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21° dimanche du Temps Ordinaire

Frères & sœurs,

J’aime beaucoup les textes que nous offre la liturgie pour ce dimanche et en particulier la seconde lecture et l’évangile.

Cet extrait de la lettre aux Hébreux, nous donne tout d’abord de mesurer à quel point Dieu est miséricordieux à notre égard…, au cas où nous aurions encore des doutes : « Dieu se comporte envers vous comme envers des fils ; et quel est le fils auquel son père ne donne pas des leçons ? Quand on vient de recevoir une leçon, on n’éprouve pas de la joie mais plutôt de la tristesse. Mais plus tard, quand on s’est repris grâce à la leçon, celle-ci produit un fruit de paix et de justice. »  Comme parent ou comme enfant, nous avons tous vécu cette expérience.

Ensuite, comme pour tester notre capacité à surmonter nos doutes et éprouver la profondeur de notre Foi, ce passage de l’évangile selon Luc nous invite à réfléchir à la question qu’un interlocuteur anonyme pose à Jésus : « n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? »

Oui ou non ?

Cette question du salut est-elle pour nous aujourd’hui, toujours d’actualité ?        Oui et non.

A voir le succès de certaines sectes, qui ont comme principal argument qu’il n’y aura qu’un petit nombre de sauvés (par exemple les Témoins de Jéhovah, pour qui il n’y aura que cent quarante quatre mille élus) ; à voir la réponse de nombreuses personnes à l’appel à une conversion écologique, à un changement de vie pour préserver notre maison commune, on peut se dire qu’il y a bien au cœur des hommes un souci de leur propre salut. Au fond, chacun de nous s’est certainement posé un jour, pour lui-même, cette question : est-ce que je serai sauvé ? Est-ce que j’irai au ciel ? Oui ou non ? Est-ce qu’à la fin, à ma mort, je serai accueilli ? C’est d’ailleurs peut-être, pour une part d’entre nous, ce qui motive certaines de nos attitudes religieuses.

A l’inverse, il y a aussi des personnes totalement fermées à l’idée même de salut. Etre sauvés, de quoi ? Et d’abord, on dit que Dieu est bon ! Ce qui sous-entend que, puisqu’il est bon, il laisse tout faire et par conséquent, je peux faire n’importe quoi. On n’a plus tellement le souci du salut éternel, on a beaucoup plus le souci du quotidien, de la vie terrestre.

La porte étroite

Donc, nos idées à ce sujet sont assez floues. Or, en ne répondant pas directement à son interlocuteur anonyme, Jésus va nous renvoyer à nous-mêmes et nous obliger à préciser notre question. Que nous dit-il ?
« Efforce-toi d’entrer par la porte étroite, car il y en a beaucoup qui essaient d’entrer et qui n’y parviennent pas ». Qu’est-ce que cela signifie ?

Cela veut dire, d’abord, que le Dieu de Jésus-Christ n’est plus exactement le Dieu auquel croyaient les hébreux dans l’Ancien Testament et parfois encore des chrétiens aujourd’hui... Autrefois, on croyait en un Dieu qui punit, un Dieu vengeur, dont il fallait avoir peur. On croyait aussi en un Dieu qui opérait une sélection entre les bons et les mauvais. Nous avons tous, plus ou moins bien, rejeté ces fausses images de Dieu. Mais par quoi les a-t-on remplacées ? Par l’image d’un Dieu qui est tellement bon qu’il ne peut pas punir. Eh bien, en réponse à cela, Jésus nous dit : « Attention ! Le Dieu que je vous annonce, mon Père, est un Dieu exigeant. Il demande beaucoup à chacun de vous. Efforcez-vous d’entrer. Il y a un choix à faire, et il y en a beaucoup qui essaient d’entrer et qui ne le peuvent pas ».

La bonne clé

Mais alors, qu’en est-il de cette histoire de salut ? Le salut, il est pour tout le monde. Tout le monde est sauvé. F&S nous le savons bien : lorsque Jésus est mort sur la croix, Il est mort pour le salut du monde ; Il a offert sa vie pour le salut de tous les hommes, croyants et incroyants. Alors, que veut-Il nous dire dans l’évangile d’aujourd’hui ? Simplement une chose : que ce salut qui nous est offert, mais la possibilité d’une vie éternelle et d’un bonheur éternel, nous pouvons l’accepter ou le refuser. Nous avons le choix d’« entrer » ou de rester dehors. Et pour entrer, il faut avoir la bonne clé, car il y en a de fausses. Et Jésus nous dit : « Vous risquez de prendre les fausses clés et ne pas pouvoir entrer par la porte étroite ».

