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Nativité de Jean-Baptiste


L’Église, dit saint Augustin, célèbre ordinairement la vie des Saints au jour de leur mort, qui est, à proprement parler, le jour de leur naissance dans la vie éternelle. La Nativité de saint Jean-Baptiste que nous fêtons aujourd'hui déroge à cette règle, parce qu’il fut sanctifié avant de naître, dans le sein de sa mère, par la présence de Jésus-Christ, dans la visite que fit Marie à Élisabeth.
Au-delà des lectures de ce jour, c’est toute la personnalité de Jean le Baptiste que je vous propose de méditer.
Quand Jésus parle de son cousin, Jean Baptiste il en parle comme "le plus grand de tous les prophètes". En pensant à lui nous imaginons un personnage un peu marginal "vêtu de poils de chameaux et mangeant des sauterelles; le cinéma nous l'a montré appelant d'une voix rocailleuse à une conversion radicale. Qui est-il vraiment?
« Avant même de te former dans le sein de ta mère, je te connaissais ; avant que tu viennes au jour, je t’ai consacré et j’ai fait de toi un prophète pour les peuples ». La première lecture nous parle du prophète, bien aimé du Seigneur. C'est un portrait plus en douceur:" il m’a protégé par l’ombre de sa main". Deux fois le texte nous parle du regard bienveillant de Dieu sur celui qui est encore dans le sein maternel.
Et le psaume 138 continue :" Mes os n’étaient pas cachés pour toi quand j’étais façonné dans le secret. Je te rends grâce, ô mon Dieu, pour tant de merveilles."
Mais St Paul nous donne une clé en le comparant à David :" c’est un homme selon mon cœur; il accomplira toutes mes volontés ". C'est un homme aimé de Dieu (comme chacun et chacune d'entre nous) appelé à être messager, prophète du Dieu Très Haut (comme chacun et chacune d'entre nous), appelé à être sa main parmi ses frères (comme chacun et chacune d'entre nous).
Appelé, en latin se dit vocare qui a donné le mot vocation. Nous sommes tous appelés, nous avons donc tous une vocation à laquelle répondre pour correspondre au mieux au désir de Dieu pour nous, devenir un homme ou une femme "selon le cœur de Dieu."
La première lecture du livre d'Isaïe est tirée d'un passage appelé "le chant du serviteur". Par le texte de Paul on voit bien la place de Jean-Baptiste pour préparer le chemin de son Seigneur mais sans être digne de défaire les courroies de ses sandales. On pourrait conclure qu'à son exemple nous sommes tous appelés à être d'humble serviteur de la présence de Dieu auprès de nos frères.

Mais comment discerner cette vocation propre à chacun, unique et "secrète" puisque seul Dieu la connaît ? Jean-Baptiste a su discerner non seulement sa propre vocation, mais discerner, dans le charpentier de Nazareth, le Messie que tous attendaient. « Voici l’Agneau de Dieu. »
Cette parole n’est pas née d’une simple constatation, d’un simple raisonnement, d’une simple déduction. Jean Baptiste a vu clair dans sa vie parce qu’il s’est laissé guider par l’Esprit. Il a lu l’Ecriture et les Prophètes, non pas comme une connaissance à assimiler, mais comme une parole qui lui est directement adressée par Dieu lui-même, une parole qui le concerne et qui éclaire sa propre personnalité.
A nous aussi de discerner les signes que Dieu nous envoie pour que nous puissions être témoins et précurseurs du Christ auprès de nos frères.
Et même si nous sommes libres de faire ce que nous pensons être juste et vrai, Dieu ne nous contredira jamais même si nous ne collons pas parfaitement à son désir.
Un désir de bonheur pour nous qui fait que Dieu nous aidera toujours. Je vous invite à relire le psaume 138 dans son entier. Ta main me conduit, ta main droite me saisit. La confiance d'un enfant qui commence à marcher et qui tient le doigt de son papa ou de sa maman. Puis l'assurance venant il commence à se lâcher et risquer de tomber : les parents veillent mais il faut que l'apprentissage se fasse. Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m'assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées. Que je marche ou me repose, tu le vois, tous mes chemins te sont familiers. Un psaume qui chante l'amour bienveillant de Dieu pour chacun d'entre nous. Un amour qui n'étouffe pas, mais qui fait grandir.
La foi des prophètes est mise à l’épreuve comme est la nôtre lorsque ne se réalise pas ce qui nous paraît être l’indispensable de notre vie. Quand nous constatons, jour après jour, que nos rêves et nos désirs ne semblent trouver aucun écho auprès de Dieu, la foi devient difficile à vivre puisqu’elle n’est plus portée dans l’espérance. Mais, celui qui a confiance en Dieu sait aussi que l’amour qu’il nous porte n’est jamais une impasse, même s’il y a déception à certaines heures. C’est par un autre chemin qu’il nous conduit.
Alors Scrute-moi, mon Dieu, tu sauras ma pensée,  éprouve-moi, tu connaîtras mon coeur. Vois si je prends le chemin des idoles, et conduis-moi sur le chemin d’éternité.
Alors quelle vocation? Père ou mère de famille dans le mariage? Religieux ou religieuse dans un désir de suivre Jésus dans la pauvreté et l'obéissance par amour des ses frères? Prêtre en paroisse ou en Mission? Et avec le remodelage nous voyons que la place du prêtre change.
J'étais tout à l'heure (hier) à la Cathédrale pour les ordinations diaconales et sacerdotales. Qu'est qui peut être assez fort pour appeler un jeune à choisir une autre voie que celle qui nous tend les bras dans les publicités que nous avons chaque jour dans nos boites aux lettres: acheter, posséder, dominer, séduire...
Je reprendrais un texte de Mgr Gérard DEFOIX évêque de LILLE   sur le ministère du prêtre diocésain :" Ce n'est plus tellement un type d'engagement  humanitaire qui apparaît dans les motivations de jeunes tentés par la vie religieuse ou le ministère presbytéral, ils expriment la recherche d'un sens et d'un salut dans la prière et la contemplation, la liturgie et la rencontre spirituelle. C'est plus souvent le vœu de rassembler des croyants que de partir  à la recherche de brebis égarées dans l'incroyance qui leur paraît mériter le don de sa vie pour suivre le Christ."
La question pour le ministère  presbytéral diocésain devient alors celle-ci : quel  service de la foi et du salut assurer dans une  communauté, une Église particulière précise ?
Le charisme  du prêtre diocésain est toujours celui d'être hôte, reçu dans une terre, une histoire et un peuple. Il y  est envoyé pour signifier humainement une fidélité  au nom de la foi et de l'Église.
Mais aussi comment entrer dans la vocation de père ou mère de Famille. On voit bien dans le récit de la naissance de Jean Baptiste que Zacharie a eu du mal à accepter la vocation de son Fils: il en est devenu muet... et n'a retrouvé la Parole qu'en acceptant le nom de Jean. Pour laisser ses propres enfants faire ce que Dieu souhaite pour eux il faut apprendre à s'effacer comme Jean Baptiste devant le Christ :"Il faut que je diminue et lui qu’il grandisse."

Chaque vocation est un appel. Quand le Seigneur nous demande d’agir, l’humilité n’est pas de se dire incapable, l’humilité c’est de reconnaître la priorité de la Parole qu’il nous adresse. Dieu n'appelle pas des personnes capables. Il rend capables ceux qu'il appelle.


Philippe ARRIVE, diacre permanent

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