Année C
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Sg 9, 13-18 ; PS 89 ; Phi (1, 9b-10.12-17) ; Lc (14, 25-33)
23 TO - C
Quel beau livre que celui de la Sagesse ! Sans doute trop méconnu, ce
livre est une mine de pensées, sur Dieu, sur l’homme, sur les rapports
des humains entre eux et entre l’homme et Dieu. Un vrai manuel de
philosophie, d’anthropologie, de théologie, illustré par de belles
images poétiques et symboliques. Je vous encourage vraiment à découvrir
ce livre biblique, dans l’ancien testament et qui, bien qu’il date de
plus 2000 ans, recèle des passages que l’on pourrait croire écrits la
semaine dernière. Plus qu’un traité de morale, c’est un véritable
recueil de sujets de méditation pour notre temps.
Le passage que nous lisons dans la liturgie d’aujourd’hui nous invite à
l’humilité en nous rappelant notre finitude, nos limites, notre
petitesse par rapport à la grandeur et la bonté de Dieu : « Quel homme
peut découvrir les intentions de Dieu ? […] et qui aurait connu ta
volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton
Esprit Saint ? » Comme un rappel que l’homme n’est qu’une humble
créature de Dieu, mais aussi que Dieu aime tant cette créature qu’il
lui donne sa Sagesse. Par le don de la Sagesse, Dieu se révèle à
l’homme pour que l’homme le connaisse, pour qu’il soit attiré à lui,
qu’il désire Dieu plus que tout au monde. Plus encore que « son père,
sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même sa propre
vie », comme Jésus nous le rappelle dans l’évangile.
La sagesse que Dieu nous envoie par amour, c’est-à-dire la
connaissance, la capacité à reconnaître Dieu, c’est ce qui fait de
l’être humain une créature à part. Ce qui nous différencie du règne
minéral, du règne végétal mais aussi de l’animal. Le rappel de ce don
exclusif de la Sagesse devrait nous éviter de nous laisser emporter par
certains courants qui voudraient rabaisser l’homme au rang de l’animal
(l’homme ne serait qu’un animal comme les autres), au risque
d’entraîner une confusion et finalement de tout relativiser, en fixant
un même prix à la vie d’un être humain et à celle d’un animal. Mais
c’est à l’humain, et à lui seul, que Dieu donne sa Sagesse, sa
Connaissance. C’est ce qui fait la dignité de l’homme et le place
au-dessus de toutes les autres créatures.
Pour autant, cette place « au-dessus » ne doit pas donner à l’homme la
suffisance. La sagesse nous apprend aussi que nous sommes dans la main
de Dieu. C’est ce que nous rappelle le psaume de ce jour, le psaume 89,
s’adressant à Dieu : « Tu fais retourner l’homme à la poussière [… ] ;
à tes yeux, mille ans sont comme hier, c’est un jour qui s’en va, une
heure dans la nuit. » Oui, quelle distance entre l’homme et Dieu !
Ainsi, nous sommes tiraillés par deux excès, deux grandes
tentations radicalement opposées : D’un côté, celle de considérer
l’espèce humaine comme insignifiante, au même rang que toutes les
autres créatures : c’est l’antispécisme. De l’autre, la tentation
de placer l’homme si haut qu’il serait même supérieur à Dieu, l’homme
tout puissant capable de re-créer, par la puissance de ses techniques,
une nouvelle humanité « améliorée » : c’est le transhumanisme. Ces deux
visions de l’homme, incompatibles entre elles, ont en commun de mettre
Dieu hors-jeu, de le rejeter comme impuissant, malveillant, gênant ou
inutile. Tout le contraire du message de sagesse qui nous révèle un
Dieu tout-puissant et aimant, un soutien bienveillant.
Entre ces deux extrêmes, le psalmiste nous propose un équilibre : «
apprends-nous la vraie mesure de nos jours, que nos cœurs pénètrent la
Sagesse ». La vraie mesure de nos jours… nous situer en vérité, à notre
juste place : chacun vis-à-vis des autres, l’humain vis-à-vis de la
Création, et la Création vis-à-vis de Dieu. Voilà la Sagesse.
C’est dans cet esprit de sagesse qui règle avec justesse les rapports
humains que Saint Paul écrit à Philémon, pour lui demander d’accueillir
Onésime non plus comme un esclave, mais comme un frère bien-aimé. Sa
condition d’esclave ne fait pas d’Onésime un être inférieur, mais, en
tant qu’être humain, il est un frère et mérite d’être aimé comme tel. «
Aussi bien humainement que dans le Seigneur » précise St Paul.
C’est encore à cet esprit de Sagesse que Jésus nous invite, dans le
passage de l’évangile que nous venons d’entendre. « Si quelqu’un vient
à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses
frères et sœurs, et même sa propre vie, il ne peut pas être mon
disciple ». Comprenons bien qu’il ne nous demande pas de mépriser nos
proches, notre famille, ni de nous mépriser nous-mêmes, mais, encore
une fois, de situer chacun à sa juste place.
Ainsi, suivre Jésus, c’est accepter cette juste distance entre Dieu et
l’homme. La sagesse consiste à respecter cette distance, pour laisser à
Dieu la première place, en toutes circonstances. « La créature n’est
pas au-dessus de son Créateur ».
Oui, suivre Jésus, c’est exigeant ! « Celui d’entre vous qui ne renonce
pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. » Pour
être ou devenir disciple de Jésus, le don de la Sagesse est précieux,
et nécessaire. Sans la Sagesse qui nous permet le juste discernement,
nous courons à notre perte, comme ce roi qui partirait en guerre sans
d’abord prendre le temps de s’assurer qu’il peut vaincre son
adversaire.
En ces jours de rentrée, il est de coutume de prendre de bonnes
résolutions pour l’année qui commence. Une première résolution pourrait
être de lire les dix-neuf chapitres du Livre de la Sagesse, et de
méditer certains passages qui nous parlent davantage. Une deuxième
résolution serait de décider que désormais, avant de faire un choix,
avant de répondre à une sollicitation, de prendre un engagement, comme
cet homme dans l’évangile qui veut construire une tour, commencer par
s’asseoir pour calculer la dépense. « Commencer par s’asseoir pour
calculer la dépense » c’est-à-dire prendre d’abord le temps de se
laisser imprégner par l’Esprit de Sagesse, l’Esprit Saint que Dieu
donne toujours à ceux qui le lui demandent. Ainsi nos décisions seront
sages et justes aux yeux de Dieu.
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
8 septembre 2019
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