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3° dimanche de Pâques

Ac 5, 27-41 ; Ap 5, 11-14 ; Jn 21, 1-13

       Quelle richesse dans les textes que la liturgie nous propose aujourd’hui ! quelle abondance d’images, de chiffres et de symboles ! Particulièrement dans les deux textes de Saint Jean : la deuxième lecture, tirée du Livre de l’Apocalypse, et l’évangile.
En effet, Saint Jean, qui est l’auteur, tout de même, de 5 livres du nouveau testament – un évangile, 3 lettres apostoliques et l’Apocalypse – est un spécialiste des détails symboliques. Détails sur lesquels on peut passer rapidement, sans y accorder d’importance, si on cherche juste à découvrir l’histoire qui est racontée. On passe alors à côté, peut-être pas de l’essentiel, mais en tout cas de la signification profonde du message qu’il veut nous transmettre. Nous sommes si peu familiers du langage symbolique, nous, occidentaux du XXIème siècle. Alors (ce matin / ce soir), prenons le temps, au-delà des faits eux-mêmes racontés dans ces récits, d’explorer ensemble tous ces détails qui éclairent notre compréhension. Car ils fournissent une puissance symbolique très forte à ces messages transmis de manière implicite, peut-être même subliminale.
Parmi les symboles, il y a surtout les chiffres. Il ne s’agit pas de faire de la numérologie, mais de repérer ce que représentent les nombres et les quantités dans le monde biblique, et donc de comprendre ce qu’ils signifient pour les lecteurs de toute époque et de toute culture.
Le chiffre 3 : Dans la tradition hébraïque, et encore à l’époque de Jésus et des premiers chrétiens, pour être validées et déclarées définitives, les formules juridiques devaient être répétées à trois reprises devant témoins. Dans son évangile, nous venons de l’entendre, Jean précise : « C’était la troisième fois que Jésus ressuscité d’entre les morts se manifestait à ses disciples ». Ce n’est pas pour rien qu’il ajoute cette phrase à son récit. Il le fait pour attester, valider le fait qu’il annonce : Jésus est bel et bien ressuscité.
Le chiffre 3 c’est aussi, bien-sûr, le chiffre de Dieu. Dieu est Trinité, un Dieu en 3 personnes. Trois, c’est la stabilité. Un trépied n’est jamais bancal. Dieu est celui sur lequel on peut s’appuyer, sur lequel on peut compter avec certitude. C’est d’ailleurs le sens du mot « amen » qui conclue et atteste une prière ou une affirmation : Ce qui vient d’être dit est sûr, fiable, je peux m’y fier en toute confiance ! amen !
Voyons le chiffre 4 à présent. 4 représente le monde créé, sans doute à cause des 4 points cardinaux, les 4 directions vers lesquelles l’homme peut se tourner pour contempler la totalité de la création qui l’entoure.
Puisque 3 + 4 = 7, le chiffre 7 symbolise donc, pour les croyants la perfection, la totalité, la plénitude, puisque c’est l’addition de Dieu et du monde créé.
Or, qu’avons-nous entendu dans la deuxième lecture ? il est question de la multitude des anges qui criaient à pleine voix : « Lui, l’Agneau Immolé – c’est-à-dire le Christ – est digne de recevoir puissance et richesse, sagesse et force, honneur gloire et louange ». Quatre termes qui sont des qualités positives terrestres (puissance, richesse, sagesse et force) ajoutés à trois termes réservés à Dieu (honneur, gloire et louange). Ces sept termes signifient donc que le Christ est pleinement Dieu et pleinement homme.
Et le récit continue avec l’acclamation de la Création tout entière : « les créatures dans le ciel et sur la terre, sous la terre et sur la mer » À nouveau une énumération des quatre catégories de créatures, qui proclament leur soumission à Dieu, « celui qui siège sur le trône » pour l’éternité.
Et les quatre vivants répondent : « Amen » ! et nous avons vu la profondeur du sens de ce « amen ».
Pour résumer, ce passage de l’Apocalypse de St Jean nous révèle la victoire finale et définitive de Dieu et nous replace comme membres de sa Création, destinés avec elle à le louer éternellement.
 
Prenons maintenant l’évangile d’aujourd’hui.
Combien sont-ils à partir à la pêche ? Il y a Simon-Pierre, Thomas, Nathanaël, les 2 fils de Zébédée, et comme le compte n’y est pas, Saint Jean ajoute : « et deux autres disciples ». Cette fois, ils sont bien sept. Nous retrouvons ici le chiffre de la perfection, de la totalité. L’évangéliste suggère que cette pêche est celle de toute l’Église, dans sa totalité. Et l’épisode raconte que quand ces 7 hommes pêchent avec leur seule capacité humaine, quel que soit leur talent de pêcheur, quelle que soit leur longue expérience, quelle que soit leur maîtrise dans les techniques qu’ils emploient, cette pêche restera désespérément infructueuse. Il faudra que Dieu s’y implique lui-même pour qu’elle dépasse toute espérance, qu’elle devienne une pêche miraculeuse. Ainsi en est-il de nos efforts, qui restent peu efficaces et nous semblent parfois vains, s’ils ne s’appuient pas sur Dieu, si nous ne laissons pas Dieu agir à travers nous. Nous voulons parfois, en toute bonne foi, faire des œuvres « pour Dieu », nous avons plus de mal spontanément à vouloir faire « l’œuvre de Dieu », ce qui demande une très grande humilité.
    Encore un chiffre : il est question de 153 poissons. Pourquoi 153 ? Saint Jérôme nous dira quelques siècles plus tard que les naturalistes de l’époque connaissaient 153 différentes sortes de poisson. 153 serait donc encore une fois une totalité : la totalité des poissons de la mer. Cette pêche miraculeuse racontée par Saint Jean nous raconte en réalité, de manière symbolique, l’évangélisation de l’Église, qui ramènera à Dieu la totalité des peuples de la terre.
    Un dernier chiffre symbolique apparaît dans cet évangile : Par trois fois, Jésus demande à Pierre « m’aimes-tu ? » et par trois fois, Pierre répond : « tu sais que je t’aime », lui qui l’avait renié trois fois, quelques jours auparavant. Et par trois fois, Jésus confirme Pierre dans sa mission de veiller sur son peuple : « sois le pasteur de mes brebis ». On a à nouveau ce procédé de triple attestation d’une réalité : Saint Jean affirme ainsi que Pierre est bien le pasteur de tout le peuple des croyants, et que c’est bien Jésus lui-même qui lui a confié cette mission.

Ce petit parcours de lecture symbolique peut nous aider à lire la Bible autrement. Ce n’est qu’un niveau de lecture, il y en a d’autres, mais je vous invite à essayer. Tout seul, c’est plus difficile ! Mais il existe beaucoup de livres pour nous aider. Et pourquoi pas décider, entre amis, entre voisins, de lire la Bible ensemble ? en s’appuyant sur les travaux de biblistes renommés, comme Marie-Noëlle Thabut qui reste très abordable et qui m’a aidé à préparer cette homélie.
Quoi qu’il en soit, vous l’aurez compris : Christ est bel et bien ressuscité ! Il a donné mission à Pierre et à ses successeurs de veiller sur nous, alors réjouissons-nous ! Alléluia, allléluia, alléluia ! Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent
St Hilaire de Clisson, Gorges, Clisson.
1 mai 2022


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