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32° dimanche du Temps Ordinaire



Dans le monde des ordinateurs il y a deux grandes entreprises concurrentes : Microsoft et Apple. L’une est un rouleau compresseur qui essaye d’être implanté dans chaque foyer du monde entier : Microsoft. L’autre, qui ne fait pas non plus dans la philanthropie, a souvent recherché des solutions plus ingénieuses, plus novatrices et ce système est très apprécié des artistes. Un peu avant l’an 2000, cette société, Apple, a lancé une grande campagne de promotion « Think different » ! Traduction littérale « pensez différent ». Ce n’est pas « pensez autrement » mais « pensez différent ».
Cette petite analogie informatique pour nous introduire à une réflexion autour des textes que nous propose la liturgie de ce dimanche.
Il y a une semaine nous fêtions tous nos prédécesseurs, les saints et le lendemain les fidèles défunts. Ce mois de Novembre qui se terminera par la fête du Christ Roi de l’univers nous engage à réfléchir à la fin : la fin de l’année liturgique, la Fin des temps, notre fin.
En tant que chrétiens, nous ne voulons pas être de ceux qui  refusent de penser à la mort. Pascal, qui était un grand croyant disait : « Les êtres humains, n’ayant pas trouvé le moyen de guérir la mort, ont décidé de chercher le bonheur en évitant d’y penser. ».
 Mais nous n’oublions pas que si la science médicale gagne un bon nombre de batailles, à la fin, c’est toujours la mort qui a le dernier mot. Mais la mort n’est pas la fin de tout.
L’espérance chrétienne nous rappelle que l’amour, la beauté, la compassion, l’attention aux autres, la bonté, la soif de justice qui se trouvent en nous et que nous admirons chez les autres ne disparaîtront pas avec la mort.
«Ne soyons pas abattus comme ceux et celles qui n’ont pas d’espérance» (1 The 4, 13) nous a dit Saint Paul et «Soyons toujours prêts à répondre à quiconque nous demande la raison de l’espérance qui est en nous.» insiste Saint Pierre (1 Pierre 3, 15)
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Le texte de la première lecture de ce jour marque une étape capitale dans le développement de la foi juive. C'est l'une des premières affirmations de la résurrection des morts. Nous sommes vers 165 avant J.-C., en un moment de terrible persécution déclenchée par le roi Antiochus Epiphane II qui était très certainement mégalomane et voulait être révéré comme un dieu. Pour obliger les juifs à renier leur foi, il exige d'eux des gestes de désobéissance à la Loi de Moïse. Mais paradoxalement, c'est au sein même de cette persécution qu'est née la foi en la Résurrection. Car une évidence est apparue qu'on pourrait exprimer ainsi : puisque nous mourons par fidélité à la loi de Dieu, lui qui est fidèle nous rendra la vie.
   La découverte de la foi en la résurrection des corps n'a été possible qu'après une longue expérience de la fidélité de Dieu. Et alors  tout d'un coup, c'est devenu une évidence que le Dieu fidèle, celui qui ne nous a jamais abandonnés, ne peut pas nous abandonner à la mort... quand nous acceptons de mourir par fidélité justement.
« Pensez différent ». Le roi Antiochus est tout de même étonné que l’on puisse choisir la mort dans d’atroces souffrances plutôt que de manger du porc ! Mais l’important est ailleurs : Les promesses que Dieu a faites sont assorties du respect à la Loi, dans ses grands principes : « tu ne tueras pas ». Et aussi dans les petits détails comme ne pas manger de viande impure.
Jésus a souvent bataillé contre ces détails qui bloquaient toute relation vraie à Dieu en expliquant le sens profond de cette obéissance. Mais jamais il n’a demandé qu’ils soient considérés comme rien.
Pour Antiochus, il semble impossible de mettre en balance la vie et des détails qui paraissent futiles. Mais les sept frères (et leur mère admirable si vous lisez la suite), préfèrent choisir l’amour du Seigneur à une vie où ils renieraient leur foi en la Vie.          (V majuscule).
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Alors au temps du Christ, la foi en la Résurrection était toute neuve ; elle n'était pas encore partagée par tout le monde. Les pharisiens y croyaient fermement ; pour eux c'était une évidence que le Dieu de la vie n'abandonnerait pas ses fidèles à la mort. Mais on pouvait très bien être un bon juif sans croire à la résurrection de la chair. C'était le cas des sadducéens. Pour justifier leur refus de la résurrection, ils cherchent à démontrer qu'une telle croyance conduit à des situations ridicules : leur logique est imparable. Une femme ne peut pas avoir sept maris à la fois, on est tous d'accord ; si vous croyez à la résurrection, disent-ils à Jésus, c'est pourtant ce qui va se passer... elle a eu sept maris successifs, qui sont morts les uns après les autres ; mais si tous ressuscitent, vous voyez à quoi cela mène !
   L'erreur, Jésus va le leur dire, c'est de justifier notre foi par nos raisonnements. Isaïe l'a dit depuis longtemps : "Les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées, et ses chemins ne sont pas nos chemins" (Is 55, 8).
« Pensez différent ». L’Alliance avec Dieu traverse la mort : il noue avec chacun de nous un lien d'amour que rien ne pourra détruire. Or, au-delà de la mort, comme dit saint Jean "nous lui serons semblables" (1 Jn). Pour l'instant, "Ce que nous serons ne paraît pas encore clairement"... Mais alors, nous serons enfin à son image, des vivants, des aimants.
    Mais, l'erreur des sadducéens - encore une -, c’est d’avoir oublié que le mariage est aussi et d'abord une affaire   d'amour : nos amours humains, d'ici-bas, ne peuvent pas mourir car ils sont l'image de Dieu, ils sont ce qui, en nous, est à l'image  de Dieu ; ils traversent la mort ; nous les retrouverons transfigurés sur l'autre rive.
La résurrection des morts, c'est-à-dire aussi la nôtre un jour, nous allons la proclamer dans notre profession de foi. Mais comment aujourd’hui, l’envisageons nous ? Le Paradis c’est comme ceci ou comme cela…
« Pensez différent ». Faisons confiance à Dieu : il nous aime chacun d’une manière inouïe, et ce qu’il nous promets est le meilleur possible pour chacun de manière unique.
Alors, comment les morts ressuscitent-ils ? Avec quel corps reviennent-ils ?
Ce " comment " dépasse notre imagination et notre entendement ; il n’est accessible que dans la foi. Mais notre participation à l’Eucharistie nous donne déjà un avant-goût de la transfiguration de notre corps par le Christ : « De même que le pain qui vient de la terre, après avoir reçu l’invocation de Dieu, n’est plus du pain ordinaire, mais eucharistie, constituée de deux choses, l’une terrestre et l’autre céleste, de même nos corps qui participent à l’eucharistie ne sont plus corruptibles, puisqu’ils ont l’espérance de la résurrection (S. Irénée, hær. 4, 18, 4-5).
Alors tout à l’heure devant le pain devenu Corps du Christ ressuscité mais qui a gardé l’apparence du pain, disons avec Saint Thomas ; « Mon Seigneur et mon Dieu » car rien n’est impossible à Dieu. Il suffit de « Pensez différent » !

Philippe ARRIVÉ, diacre permanent
VERTOU                   
06-07 Novembre 2010    


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