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4° dimanche du Temps Ordinaire




 
        Le passage de l’Evangile de Saint Luc que nous venons d’entendre est un peu surprenant : Jésus qui vient de prendre la parole dans la synagogue de Nazareth est plutôt bien reçu : « Tous lui rendaient témoignage ; et ils s'étonnaient du message de grâce qui sortait de sa bouche. » Et en quelques mots de Jésus, retournement de situation,  il les rend furieux, au point qu'ils voudront se débarrasser de lui, une bonne fois pour toutes. Qu’est ce que Jésus a dit de si extraordinaire et pourquoi ?   

        En fait, il leur a asséné une leçon qui est dure à entendre. Elle tient en deux points. Premièrement, si j'ai pu faire des miracles à Capharnaüm, c'est parce que ses habitants avaient une autre attitude que la vôtre. La fin du récit prouve bien que Jésus a vu juste : la violence de la réaction de ses compatriotes prouve qu'ils n'étaient pas prêts à accueillir les dons de Dieu comme des dons mais plutôt comme un dû.
Le deuxième point revient à dire que les païens sont plus près du salut que ceux qui se disent croyants. C'est ce qui se dégage des deux histoires d'Élie et Elisée.   

        Une païenne (la veuve de Sarepta), un général ennemi, païen, lépreux (Naaman) : aucun des deux ne peut prétendre avoir des droits sur le Dieu d'Israël... et ce sont ces pauvres qui ont été comblés. Jésus n'ajoute pas, mais tout le monde le comprend : "À bon entendeur salut."
        En quelques lignes, nous avons ici un raccourci de la vie de Jésus : "Il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reçu", dira saint Jean. Luc le dit ici à sa manière, en opposant l'attitude de  Nazareth, sa ville natale et celle de Capharnaüm (où il était au  départ un inconnu), et cette opposition en préfigure une autre : l’opposition entre l'attitude de refus des juifs (pourtant destinataires du message des prophètes) et l'accueil de la Bonne Nouvelle  par des païens. Comme la veuve de Sarepta, comme le général  syrien Naaman, ce sont les non-juifs qui feront le meilleur accueil  au Messie. Mais la victoire définitive du Christ est déjà annoncée,  symbolisée par sa maîtrise sur les événements : "Lui, passant au  milieu d'eux, allait son chemin."
Mais n’est ce pas le lot de tous les prophètes d’être maltraité, torturé par sa propre nation ? C’est le cas aussi de Jérémie. Malgré son tempérament timide et réservé, c’est rempli de l’Esprit de Dieu qu’il est allé sur les places des villages mais aussi dans les cours des palais pour redire l’infidélité du peuple de Dieu envers son créateur ; Mal lui en a pris : il a été raillé, torturé et ses lamentations ont pris un nom encore connu : les jérémiades : pas très glorieux ! Il avait pourtant raison et ses successeurs, et l’histoire l’ont reconnu, trop tard.

        La semaine dernière, rappelez vous, dans le commencement du même texte, nous avons entendu Jésus nous dire : « Cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. » Alors pour nous, aujourd’hui, quel est le message ? Oh il n’est pas forcément plus facile à entendre et j’espère que je ne finirais pas lapidé ou jeté du haut d’une falaise !

        C’est que nous sommes chaque matin appelé à une conversion car chaque jour  nous devons choisir le chemin vers Dieu. Et sur ce chemin ceux qui n’ont pas voulu venir à la messe avec nous ne sont pas forcément moins avancés : Jésus est venu pour les malades pas les bien portants et nous aurions tort de nous croire arrivés et de nous reposer sur nos lauriers. Vous connaissez cette expression : Hors de l’Eglise point de salut, la formule vient de saint Cyprien, évêque de Carthage au IIIe siècle. Confronté aux persécutions et aux apostasies des chrétiens, il rappelait à ceux qui quittaient l’Eglise qu’ils refusaient ce faisant le salut : « personne ne peut avoir Dieu pour Père s’il n’a pas l’Eglise pour mère ».

