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Christ, Roi de l'Univers

2 S 5, 1-3 ;  Ps 121 ; Col 1, 12-20 ; Lc 23,35-43

         

Frères et sœurs,

Au terme de l'année liturgique, l'évangile nous propose une scène extraite de la Passion selon saint Luc : Jésus meurt en croix comme un Roi au pouvoir universel qui a accepté librement le plus cruel châtiment que l'homme ait pu imaginer. Pendant que ses os se disloquent sous son poids et que se tend sa chair meurtrie, le Christ-Roi remplit fidèlement, en toute lucidité, la mission de Sauveur qu’il a reçue de son Père.

Quelle est donc cette Royauté ? Notre messie crucifié n'a rien de la splendeur de Louis XIV, cependant, une inscription imposée par Pilate ne fait que souligner son titre de Roi. De même, le contraste entre lui et le roi David ne peut être plus marqué : alors que ce dernier a pris le pouvoir politique et militaire sur tout le peuple, Jésus, seul, suspendu, meurt avec les pauvres, les pécheurs et les exclus !

En vérité, le Christ est éternellement vainqueur, mais sa victoire s'accomplit par le don de sa propre vie. Vous aurez sans doute remarqué que le verbe “sauver” revient quatre fois au cours du récit ; c'est là l'essence même de notre foi : le Christ a versé son sang, il est mort crucifié pour le salut du monde.

Or justement F&S, rappelons-nous que la royauté du Christ, toute faite d’offrande de soi, de service au plus pauvre, d’humilité, de douceur et de patience, nous y participons de par notre baptême au cours duquel nous avons reçu par l’onction, la triple mission de prêtre (pour vivre de la prière et de la Parole), de prophète (pour témoigner de la bonne nouvelle) et de roi (à l’image de la royauté du Christ). C’est bien dans cet esprit que le Secours Catholique Caritas France nous invite à célébrer la royauté du Christ serviteur à l’occasion de sa Journée Nationale, ce dimanche, dans la continuité de la Journée Mondiale du Pauvre instaurée par le Pape François il y a 6 ans.

Pour l’évoquer, je vous partage tout d’abord quelques constats majeurs issus du rapport annuel 2022 qui vient d’être publié et qui met en évidence à quel point les crises que nous traversons fragilisent les plus pauvres dans notre société :

·      Ils ont été fortement déstabilisés par la crise COVID et ses conséquences sociales : isolement, perte de revenu, difficulté d’accès à l’éducation, ils ont pris de plein fouet toutes les difficultés.

·      Aujourd’hui encore, victimes de la crise, les plus pauvres ne connaissent aucun répit : augmentation des tarifs de l’énergie, montée de l’inflation… Si on ne leur vient pas en aide, notre société sera fracturée et va laisser beaucoup de monde au bord de la route.

·      Etre pauvre aujourd’hui en France, c’est être en manque : en manque de lien social, en manque de droits et de protection, en manque d’interlocuteurs dans les services publics, en manque d’argent aussi bien entendu… C’est une mère de famille qui ne peut donner une alimentation aussi saine qu’elle le voudrait à ses enfants, c’est ne pas avoir un toit stable ou avoir un logement précaire, si précaire que vous en avez honte et n’invitez plus ni amis ni famille et que vous vous isolez petit à petit.

·      Les personnes que nous recevons au Secours Catholique ont un revenu médian de 548 euros, c’est la moitié du seuil de pauvreté. 22% d’entre elles n’ont pas de revenu du tout.

·      Les conditions de vies se durcissent pour tous. Certaines personnes que nous recevons ont un travail à temps plein mais il ne leur permet plus de faire face aux dépenses courantes.

