d'un marionnettiste qui nous manipulerait au bout de quelques fils ? De telles pensées pourraient nous faire douter de Dieu, alors que le but du miracle est, au contraire, d'augmenter notre foi.

        Regardons d'abord l'évasion miraculeuse de Pierre, que nous relate la première lecture de ce jour. L'ange du Seigneur vient délivrer Pierre, qui d'ailleurs n'avait rien demandé. Ce sont ses amis qui ont intercédé pour lui, c'est le texte qui nous le dit : « L’Église priait pour lui devant Dieu avec insistance. » Si le miracle s'accomplit, c'est par la prière des frères, par l'intercession de toute la communauté.
        Dieu écoute nos prières quand nous prions avec insistance, avec ferveur, pour nos proches, ou pour les personnes qui nous sont confiées. Dieu n'est pas sourd à nos prières communautaires. C'est pourquoi la prière universelle que nous faisons chaque dimanche à la messe, a tout son sens, toute sa valeur. Elle est le cri de détresse de l'humanité vers son créateur. Alors mettons-y vraiment notre cœur.  Même si les intentions formulées ne sont pas les nôtres, même si elles peuvent parfois nous sembler loin de nos propres préoccupations, prions-les avec conviction, avec insistance, et Dieu exaucera nos demandes. Parce que ce ne sont pas des prières égoïstes, mais celles de tous les frères et sœurs que nous sommes, pour d'autres frères et sœurs. Un père ne reste pas sourd aux prières de ses enfants qui se rassemblent pour l'implorer.
        Beaucoup pourtant nous disent : « la prière, ça ne sert à rien, ça ne marche jamais ! » et ils ajoutent souvent un exemple de prière qui n'a pas été exaucée, comme pour prouver cette inefficacité : « La preuve, j'ai prié pendant des années pour la guérison de telle personne, et elle est morte ! » C'est vrai que présenté ainsi, l'argument est convainquant, imparable. Pour sortir ce cette impasse, je crois qu'il nous faut nous rappeler ceci :
        À nos demandes, Dieu, parce qu'il n'est qu'amour, n'a que trois réponses possibles : « oui » ; « oui, mais pas maintenant » ; ou bien : « j'ai un meilleur plan pour toi. » C'est pourquoi nous avons parfois l'impression qu'il ne répond pas. En réalité, il nous faut être patient, faire confiance à Dieu et persévérer dans la prière, mais aussi nous préparer à accueillir ce meilleur plan qu'il a pour nous, et qu'il nous révélera plus tard.
        Pierre est donc libéré ce jour-là, sans doute parce que Dieu avait un meilleur plan pour lui. Il devait poursuivre sa mission. Ce n'est qu'une fois sa mission achevée que Dieu fera à Pierre la grâce du martyr, non pas en l'abandonnant à la violence des hommes, non pas en lui prenant sa vie, mais en recevant de lui le don de sa vie.

        La deuxième lecture est extraite de la lettre de St Paul à Timothée, dans laquelle il parle de sa mort prochaine. Paul fait ici allusion aux périls auxquels il a échappé par miracle – et ils sont nombreux ! – et redit sa confiance envers Dieu qui l'a sauvé et qui le sauvera encore.
        Mais on comprend bien dans ses propos que le verbe « sauver » ne revêt pas le même sens dans les deux cas : Plusieurs fois par le passé Dieu l'a sauvé de la mort, mais même dans sa mort prochaine annoncée, Dieu le sauvera encore : « Il me sauvera et me fera entrer au ciel, dans son Royaume. » Autrement dit, la mort inéluctable n'est pas un échec, mais participe au salut. C'est la porte du ciel, la porte du Royaume, le passage obligé. Même mort, St Paul est sauvé. C'est le sens du martyr, où la mort, quand elle est une vie donnée, n'a pas le dernier mot.
        « Sauvé par miracle », cette expression dont nous parlions au début, n'est donc sans doute pas l'expression la plus juste. Car même si avoir échappé à la mort dans certains cas peut être parfois considéré comme un miracle, le fait de mourir ne signifie pas pour autant ne pas être sauvé.
        La mort n'est pas une punition de Dieu, ni l'échec de la médecine, ni la marque de la fatalité. Par sa propre mort, Jésus nous a sauvé. Il nous a ouvert le chemin, qui passe, on le sait bien, par la mort. Ainsi, nous qui sommes croyants, nous savons que la mort n'est pas la fin de tout, mais qu'elle est le passage vers notre espérance, vers la vie en Dieu. Et si nous sommes croyants, Jésus nous le dit comme à Pierre dans l'Evangile d'aujourd'hui : « Heureux es-tu Simon, fils de Yonas : ce n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux ».

        Oui, nous sommes tous « sauvés par miracle », quelles que soient les circonstances, quelles que soient les souffrances et les morts, petites ou grandes, que nous avons à vivre. Et heureux sommes-nous ! ce n'est pas la chair et le sang qui nous l'ont révélé, mais notre Père qui est dans les cieux.

Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent
Clisson, le 29 juin 2014


Sommaire année A
Accueil