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33° dimanche du Temps Ordinaire


Ml 3, 19-20 ; Ps 97 ; 2 Th 3, 7-12 ; Lc 21, 5-19

Contexte : Messe Animée par les Jeunes de la paroisse.

Recherche Google : « fin du monde » : environ 3 160 000 résultats. Et quels résultats ! un clic sur le premier d’entre eux, et voici, sur toute la largeur de l’écran, un compte à rebours : 768 jours, 3 heures, 12 minutes, 56 secondes, suivi de 3 chiffres qui défilent à toute vitesse : les millièmes de seconde ! Ce compte à rebours est calé, vous l’avez deviné, sur le 21 décembre 2012, ce fameux dernier jour du temps calculé selon le calendrier Maya, et qui a même donné un film catastrophe sorti récemment. Et voici ce que j’ai lu sur un autre des 3 160 000 sites trouvés par Google :
« Au lever du Soleil du 21 décembre 2012 et pour la première fois depuis 26 000 ans, le Soleil se lèvera pour se joindre à l'intersection de la Voie lactée et du plan écliptique. Cette croix cosmique est considérée comme une incarnation de l'Arbre Sacré, l'Arbre de la Vie, un arbre reconnu dans toutes les traditions spirituelles du monde. À ce moment-là notre planète est censée enregistrer de très violents séismes terriblement dévastateurs ... » fin de citation, je vous fais grâce de la suite.
Cette « explication » si on peut dire, commence, comme toujours, par une description objective, scientifique, incontestable, prévisible depuis longtemps, comme tout phénomène astronomique. Puis, la phrase suivante est un peu plus douteuse : « cette croix cosmique est considérée comme une incarnation de l'Arbre Sacré » et le paragraphe se termine par une affirmation carrément fantaisiste : « À ce moment-là notre planète est censée enregistrer de très violents séismes terriblement dévastateurs ».
Pourquoi est-ce que je vous parle de ça ? Vous avez sans doute fait vous-même le rapprochement avec l’évangile d’aujourd’hui. Jésus nous parle d’événements qui nous font évidemment penser à « la fin du monde ». Mais, l’avez-vous remarqué ? le récit de l’évangile, lui aussi, part d’un fait objectif, incontestable : le temple de Jérusalem. Ce monument imposant, gigantesque, solide, si richement décoré. Regard admiratif des disciples contemplant cet édifice, preuve rassurante de la puissance et du génie des hommes, défi au temps qui passe, modèle de solidité, de stabilité. Et comme dans ce texte du site Internet de tout à l’heure, le récit va vite « déraper » . Voilà que Jésus annonce que même ce temple est voué à la destruction totale, pour laisser advenir son Royaume, qui, lui, sera éternel. Et cette destruction s’accompagnera d’événements guère plus rassurants : conflits, guerres, soulèvements, tremblements de terre, épidémies, famines, persécutions… Est-ce là l’annonce de la Bonne Nouvelle ?
Ce discours sur l’imminence de la fin du monde n’est pas nouveau. Toutes les époques ont eu leurs devins, aruspices, astrologues, sorciers, médiums et autres faux prophètes, profiteurs de la crédulité et du manque d’espérance des hommes.
Les croyants de l’époque de Jésus ont tellement pris ces paroles au pied de la lettre, ils croyaient tellement que ces événements allaient arriver d’un jour à l’autre, que certains se disaient : « pourquoi travailler, se fatiguer ? de toute façon, la fin de ce monde est proche, à quoi sert de s’inquiéter de l’avenir ? » C’est à ceux-là que St Paul adresse sa réprimande : « Celui qui ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non-plus ». C’est-à-dire : « soyez cohérents ! Pourquoi mangez-vous, alors, si la fin est si proche ? ». Les événements qu’annonce Jésus, c’est le « Jour du Seigneur » que nous promet le prophète Malachie de la première lecture ; c’est le jour où « le Seigneur vient pour gouverner la terre » comme le chante le psaume de ce dimanche.
