Année C
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retour vers l'accueil32° dimanche du Temps Ordinaire
2M 7, 1-2.9-14 ; Ps 16 ; 2 Th 2, 16-17; 3, 1-5 ; Lc 20, 27-38
A l’approche de la Toussaint il y
a quelques jours, nous sommes allés, comme beaucoup d’entre-nous,
refleurir les tombes de quelques-uns de nos proches qui nous ont
quittés. Devant l’une de ces tombes, Simone nous fait remarquer : «
Tenez, ici c’est Denise. Elle est enterrée avec ses deux maris ». Avec
ses deux maris ?! Mais alors ?! Imaginez un peu... !!
La vie après la mort... voilà une
énigme qui sera toujours d’actualité. Voilà une question qui a
tourmenté tous les hommes depuis les origines. Qui ne s’est jamais posé
cette question de savoir ce qui se passe « après » ? L’enfant, dès 3 ou
4 ans déjà, interroge ses parents sur la mort. Et, avouons-le, nous
sommes tous bien embarrassés pour répondre. Et nos réponses sont
complètement différentes selon ce que nous croyons nous-mêmes. Le
mystère de la mort, c’est la question fondamentale, incontournable pour
celui qui cherche un sens à la vie, ou qui cherche simplement à
comprendre ce qu’est l’homme.
Jésus lui-même est interrogé sur
ce point par les hommes de son temps. C’était inévitable : la question
des sadducéens, c’est celle de tout homme de toute époque. C’est celle
que soulève indirectement Simone devant la tombe de Denise. Mais la
manière dont ils la posent révèle déjà leur propre conviction : pour
eux, il n’y a pas de résurrection des morts, ce serait absurde ! En
réalité, ce qu’ils appellent résurrection, s’apparente plus à une
survivance, à une vie continuée. Beaucoup de personnes, même parmi les
chrétiens, comprennent la vie après la mort de la même manière que les
Sadducéens, c’est-à-dire comme une sorte de continuation de la vie,
dans un autre monde, dans un autre corps. Une sorte de réincarnation,
mais pas dans ce monde-ci. Dans ces conditions, c’est vrai, la question
absurde posée par les sadducéens semble légitime : de qui sera-t-elle
l’épouse, celle qui a eu sept maris ? Sans aller jusqu’à ce chiffre
volontairement exagéré, nous pouvons transposer la question sur
nous-mêmes et sur nos proches. Lequel de ces deux hommes est maintenant
le mari de Denise ? Celui qui l’a été en premier, ou le second ? Ou...
les deux ?!
La réponse de Jésus semble plutôt
nous dire : aucun des deux ! Admettons, mais ça nous laisse tout de
même sur notre faim ! Cette réponse n’est pas plus satisfaisante pour
nous, tant que nous restons sur nos croyances archaïques d’une vie
continuée après la mort. En fait, la réponse de Jésus replace le
problème dans une toute autre perspective. Il ne s’agit plus de savoir
qui sera l’épouse de qui, mais de tenter de comprendre ce qu’est la vie
éternelle.
Jésus nous dit que la vie
éternelle, ce n’est pas l’immortalité, ce n’est pas une sorte de
survie, ni la simple suite de notre vie terrestre, dont la mort ne
serait qu’un incident de parcours. La vie éternelle, ce n’est pas la
deuxième mi-temps, ni les prolongations. C’est une existence toute
autre, c’est la vie de Dieu, la vie avec Dieu, la vie en Dieu. Jésus
emploie l’image des anges : « Ceux qui ont part à la résurrection sont
semblables aux anges, ils sont fils de Dieu ».
Bien sûr, avec nos yeux humains,
nos yeux de chair, il nous est difficile d’imaginer une vie qui soit
radicalement différente de la nôtre. Nous avons donc tendance à essayer
de comprendre ce qui nous est totalement inconnaissable par analogie à
des modèles que nous avons. Mais ça ne marche pas toujours : Si nous
vivions parmi les poissons, au fond de la mer, nous ne pourrions pas
imaginer un seul instant qu’il soit possible de vivre sur la terre, en
dehors de l’eau. Et pourtant, ces deux réalités existent bel et bien :
la vie sous la mer pour les poissons, et la vie sur terre pour nous.
C’est un fait, après la mort,
rien n’est plus comme avant. Rien, c’est à dire... rien ! Aucun repère
d’ici-bas ne peut donner une approche suffisante de ce qu’est la vie
éternelle. Même le mariage, évoqué par les Sadducéens, ne semble pas
avoir de raison d’être dans le monde de Dieu. Voilà aussi une des
raisons pour laquelle la mort nous fait si peur. Quoi de plus
terrifiant que l’inconnu ?
C’est pourquoi St Paul, dans sa lettre aux Thessaloniciens, exhorte ses
frères à se laisser réconforter. « Réconfortés par Jésus lui-même et
par Dieu notre Père, dans la persévérance pour attendre le Christ »,
ajoute-t-il. En effet, les premiers chrétiens commencent à subir des
persécutions, et ce message de réconfort va fortifier leur foi, leur
confiance, malgré les difficultés, malgré l’approche de la mort. Le
récit des martyrs d’Israël, dans la première lecture, est aussi un
message de réconfort, même s’il est un peu cru ! Ces hommes qui
acceptent la mort dans des circonstances aussi atroces, le font parce
qu’ils savent que la vie qui les attend est toute autre, et que le
bonheur qu’elle promet est sans commune mesure avec les souffrances
d’ici-bas. Le message est très fort !
Notre compréhension de la vie après la mort a des conséquences sur
notre conception de la vie, et de fait, sur notre conception de
l’homme. Ce que Jésus nous propose, c’est de voir la vie éternelle
comme une promesse déjà réalisée, au moins en germe, en chacun de nous,
si nous voulons bien y consentir. Comme un don qu’il ne tient qu’à nous
d’accueillir et de recevoir.
Dès lors, si on considère la vie
éternelle – et par conséquent notre propre vie ici-bas – comme un don,
et comme un don de Dieu, alors rien ne doit être comme si nous en
étions les propriétaires, les maîtres, ou plus insensé encore, les
initiateurs. Or, nous le voyons, notre société occidentale qui prétend
se passer de Dieu, produit dans la pensée de nos contemporains une
irrésistible envie de pouvoir sur la vie, de sa conception à sa fin.
Cette vision de la vie non-reçue, la vie comme un dû et non comme un
don, fait que l’on considère l’élimination d’une personne qui souffre,
ou l’élimination d’un enfant à naître, comme légitime, dès l’instant
qu’ils occasionnent une gêne, ou qu’ils sont le signe d’un échec. Et on
appelle pudiquement ces actes « euthanasie » ou « IVG » pour tenter une
illusoire déculpabilisation.
Mais oui pourtant, la vie est bel
et bien un don. Malgré tous les vains efforts de l’homme pour
s’affranchir de Dieu, toute la connaissance, toute la science dont
l’homme est capable ne pourra jamais se substituer à l’œuvre créatrice
de Dieu. Et cette œuvre créatrice, nous croyons que Dieu l’exerce
encore au-delà de notre mort, dans l’éternité où tous nos liens noués
sur terre seront transfigurés par Lui ; dans l’éternité où seul l’amour
aura du sens ; dans l’éternité où nous vivrons, ensemble, de la vie de
Dieu. Car le Seigneur n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants.
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
St Hilaire de Clisson et Monnières
le 10 novembre 2013
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