Face à ces constats, je pense alors tout particulièrement au travail des bénévoles du Secours Catholique (60 000 en F ; 1 500 sur le diocèse 44) dont j’ai la joie de faire partie depuis un an que Mgr Percerou m’a appelé comme Aumônier diocésain. Et à ce titre, je veux vous partager ma découverte et mon émerveillement devant l’engagement de ces nombreuses personnes qui donnent de leur temps (aussi bref soit-il) et de leur énergie, humblement, gratuitement, avec passion, dans la joie et avec amour pour accueillir, écouter, échanger, accompagner, conseiller, former, jouer, rire, partager… je vous propose de les applaudir… et avec votre accord, je leur ferai part de votre soutien et votre merci.                                                                    … / …

En Loire-Atlantique, à partir des situations constatées localement, le projet du SCCF s’exprime par une vision commune : « Osons vivre la rencontre et l’entraide pour agir ensemble » qui se décline en trois priorités :

1.     La capacité d’agir ensemble : c’est par exemple le fait d’associer le plus largement les personnes accompagnées dans la construction des projets et des activités, jusque dans la gouvernance ; c’est passer « du faire pour », au « faire à partir de » et maintenant au « faire avec ».

2.     L’évolution de nos savoir-être, c’est par exemple changer nos regards : « Le peuple restait là à regarder » précise St-Luc : n’avons-nous pas parfois tendance à nous sentir nous-mêmes impuissants ?  L’Evangile appelle à deux attitudes : d’abord une clarification du regard (Il y a des regards, comme on dit, qui tuent !) puis à s’engager au dialogue. Toute personne a besoin d’entendre une parole pour commencer d’être guérie. Chacun peut offrir un sourire, un regard positif, une parole de bienveillance, un geste de la main qui valorise. Dans les situations les plus difficiles, le dialogue fraternel ouvre un espace de paradis, une communion, une espérance… Ecoutons l’expression d’une personne en précarité (Françoise / Patrick) : « L’Église dont je rêve »

3.     Le plaidoyer : c’est la volonté d’analyser et de réfléchir en amont sur les causes de la précarité et d’interpeler les décideurs sur les leviers d’action et de prévention afin de ne pas œuvrer éternellement en secours. Le rapport statistique produit annuellement par le SCCF en est un exemple.

Oui, F&S, tout ceci nous appelle à vivre en cohérence dans l’attention aux plus pauvres avec nos manières d’agir ; plus grandira notre fraternité, plus se développera la solidarité ! Alors, si vous faites partie des généreux donateurs ou envisagez de le devenir : soyez en remerciés, vous avez compris que la tendance de l’évolution des besoins n’est pas à la baisse ; et si vous vous sentez appelé à expérimenter un engagement bénévole, je vous partage cette réflexion d’Alain (sorti de la rue) : « Si tu veux aider quelqu’un, ne commence pas par te demander ce que tu peux faire pour lui, mais ce qu’il peut faire pour toi et fais lui confiance »

Amen

Patrick JAVANAUD (avec la complicité de mes frères et de l’Esprit-Saint)

20 novembre 2022



Paroles de personnes en précarité : « L’Église dont je rêve »

Si l’Église dont je rêve était une plante, ce serait l’olivier : il a quelque chose d’éternel. On a le sentiment d’une solidité, le sentiment que la production ne s’arrête pas. On en fait de l’huile, des soins. C’est un fruit qui sera toujours là pour nous et qui ne sera jamais démodé. C’est aussi là que Jésus a été arrêté.
L’edelweiss, elle, pousse en haute montagne et elle va disparaître parce que les gens l’arrachent et la jettent juste parce qu’ils ont envie de la voir. Mais, malheureusement, si on ne la respecte pas, c’est comme l’Église, elle va s’effacer du paysage. C’est une belle fleur aussi, il ne faut pas la couper n’importe comment.

 

Si l’Église dont je rêve était un animal, ce serait un Saint-Bernard pour aller chercher des gens en détresse. Il y a ce côté protection. Aller vers la personne en détresse, ça devrait être le rôle de l’Église. Aujourd’hui, les personnes en détresse, ce serait peut-être toutes celles qui étaient dans l’Église et qui en sont sorties, pour faire séparation ; celles qui se cherchent.

 

Il y a quelque chose d’imposant dans l’image de l’Église, c’est un très beau monstre mais qui inspire confiance. Un oiseau qui peut s’envoler, avec la liberté de rentrer et de sortir, être dehors. Pour moi, il faut faire une Église à l’intérieur et aussi à l’extérieur. Par exemple à Lourdes, où il y a la Grotte, ça fait comme une Église. Elle est ouverte. Dans l’Église, il y en a qui ont peur de l’Église, peur de rentrer.

 

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