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2° dimanche de Carême


L’autre jour, au KT, la catéchiste parle aux enfants de CM2 de la messe. Les enfants écoutent, étonnés, intéressés même. Ils posent beaucoup de questions. Au fur et à mesure, la catéchiste se rend compte que ce qu’elle annonce est une véritable nouveauté pour les enfants : « Comment saurions-nous ce qui se passe à la messe ? Nous n’y sommes jamais allés ! On aimerait bien connaître tout ça, mais nos parents ne nous emmènent jamais à l’église, ils n’y vont pas eux-mêmes ! ». « Eh bien, propose alors la catéchiste, moi je peux y emmener ceux qui veulent. Samedi prochain, par exemple. Justement, la messe sera animée par les jeunes. » L’un des enfants accepte la proposition.
Le samedi soir, donc, coup de fil aux parents : « Votre fils est-il toujours d’accord pour venir à la messe ce soir ? » « Oui, oui, pas de problème, il est prêt, il vous attend. »
Pourquoi cette petite histoire ? et quel rapport avec les lectures que l’Eglise nous propose en ce 2ème  dimanche de carême ?
Ces textes nous parlent de Dieu qui se manifeste auprès de ses amis les Hommes. Dieu qui se donne à voir et à entendre. À Abraham, d’abord, à qui il se révèle par sa Parole, avant de conclure avec lui une alliance. Il se rend visible par le « brasier fumant », il est la « torche enflammée » qui passe entre les morceaux d’animaux. En effet, c’est par ce rite que les Anciens du Moyen Orient scellaient entre eux un pacte, une alliance.
Dieu se donnera ensuite à voir à Pierre, Jacques et Jean, sur la montagne, à travers la transfiguration de Jésus, et la présence d’Elie et de Moïse. Elie représentant les Prophètes et Moïse la Loi, c’est-à-dire, à eux deux, la totalité des Ecritures de l’Ancienne Alliance. La voix de Dieu se fait entendre : « celui-ci est mon fils, celui que j’ai choisi. Ecoutez-le ! ».
Ecoutez-le… comment, aujourd’hui, dans ce monde tel qu’il est, pouvons-nous écouter encore ce Jésus, ce Fils de Dieu ?
Ecoutez-le… Pour écouter, il faut d’abord pouvoir entendre. Où est-ce que l’homme d’aujourd’hui peut avoir l’occasion d’entendre la Parole de Dieu ? Comment les hommes de demain – les enfants d’aujourd’hui – peuvent-ils encore entendre Dieu parler à leur cœur ? À l’école ? dans la famille ? à la maison ? dans  les médias ? …
Dans tous ces lieux, hélas, Dieu, la foi, l’évangile, ne semblent pas être des sujets que l’on aborde spontanément. Dieu n’est à présent qu’une « option », un « élément de la sphère privée, qui ne doit surtout pas empiéter sur la sphère publique », une « opinion personnelle »… A faire ce constat, on pourrait être inquiet pour l’avenir. On pourrait même désespérer et se lamenter sur le monde présent, et cultiver avec aigreur la nostalgie d’un passé révolu, où plus ou moins tout le monde était chrétien. Mais pour Dieu, la question n’est pas là. Le découragement de certains de nos contemporains ne doit pas nous gagner. En effet, s’il est vrai que la question de Dieu semble absente de notre monde occidental, les presque 4000 ans d’histoire de la Bible ne nous racontent pas seulement comment l’homme parle de Dieu à travers les époques. Au contraire, la Bible nous raconte comment, à travers les âges, Dieu vient parler à l’Homme. Et à bien lire, on peut se rendre compte qu’il vient petit à petit, accompagnant l’humanité à son pas, lent et  parfois laborieux. Il vient se révéler, se manifester à travers des personnes, des lieux, des événements, parfois présentés de manière frappante, spectaculaire : la torche enflammée pour Abraham, le buisson-ardent pour Moïse, la transfiguration de Jésus pour ses disciples, et plus tard, St Paul qui sera terrassé et aveuglé sur le chemin de Damas. Mais il vient aussi se manifester de manière beaucoup plus discrète, dans la vie des hommes de toutes époques, de toutes conditions. Dans la vie de chacun de nous, si nous prenons bien les moyens d’y être attentifs. Si notre monde déchristianisé ne propose plus, de lui-même, de moments favorables à la rencontre de Dieu, c’est à nous de le faire. St Paul l’écrivait déjà aux Philippiens, nous l’avons entendu dans la deuxième lecture : « beaucoup de gens vivent en ennemis de la croix du Christ. Ils vont tous à leur perte. Mais nous, nous sommes citoyens des cieux ». C’est à nous de créer, autour de nous, des petites « montagnes de la transfiguration ». Soyons inventifs, utilisons le temps qui nous est donné, particulièrement en ce carême, employons les moyens que nous connaissons, et ceux que nous donne notre époque comme les nombreux moyens de communication disponibles aujourd’hui. Créons des espaces, des temps, dans lesquels nous serons plus facilement à l’écoute de Dieu, dans lesquels nos contemporains pourront, eux aussi, avoir cette chance de reconnaître Dieu qui se manifeste sans cesse. Soyons à l’image de cette catéchiste. N’attendons pas que le monde change, soyons de ceux qui le transfigurent. Que faisons-nous pour permettre au monde d’entrer dans cette espérance qui nous fait vivre ? En ce carême, pourquoi ne pas faire de cette question un défi ? Cela demande du courage et de la détermination, mais le Psaume de ce jour nous le redit : « le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte ? » « Sois fort et prends courage, espère le Seigneur ! »
Au fait, je ne vous ai pas raconté la fin de ma petite histoire. Cet enfant qui, grâce à l’initiative de sa catéchiste, est allé pour la première fois à la messe. La fin de l’histoire, je ne la connais pas. Sans doute ce petit garçon n’a-t-il pas vu le Christ se manifester d’une manière aussi éclatante que Pierre, Jacques et Jean. Il n’est sans doute pas rentré chez lui transformé, bouleversé. Non, mais il a tout de même eu l’occasion de commencer à gravir la montagne. Et de même que les disciples, sur le moment, n’ont pas compris ce qu’ils ont vu (il a leur a fallu attendre l’éclairage de la résurrection et de la pentecôte pour cela), de même, qui sait si ce petit garçon, dans sa vie d’homme qui l’attend, n’aura pas un jour, en se retournant, un souvenir de cette première messe comme d’une transfiguration ?
Seigneur, au cours de ce carême, donne-nous d’être, comme cette catéchiste, des « montreurs de Dieu » à ceux que tu nous donnes de rencontrer !

Daniel BICHET, diacre permanent
Clisson, février 2007

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