Pour la fête des Rameaux, vous êtes venus nombreux
dans cette Eglise faire bénir vos rameaux que vous ramènerez dans vos
maisons ou déposerez sur les tombes de vos proches. Vous êtes venus
aussi acclamer Jésus comme la foule de Jérusalem, puis entendre
le récit de la Passion et croiser le chemin de Jésus qui monte vers le
Golgotha. Dieu a tant aimé le monde qu’il nous a donné son Fils. Comme
nous le dit Saint Paul dans l’épitre : « Le Christ Jésus s’est
dépouillé lui-même prenant la condition de serviteur… Il s’est abaissé
lui-même… jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix ». Nous sommes là
au cœur de la Foi Chrétienne symbolisée par cette croix bien visible
dans notre Eglise. Mais au-delà de la mort et de la croix il y a la
résurrection que nous fêterons le jour de Pâques.
Aujourd’hui, restons avec cette foule qui acclame
Jésus avec ses rameaux et qui, quelques jours plus tard, demande son
exécution sur la croix. Cette foule est partagée et versatile.
Regardons quelques acteurs qui participent, de près ou de loin, à cette
montée au Golgotha.
Arrêtons nous d’abord sur Pierre et les disciples qui accompagnent
Jésus au mont des Oliviers. Alors que Jésus ressent tristesse et
angoisse devant sa mort, eux s’assoupissent. Sans doute une manière de
fuir la dure réalité qui s’annonce, de prendre de la distance… Jésus
les avait pourtant invités par deux fois à veiller et à prier… Il
nous arrive nous aussi de prendre de la distance avec Jésus, de n’être
plus en veille, de refuser de voir la réalité en face, de nous
assoupir…. l’Evangile note que Pierre suivait de loin Jésus jusqu’au
palais du grand prêtre pour se tenir ensuite discrètement dans la cour.
Et c’est là qu’une servante le reconnaît et qu’il dit par trois fois
qu’il ne connaît pas cet homme ! Pierre se rappelle alors les paroles
du Seigneur « avant que le coq ne chante tu m’auras renié trois fois ».
Il sort et pleure amèrement nous dit l’Evangile… Jésus lui pardonne et
lui confiera la conduite et les premiers pas de l’Eglise. Ce sera le
premier pape. Quelques soient nos faiblesses, nos reniements, l’amour
du Seigneur est infini. Nous pouvons toujours revenir vers lui, car
c’est un Père plein de miséricorde qui relève et garde toujours sa
confiance en l’homme.
Regardons maintenant Simon de Sirène. Il n’a pas
choisi d’aider Jésus à porter sa croix. Il est réquisitionné. Cet
évènement s’impose à lui. Mais il devient l’aide et le serviteur de
Jésus souffrant… Nous aussi nous ne choisissons pas toujours ce qui
nous arrive ou ce qui arrive à nos proches : Quelle sera notre attitude
devant la Croix ? Quand elle viendra vers nous cette croix qui peut
prendre le visage des blessures, de l'abandon, de la solitude, du
chômage, de la maladie, de la vieillesse, du deuil, de la mort…
serons nous le serviteur de l’homme ou la femme en détresse à l’image
de Simon de Sirène ? Et si le mal nous atteint personnellement,
saurons-nous à notre tour porter notre croix, à la suite de Jésus ?
Enfin, des femmes suivent la montée au calvaire avec
un peu de distance, et retrouvent Joseph d’Arimathie qui venait de
déposer le corps de Jésus dans le tombeau. Elles « regardèrent comment
le corps de Jésus y était placé » et s’en allèrent préparer les
parfums pour l’embaumer après la Pâques. On imagine la souffrance de
ces femmes qui tiennent bon à contre courant de la foule qui vocifère,
l’épreuve de ces femmes qui accompagnent Jésus au calvaire et au-delà
jusqu’au tombeau. Ce sont elles, les premières, qui trouveront le
tombeau vide et annonceront la résurrection du Seigneur aux apôtres.
Tenir bon dans l’épreuve et espérer, voilà le témoignage qu’elles nous
laissent : En définitive, la mort et le mal sont vaincus et la lumière
de Pâques jaillit.
Fixons maintenant notre regard sur Jésus. Il savait
parfaitement qu’il allait mourir. La haine de ses adversaires s’était
accumulée depuis trois ans. Jésus va vivre, en quelques jours, des
moments intenses.
L’épreuve est dure, très dure. Les dernières paroles
de Jésus au mont des oliviers nous montrent bien son humanité en même
temps que sa relation intime avec son Père : « mon âme est triste à en
mourir, demeurez ici et veillez avec moi » dit-il aux disciples ; et,
s’adressant à son Père : « S’il est possible que cette coupe s’éloigne
de moi ! Cependant, non pas ce que je veux, mais, comme tu veux ». Et
après avoir prié, Jésus assume complètement son destin : « La voici
toute proche, l’heure où le Fils de l’homme est livré aux pécheurs.
Levez-vous ». Jésus est décidé à tout donner : « ma vie nul ne la
prend, mais c’est moi qui la donne ». Devant la croix où Jésus donne
jusqu’à la dernière goutte de son sang pour nous, on ne peut que se
dire que Dieu est Amour… et lui rendre grâce.
La veille de sa mort, il s’est passé une scène
étonnante, extraordinaire. Alors que Jésus savait que « l’heure était
venue de passer de ce monde à son Père », Jésus n’a aucun sentiment
d’abattement, il bénit et rend grâce à son Père. Il fait un geste
prophétique et symbolique avec le pain et le vin de la table : il prend
ce pain, qu’il partage à ses apôtres et qui devient son « corps livré
», puis la coupe qui devient « son sang versé » et « le sang de
l’Alliance ». Jésus avant de mourir physiquement nous donne sa vie,
fait alliance avec l’humanité jusqu’à la fin des siècles et demande à
ses apôtres et à leurs successeurs de refaire ce geste. C’est ce que
nous allons vivre dans l’Eucharistie de ce jour avec le pain partagé,
son corps livré pour que tous les hommes vivent de sa vie.
Yves Michonneau,
diacre permanent
Eglise Sainte Eulalie de Secondigny
13 avril 2014