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Comme la veuve dans l’Evangile, chacune, chacun d’entre nous connaît dans son existence, des instants de profonds découragements, des cris de révolte … la mort d’un enfant, d’un conjoint, la souffrance lors d’une maladie, d’un accident, la vieillesse, l’abandon de toute espérance face à l’inacceptable. A ces instants, nous pouvons douter de tout, de nous mêmes, des hommes et de Dieu. Nombreux sont nos contemporains, et nous en connaissons, qui en ont perdu la foi. A quoi servent tes prières ? Où est-il ton Dieu amour ? Faut-il avoir quitté cette vie pour enfin connaître la justice ? « Pourquoi m’oublies-tu ? » dit le Psaume 41. Et même le Christ, au moment de sa mort sur la croix, a crié à son Père « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » …
Jésus a conscience que la désespérance nous guette. « Le fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? ». Cette question est un abîme, une inquiétude, un appel que Dieu nous adresse. Lorsqu’une situation s’avère cruciale pour nous, Jésus nous livre une parabole. La parabole de la veuve et du juge. La veuve, c’est l’un des statuts les plus précaires dans la société antique. Le juge inique exerce un pouvoir qui n’a aucune considération pour ceux qui n’ont pas de pouvoir. Une telle tension entre le fort qui méprise, et le faible qui subit, est d’une actualité cuisante. La parabole nous dit que si l’homme mauvais, incarné ici par le juge, finit par agir bien pour ne plus entendre le cri de la veuve, a fortiori Dieu agira, et sans tarder, ajoute Jésus. Le Psaume 120 que nous avons prié, crie cette confiance indéfectible en Dieu.
Mais sans doute est-il nécessaire d’approfondir ce que nous dit Jésus dans cette parabole. En passant trop vite sur ce récit, il est possible que nous soyons un peu sur notre faim. Oui, Dieu agira, mais quand ? Et en attendant, comment vais-je m’en sortir ? Que puis-je faire ?
En fait, si nous sommes attentifs au sens profond de cette parabole, Jésus nous invite à prier avec persévérance, spontanéité, simplicité. Est-ce possible ? La réponse est oui, c’est possible et c’est à notre portée. Je voudrais ici esquisser quelques chemins possibles pour nous aider mutuellement.
C’est possible parce que dans la prière, nous recherchons avant tout la rencontre de quelqu’un, du moins son approche, dans un temps qui n’est pas totalement le nôtre. Cette rencontre n’entre pas dans une démarche dont attendons rendement et efficacité. La prière n’est pas cotée en bourse.
C’est possible parce que dans la prière, le Christ nous accompagne toujours. Comme sur le chemin d’Emmaüs, il écoute d’abord notre désespérance, non d’en haut, mais en marchant avec nous. Dans la prière, nous pouvons dire, crier même, ce qui nous blesse, ce qui nous révolte dans notre monde angoissé et fragmenté, mais aussi nos manques, nos faiblesses. « Venez à moi vous tous qui peinez », dit Jésus.
C’est possible si nous écoutons la Parole de Dieu. Dans la 2ème lecture, Paul invite son disciple Timothée à s’appuyer sur cette Parole. La Parole de Dieu est comme la bûche que l’on met dans la cheminée, elle alimente le feu de notre foi. Une fois leur désespoir livré à Jésus, les disciples d’Emmaüs retrouvent l’espérance, en écoutant comment Jésus restitue et explique l’Ecriture.
Ainsi, sur ce chemin de la prière, avec le Christ comme compagnon attentif, avec la Parole de Dieu qui nourrit notre foi, deux mouvements naitront spontanément de notre conversation avec Dieu.
Le premier est un mouvement intérieur, en nous-mêmes. Le second est un mouvement qui nous aidera à aller vers les autres, vers nos proches. L’un ou l’autre de ces mouvements pourra se manifester davantage, suivant les situations, suivant notre vécu.
Premier mouvement : la prière entraîne un déplacement intérieur, parfois peu perceptible. Nous discernons davantage ce qui nous arrive, nous voyons plus clair, nous prenons du recul, nous retrouvons quelques points d’appui pour nous relever. Ce n’est pas toujours immédiat : le temps de Dieu n’est pas le nôtre. Dans ce mouvement intérieur, nos proches, nos contemporains ont une place. Dans notre prière, nous pouvons par exemple citer leur nom, car Dieu les appelle chacun par leur nom. Nous pouvons simplement nous remémorer leur visage, exprimer un souhait à leur égard. Et c’est efficace, car nous préparons ainsi, plutôt nous anticipons, ce qu’est la communion des saints : un réseau permanent de relations, d’échanges, dans l’amour et la fraternité, entre tous, vivants et morts. Des réseaux sociaux comme FaceBook sont très loin d’atteindre ce degré de perfection dans les relations ! Dans cette forme de prière, nous anticipons ce que sera notre vie divine. Quelle belle préparation !
Second mouvement : la prière nous ouvre à un agir dans le monde, dans notre environnement quotidien. C’est dans ce mouvement que la prière nous ajuste à Dieu qui nous confie d’agir en son nom. Non pas pour attendre que nos désirs soient exaucés sans nous. Dieu nous appelle à être la bouche de Jésus, les mains de Jésus. Notre agir construit dans la prière soutient l’action de Dieu dans le monde. Quelle responsabilité, quelle confiance !
La persévérance est alors nécessaire, comme nous le montre aussi la première lecture. Ce que nous retenons de ce récit, ce n’est pas le côté merveilleux, mais la persévérance de Moïse à tenir les bras levés pour que son peuple continue à vivre. Si Moïse baisse les bras, c’est fichu. Or, vous avez remarqué, les deux compagnons l’aident à tenir les bras levés. Faisons nôtre, cette attitude : si nous baissons les bras, appuyons nous sur notre prière communautaire. Nous faisons alors Eglise et nous recevons force et courage pour continuer. C’est le sens de la prière universelle que nous allons porter ensemble dans quelques instants. C’est le sens de la mission universelle de l’Eglise, que nous marquons en ce jour.
Dans quelques instants, le Christ Jésus se rendra présent ici, sur cet autel. Il vient parce que nous le demandons dans la prière eucharistique prononcée par le prêtre au nom de notre communauté. Il vient parce qu’il trouve la foi. Le Christ vient à nous, afin de nous aider à construire un peu chaque jour notre vie et notre agir pour un quotidien plus juste, plus humain, et plus priant.


Christophe DONNET, diacre permanent
 le 20 octobre 2013


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