Fausses clés d’hier ? Pour l’interlocuteur de Jésus, un homme de culture juive, la bonne clé consistait à mettre sa confiance dans son appartenance à une race, la race choisie, la descendance d’Abraham. C’était se dire : je suis membre du peuple élu, donc, je suis sauvé ; sous-entendu : tous les autres, à part ceux de notre race, sont exclus du salut.

Fausses clés d’aujourd’hui ? Pour chacun de nous, ce serait, par exemple, de nous dire : nous sommes de bons catholiques, pratiquants (nous allons à la messe, nous communions, nous participons aux célébrations pénitentielles...). Alors, Jésus nous dit : Attention, tout cela, c’est peut-être une fausse clé, car si vous vous en servez comme d’un droit, d’un privilège, ça ne vous sert à rien ! Fausse clé de dire : je vais communier tous les dimanches, si le reste du temps tu ne partages rien. Fausse clé de dire : je vais à la célébration pénitentielle pour recevoir le pardon de Dieu, si dans ta vie tu ne pardonnes pas. Fausse clé de dire : j’appartiens à l’Eglise Catholique, si tu ne cherches pas à construire cette Eglise, Corps du Christ, là où tu vis, dans ta paroisse, ta famille, ton travail…. Fausse clé, si tout cela, tu le considères comme un privilège, si tu crois que ça te donne des droits, si tu te crées un monopole, pour toi et pour ceux qui te ressemblent.

Il n’y a qu’une bonne clé, dit Jésus, c’est la Foi. Et la Foi, c’est quelque chose de très précis : c’est marcher avec Jésus sur le même chemin que lui, c’est-à-dire le chemin de la Pâque, c’est-à-dire le chemin de l’amour qui donne sa vie. Il n’y a que cette clé là qui peut te permettre d’entrer par la porte étroite. Ne te trompe pas de clé.

Une porte large

Et voilà que tout-à-coup, la vision du Christ s’élargit et la porte étroite devient une porte extrêmement large, puisque dans le Royaume dont il parle, on entre comme dans un moulin : on y vient de l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Midi. Tout le monde y entre, ou du moins, tout le monde peut y entrer. Une seule restriction : ne pas utiliser de fausses clés. Nous n’entrerons pas si nous nous croyons riches des privilèges que nous donnerait notre appartenance à une religion. Nous n’entrerons que si nous sommes riches d’amour, d’amour tout simple, dans le quotidien de notre vie. Rappelons-nous Matthieu 25 : Jésus ne nous demandera pas quelle est notre appartenance religieuse, il nous dira simplement : « J’avais faim et vous m’avez donné à manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire, j’étais nu et vous m’avez habillé, j’étais malade et vous êtes venu me visiter... » Et si nous disons : « Mais, Seigneur, nous ne t’avons pas reconnu ! », Jésus nous répondra : « Ca ne fait rien. Cela n’a pas d’importance ». Car ceux-là, qui ont aimé concrètement leurs frères humains, entreront, qu’ils soient catholiques, protestants, orthodoxes, musulmans, juifs, bouddhistes ou athées, ils entreront. Noirs, jaunes et blancs, la main dans la main, ils entreront… d’autant plus facilement que nous leur montrerons le chemin !

Donc, oui F&S, nous apprécions à quel point s’exerce la miséricorde de Dieu envers nous, dans la leçon qu’il nous donne aujourd’hui par la voix de Jésus, le Verbe fait chair, sa Parole incarnée.

Et pour conclure, j’attirerai encore notre attention sur un détail d’importance : lorsque l’on parle du salut, on a souvent tendance à penser à notre vie après la mort… et pourtant dans l’évangile, la question de l’interlocuteur anonyme à Jésus est bien formulée au présent et non au futur : « n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ?  Car le Royaume de Dieu, c’est bien dès ici et dès maintenant, et la leçon pour aujourd’hui afin que « les fruits de paix et de justice » se substituent « aux pleurs et aux grincements de dents »…

Amen.

 

Patrick JAVANAUD, diacre permanent

Paroisse ST Matthieu/Loire

Le 21 août 2022

 

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