Ces événements, ne les attendons pas comme on attend les soldes, comme on attend les prochaines vacances, ou encore comme les contemporains de St Paul, attendant les bras croisés qu’advienne le Royaume. Il nous faut agir pour le faire advenir. Dieu nous donne de participer avec lui à la venue de ce « Jour du Seigneur ». Ne nous trompons pas. Ne restons pas centrés sur nous-mêmes et sur notre société occidentale, privilégiée matériellement et si tristement démunie spirituellement. Ne restons pas prisonniers du temps et du lieu où nous sommes. Guerres, conflits, soulèvements, tremblements de terre, épidémies, famines, persécutions, ce n’est pas dans mille ans, ce n’est pas dans cent ans, ce n’est pas en 2012. C’est aujourd’hui, et c’est de tout temps. C’est ici, et c’est partout ailleurs : comment ne pas évoquer la persécution des chrétiens d’Irak, mais aussi de bien d’autres pays : Arabie Saoudite, Inde, Egypte… « la création tout entière crie sa souffrance, elle passe par les douleurs de l’enfantement » disait déjà St Paul voici 2000 ans dans sa lettre aux Romains.
Alors, n’écoutons pas ces faux prophètes d’aujourd’hui qui exploitent l’angoisse de ce temps pour annoncer la fin d’un monde, et ainsi détourner l’homme de ses responsabilités, de la nécessaire solidarité. Regardons avec lucidité ces guerres, persécutions, tremblements de terre, épidémies… Regardons avec compassion les victimes de ces catastrophes. Et nous pensons bien sûr à ces milliers de personnes en Haïti, qui sont toujours à la rue, dix mois exactement aujourd’hui après ce fameux tremblement de terre. Ces pauvres qui pleurent, là-bas, dans le silence pendant que d’autres, ici, hurlent pour garder leurs petits avantages. Ce contraste peut avoir quelque chose de choquant. Les jeunes parmi vous qui reviennent d’Afrique nous ont dit avoir ressenti ce choc du contraste entre la pauvreté là-bas et nos richesses ici, et cette indécence de nos revendications parfois. Mais Jésus termine son récit en nous encourageant à ne pas rester les bras croisés, et à continuer d’œuvrer pour faire advenir son royaume. Et à la différence de ces sites Internet et autres médias qui relaient une vision terrifiante de la fin du monde, il nous rassure et encourage notre espérance : « ne vous effrayez pas », « ne craignez pas », « n’ayez pas peur ». Il attire notre attention sur la croissance laborieuse de la Création, qui à cause du péché du monde, passe inévitablement par des douleurs, des persécutions, des catastrophes. Mais en même temps il nous assure que « pas un cheveu de notre tête ne sera perdu ». Même si, inéluctablement, le Temple sera détruit, ce n’est pas pour aboutir au néant, mais pour laisser place au Royaume de Dieu. Voilà notre espérance !
Alors, comme Jésus nous y invite, soyons partie prenante dans la venue du Jour du Seigneur. Investissons de notre temps pour les autres, là où nous sommes d’abord, mais aussi pourquoi pas en Afrique, en Asie, en Amérique latine, auprès de ceux qui souffrent au loin. Quel que soit notre âge, c’est là que se vit concrètement notre espérance de Chrétiens, au service de l’humanité, pour l’aider à cheminer vers ce bonheur promis, vers ce Jour du Seigneur. Jésus nous assure qu’il prendra notre défense contre tous s’il le faut : « Moi-même, je vous inspirerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance ni contradiction » et  « c’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie ».  Non, ne craignons pas ce monde qui nous semble parfois déréglé, détraqué. N’ayons pas peur ! « Le Seigneur vient, il vient pour gouverner la terre, pour gouverner le monde avec justice, et les peuples avec droiture ! »

Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent.
Clisson, MAJ du 13 novembre 2010

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