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2° dimanche de Carême



« C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » En préparant cette homélie, je feuilletais quelques journaux. Accidents de la circulation ; licenciements et plans sociaux ; tournoi des 6 nations ; bilan du séisme en Haïti ; « affaires » politiques et économiques ; attentats en Afghanistan ; sondages d’opinion ; jeux olympiques… Qui, aujourd’hui, semble avoir pour préoccupation celle du psalmiste que la liturgie nous propose en ce deuxième dimanche de carême ? « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » On pourrait en effet se dire que cette recherche du visage de Dieu est complètement hors de propos à notre époque. Les médias nous détournent de cette recherche et nous proposent de nombreux dérivatifs, divers et variés, présentés de préférence sous forme de sujets de mécontentement ou d’inquiétude. Oui, on pourrait voir dans ces titres de journaux des problèmes beaucoup plus importants que la recherche du visage de Dieu. Mais on peut aussi, au contraire, y voir comme « en creux » ce désir de tout homme de voir Dieu. Derrière ces articles de journaux, n’y a-t-il pas, au fond, le désir d’un monde meilleur, d’une société plus juste ? Cette mise en avant systématique de ce qui ne va pas bien n’a-t-elle pas pour conséquences d’éveiller les consciences, de susciter des actions en faveur d’un mieux vivre ensemble ? Vivre ensemble à la manière que propose l’Evangile, dans un amour partagé, dans une fraternité sincère et véritable ? « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » C’est le cri du monde ! Même s’il s’en défend. Même si la plupart de nos contemporains semblent se satisfaire de vivre dans un monde sans Dieu, au plus profond du cœur de chacun, souvent enfouie et cachée, brille cette espérance d’une rencontre, face à face, avec un libérateur, un sauveur, celui qui nous délivrera de tout ce qui nous tient éloigné du bonheur. « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » Et même pour nous, chrétiens, nous qui avons la chance de pouvoir mettre un nom sur ce sauveur, n’avons-nous pas, nous aussi, ces moments d’obscurité, de doute, qui nous font crier à notre tour « ne me cache pas ta face ! » ? Ce qui nous cache la face de Dieu, n’allons pas le chercher seulement dans les événements, les circonstances, les comportements des autres et les choix de nos sociétés. Ne nous contentons pas d’accuser le mal que nous subissons. Ayons le courage de regarder en nous-mêmes cette part d’ombre qui est en nous, que l’Eglise appelle le péché, et qui nous pousse parfois à agir pour le mal et non pour le bien. Ce temps de carême est sans doute une période propice à nous arrêter un peu sur nos habitudes, nos activités ou nos passivités. Période propice peut-être à nous réconcilier, avec nous-mêmes, avec les autres, avec Dieu. « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » Il y a peut-être longtemps que nous n’avons pas fait une démarche personnelle de réconciliation. Les rendez-vous que propose la paroisse en ce carême peuvent être une occasion de retrouver la paix du cœur que procure toujours une vraie réconciliation personnelle. « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. »
Comme les disciples Pierre, Jacques et Jean ont eu cette occasion de voir, de leur vivant, la gloire de Dieu sur la montagne de la Transfiguration, laissons Dieu se montrer à nous. Ce n’est pas lui qui se cache, mais souvent nous qui ne voulons pas ou qui ne savons pas le voir, préoccupés que nous sommes par tellement d’autres soucis, d’activités, de loisirs. J’en reviens à ces journaux que je feuilletais il y a quelques jours. En fouillant un peu plus loin que les gros titres, j’ai pu lire plusieurs articles révélant que de plus en plus de personnes, croyants ou non-croyants, et particulièrement des personnes relativement jeunes, pratiquent le jeûne pendant le carême, avec plus ou moins de souplesse ou au contraire, avec une impressionnante radicalité. Et pas seulement pour perdre du poids, ou pour entretenir sa santé physique. La plupart des témoignages faisaient état d’un désir spirituel, de retrouver un équilibre au cœur de ce monde qui nous entraine parfois dans son tourbillon. Le jeûne non pas par masochisme, ni par dolorisme, ni par goût de l’effort ou du sacrifice, mais un jeûne habité par une recherche spirituelle, recherche de soi-même ou recherche d’une transcendance. Jeûne alimentaire, mais aussi jeûne matériel, jeûne de certaines habitudes, jeûne de consommations. Pour nous chrétiens, l’attitude de ces personnes a de quoi nous faire réfléchir, nous qui avons souvent délaissé ces pratiques, pour diverses raisons, mais surtout parce que nous en avons perdu le sens, à force d’y chercher une utilité à tout prix. A quoi bon jeûner ? Une réponse est sans doute à trouver chez ces personnes qui pratiquent le jeûne. Peut-être simplement pour entrer dans cette démarche existentielle : « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » Chacun de nous peut se poser la question : de quoi ai-je besoin de jeûner aujourd’hui ? Quels sont les obstacles qui entravent ma route vers Dieu, vers un bonheur authentique ? Dans mes relations aux autres, quelles sont mes pratiques qui voilent ou déforment ma vision de Dieu ? Comment est-ce que je participe à aider l’humanité à trouver Dieu ? « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. » Oui, chacun de nous a besoin d’une transfiguration, d’une manifestation de Dieu, de Dieu qui se montre. Mais pour cela, comme les disciples, il faut commencer par se mettre en route, faire un détour pour gravir la montagne, produire l’effort qui nous rendra plus disponible. Nous désencombrer de nos biens matériels, faire le jeûne de nos certitudes, de nos égoïsmes, de notre orgueil.
Ce temps de carême est un temps qui ne nous est pas imposé, mais un temps qui nous est donné. Accueillons-le comme un don, comme une occasion de progresser dans notre recherche de bonheur, un bonheur qui passe par notre disponibilité au service de nos frères pour le service de Dieu. « C’est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face. »
Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent.
Monnières, Gorges et Maisdon sur Sèvre
28 février 2010


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