Cette année-là, au cours de la grande Pâque à Jérusalem, les choses ne se passent pas comme prévu. Jésus, accueilli triomphalement meurt sur la croix, là où tous les rêves, tous les espoirs semblent anéantis. Même si… même si trois jours après quelques femmes : Marie, Marie-Madeleine, l’autre Marie, les apôtres Pierre et Jean constatent l'absence du corps, même si…même si quelques autres disent l'avoir vu... jusqu'à toucher son corps…ils ne s'autorisent pas encore à croire à la révélation ultime annoncée, par 3 fois ! par Jésus lui-même. Alors, déstabilisés, désemparés, plutôt que de rester là à pleurer, ils vont nourrir leur deuil en vivant ce qu'ils savent faire le mieux : pêcher. Pierre les entraîne dans une nouvelle nuit de pêche mais rien ne va ! Ils rentrent de bon matin bredouilles.
Depuis le rivage, un homme les interpelle. Il les invite à changer leurs habitudes en jetant le filet de l’autre côté…De toute façon, ça ne peut pas être pire, alors ils s’exécutent. Et là le manque se transforme en profusion ! Jean qui a cru en voyant le tombeau vide reconnaît en cet homme le Seigneur. C'est la troisième fois que Jésus ressuscité se manifeste. Après le repas Jésus s'adresse à Pierre pour confirmer la mission donnée le jour où ils se sont vus pour la première fois « tu es Pierre et sur cette pierre je construirai mon Église ». Aujourd'hui la lui confie ! Pour que Pierre prenne pleinement conscience de ce qui lui est donné et demandé, jésus demande à 3 reprises l'unique condition « m’aimes-tu suffisamment pour porter, avec moi, cette responsabilité ? ».
Pierre va témoigner jusqu'à la fin de ses jours, jusqu’au don de sa vie, comme son maître Jésus, attestant d'un Dieu venu, non pour juger, mais pour servir par amour pour le bonheur des femmes et des hommes de ce monde quels qu'ils soient.
Mais avant de témoigner devant les hommes, Pierre doit témoigner à Jésus de sa conversion. Lui qui par trois fois a renié son ami, lui qui, face au tombeau vide, rentre chez lui sans comprendre et sans approfondir, lui qui aujourd'hui encore repart chez lui pour replonger dans la vie ordinaire d’un pêcheur. Relancé dans son intime par son maître, Pierre comprend et accepte cette relation personnelle de dépendance et de confiance en Jésus pour vivre ce qui lui est confié
Pierre avec ses fulgurances et ses doutes, ses fragilités et ses talents est accepté tel qu'il est avec ses qualités et ses défauts, comme chacun de nous. Si Jésus le choisit c’est parce que, comme vous, comme moi, Pierre a quelque chose d'unique en lui, sa foi, qui lui donne l'audace de témoigner. Pierre en confiance, donne sa parole à Jésus, comme nous le faisons, si souvent…Lui, à la fin, ira jusqu'au bout.
On pourrait presque dire que Jésus s'adapte à Pierre, comme il s’adapte à chacun de nous, dans notre unicité pour que la Bonne Nouvelle soit connue. De disciple qui connaît encore la souffrance de l'infidélité et du déni, dans cette ambivalence du doute et de la confiance, la foi va grandir petit à petit pour le rendre capable de témoigner et de suivre le Christ jusqu'à la fin.
Il y a eu Jean puis Paul, Jean-Paul, Benoît, François et bientôt un nouvel évêque à Rome, pour assurer la continuité de Pierre… mais il n'y aura jamais de « Jésus II », pas de successeur de nature divine. En revanche il y a toujours des témoins ! Témoins de la foi et de la Bonne Nouvelle, de la Parole et l'amour de Dieu, de l'amour fraternel et de la charité …à l'image de Pierre, ce témoin d’Espérance.
Nous qui parfois doutons de notre témoignage ou d'être reconnu comme ami de Jésus, par nos hésitations, nos fragilités, nos manques de foi…regardons cet homme avec ses propres fragilités (qui sont les nôtres), nos résolution prises du fond du cœur, qui parfois nous échappent, comme Pierre « je te suivrai jusqu'au bout » ce qu’il niera par trois fois… combien de fois avons-nous oublié ou abandonné les promesses que l'on s'était faites, et toutes celles que nous avions faites à Jésus ?
Nous venons de fêter la Miséricorde de Dieu, Il connaît mes difficultés, mes vulnérabilités. Il ne me demande pas d'être parfait mais de reconnaître mon imperfection pour me rapprocher de lui et recevoir, de Lui, sa miséricorde. Cette miséricorde qu’il m’offre pour que je puisse renaître de son amour. Un amour qui donne la force de continuer à témoigner par ma façon d'être, de vivre, d'accueillir, de pardonner et peut-être même de parler.
Jésus rejoint ses apôtres dans leur vie habituelle : la pêche. Aujourd'hui, il nous rejoint aussi dans notre vie quotidienne à l'école, au travail, en famille, en voisinage, dans mes engagements, dans cette église, oui, aujourd’hui encore… partout où nous avons à témoigner, comme Pierre, en prenant appui sur la Parole et l'amour de Jésus qui transforme nos fragilité en une énergie qui se renforce dans l'Eucharistie que nous allons partager pour continuer à vivre la joie d'être chrétien, nous aussi témoins d’Espérance !
Patrick DOUEZ, diacre permanent
4 mai 2025