        Mais il est vrai aussi que Dieu aime tous les hommes, sans exception, même ceux qui n’appartiennent pas à l’Eglise. Pas un seul humain, en tous temps, en tous lieux, n’est hors du cœur de Dieu. Il "veut que tous les hommes soient sauvés" (1 Tm 2,4), voilà pourquoi "le Christ s’est livré en rançon pour tous" (1 Tm 2,6).

        La clé n’est pas la participation à des rites, ni dans l’obéissance aveugle : elle est dans la rencontre avec Jésus comme nous sommes, tout petits devant lui, rappelons nous les Béatitudes: seuls les pauvres de cœur savent accueillir en eux les richesses de Dieu.
Mais Jésus, nous ne lui serrons pas la main chaque matin et il n’a pas de compte facebook ni de portable. Alors comment le rencontrer ? Reprenons plutôt la lettre de Saint Paul aux Corinthiens.

        C’est un peu un portrait de Jésus qu’il dresse aux habitants de Corinthe qui attachaient à l'intelligence, à la naissance, à la condition sociale, une importance telle que Paul leur dit :

        « Parmi les dons de Dieu, vous cherchez à obtenir ce qu'il y a de meilleur. Eh bien, je vais vous indiquer une voie supérieure à toutes les autres »
Mais n’est ce pas pareil chez nous : avec quels critères regardons-nous nos contemporains avant de les mettre dans des cases ? Toutes ces soi-disant valeurs auxquelles nous tenons tant, nous aussi, ne sont que des balayures, comme Paul le dit ailleurs.

        Du coup, nous pourrions être tentés de lire ce texte comme une leçon de morale, comme un programme à remplir : "Voilà ce que vous devez faire si vous voulez remporter la palme du plus bel amour". Mais, avant de parler de nous, ce texte de Paul parle d'abord de Dieu, il contemple le mystère de l'amour de Dieu ; à chaque fois que nous rencontrons le mot "Amour" dans ce texte, nous pourrions le remplacer par le mot "Dieu" : "L'amour prend patience" ; oui, Dieu patiente avec son peuple, avec l'humanité, avec nous, lui pour qui "mille ans sont comme un jour, et un jour est comme mille ans", nous dit Pierre (2 P 3,8) ; oui, "l’amour rend service", il suffit de regarder Jésus laver les pieds  de ses disciples pour s'en convaincre (Jn 13) ; le peuple d'Israël a eu maintes occasions d'expérimenter que "l'amour (c'est-à-dire Dieu) ne garde pas rancune", lui qui a pardonné à son peuple sans  se lasser tout au long de l'histoire biblique, jusqu'au jour où sur le  visage du Christ en croix, nous avons entendu les paroles  suprêmes du pardon : "Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce  qu'ils font".
      
        Avant de recevoir les paroles de Jésus ou les enseignements de l’Eglise comme des reproches ou des consignes qui sont d’un autre âge, accueillons-les comme un chemin d’amour, car au dernier jour c’est sur l’amour que nous serons jugés. Et Jésus ne nous a laissé qu'une seule consigne : "Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés". Heureusement pour nous, nous ne sommes pas laissés à nos seules forces pour cela, puisqu'il nous a transmis son Esprit : "L'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné" (Rm 5,5).

        L'Esprit est  très discret, il attend peut-être que nous lui demandions son aide.

 
Viens Saint-Esprit,
Viens par ton vent,
Remplir le temple que je suis.
Oh ! Viens Saint-Esprit, souffle puissant,
Brise d'amour, courant de vie.
Souffle sur moi, souffle sur moi, souffle.
Souffle sur moi, souffle sur moi, souffle.
Souffle sur moi, souffle vent de Dieu.
 
Viens Saint-Esprit,
Viens par ton feu,
Brûler l'offrande que je suis.
Oh ! Viens Saint-Esprit, feu dévorant,
Brasier d'amour, flamme de vie,
Embrase-moi, embrase-moi, brûle.
Embrase-moi, embrase-moi, brûle.
Embrase-moi, brûle feu de Dieu.
 
Philippe ARRIVE
aidé par Marie-Noëlle THABUT
Vertou, les 2 et 3 février 2013          



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