« Vanité des
vanités, tout est
vanité » nous dit l’auteur du livre de Qohèleth, d’autres
traductions plus
littérales disent : « Buées des buées » ce qui souligne
l’évanescence et l’éphémère des comportements humains, lorsque ceux-ci
sont
centrés sur soi et ne visent qu’à « posséder » et accaparer.
Dans les
Pyrénées, d’où je reviens, j’ai pu admirer des paysages magnifiques,
mais
quelle débauche de selfies, photos de « moi » devant ces églises,
ces lacs
et ces montagnes que l’on devine derrière ces visages qui prennent toute
la
place ! comme si j’étais le centre du monde ! Vanité des
vanités…
dans cette société de l’image et de l’éphémère qui promet tout, et où il
faut
se montrer le plus beau, le plus fort… Les
textes
de ce jour fustigent ceux qui amassent, centrés sur eux-mêmes et sur
leurs richesses. Ils nous amènent à réfléchir sur ce qui fait la
richesse de
nos jours. Ils nous invitent à construire l’homme nouveau, conforme à
son
créateur.
La
parabole que nous venons de lire,
raconte l’histoire d’un homme qui réussit bien en affaires. Il met à
l’abri son
blé et tout ce qu’il possède, il se croit tranquille. Alors, il se dit à
lui-même : « Te voilà donc avec de nombreux biens… pour de
nombreuses
années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. » Mais cet homme
a oublié
une chose : que la vie ne dépend pas de lui. Et il meurt
subitement.
Qohèleth,
lui, donne, dans le texte
du jour, un tableau sombre de notre vie d’homme : peine, travail,
souffrance. Mais au-delà de ce pessimisme ambiant, il y a des lueurs
d’espérance pour qui met sa confiance en Dieu et vit selon sa
Sagesse : Poursuivons
la lecture du texte que nous venons d’entendre : « Dieu donne à qui
lui
plaît sagesse et savoir et joie. » Et au chapitre 3, après une
réflexion
sur le temps qui passe : un temps pour enfanter et un temps pour mourir,
un
temps pour planter et un temps pour arracher »… il termine :
« quand on mange et boit, et se donne du bon temps dans son labeur,
c’est
un don de Dieu. »
Le
livre de Qohèleth, la parabole, le
psaume nous incitent à vivre selon la sagesse de Dieu :
« apprends-nous
la vraie mesure de nos jours » ; c’est dire être lucide sur
notre
condition d’homme fragile qui reçoit sa vie de Dieu. Oui, notre vie
d’homme et
de femme est un cadeau à goûter avec humilité. La vraie sagesse c’est de
nous
tenir à notre place devant Dieu et de nous appuyer sur Lui ; C’est
alors
que l’homme peut être heureux et goûter les plaisirs simples de la vie.
Saint
Paul nous dit aussi qu’il y a
deux manières de vivre : « Pensez aux réalités d’en haut, non
à
celles de la terre. » Si je ne me réfère qu’aux réalités
terrestres, à
l’esprit du monde, le risque est grand de rechercher la richesse, la
sécurité,
les plaisirs immédiats, et tout ce qu’énumère Saint Paul :
débauche,
désirs mauvais, soif de posséder…etc. Au contraire, il nous invite à
penser aux
réalités d’en haut, c’est-à-dire, regarder le Christ pour qu’il éclaire
nos
vies de la lumière de sa résurrection, avec des comportements inspirés
par
l’Esprit Saint. Autrement dit, regarder notre vie et la vie des hommes
en
s’inspirant du regard de Jésus. Et cette manière de vivre, en chrétien,
selon
notre baptême, c’est la bienveillance, la bonté, la miséricorde, la
vérité, la
patience, la douceur, bref, la mise en œuvre les béatitudes.
Se
revêtir de l’homme nouveau, se renouveler,
c’est un défi personnel, et c’est aussi un défi collectif. Notre mode de
vie en
société est marqué par un productivisme et un consumérisme sans frein
qui
interroge notre conscience de chrétiens. Car aujourd’hui, je cite
Laudato si :
« l’harmonie entre le créateur, l’humanité et l’ensemble de la
création a
été détruit par le fait d’avoir voulu prendre la place de Dieu, en
refusant de
nous reconnaître comme des créatures limitées. » N° 66. Le Pape
ainsi
invite l’homme - et particulièrement ceux qui ont le pouvoir économique
et
politique - à l’humilité, à travailler au bien commun, à respecter la
nature, à
renforcer les liens sociaux, à être au service de l’humanité. Ce message
s’adresse aussi à chacun d’entre nous quelle que soit notre situation,
je cite :
« Le moment est venu de prêter de nouveau attention à la réalité
avec les
limites qu’elle impose, et qui offrent à leur tour la possibilité d’un
développement humain et social plus sain et plus fécond. » N°116.
Construire l’homme nouveau, une humanité renouvelée est un défi pour les
hommes, et en particulier pour l’Eglise et les chrétiens ; car si
les
forces qui ont comme moteur la richesse, le pouvoir, les armes,
l’emportent,
l’avenir du monde est compromis. L’Eglise doit faire surgir l’homme
nouveau, et
cette humanité nouvelle, prémices du royaume de Dieu, et ainsi «
protéger
l’homme de sa propre destruction. » (Caritas in véritate N° 21).
Par
exemple, la canicule, la sècheresse, les incendies de forêt que nous
subissons cet
été nous obligent à réfléchir et à reconsidérer nos modes de vie
personnels et
collectifs pour faire face au réchauffement climatique.
Concrètement,
pendant ces vacances, retrouvons notre place au sein de la création,
reconnaissons nos limites, et remercions Dieu pour ce temps qu’il nous
est
donné de vivre. Même si nous ne quittons pas Orvault ou Sautron, goûtons
le
changement de rythme, le repos bienfaisant, les rencontres familiales ou
amicales, la joie de se retrouver entre générations et de resserrer les
liens.
Goûtons le plaisir des sens, le soleil, la nature, la musique… Ouvrons
nos
yeux, nos oreilles et notre cœur pour percevoir ce qui nous est donné,
pour les
beaux fruits de la nature et du travail des hommes, pour nous en réjouir
et
rendre grâce à Dieu.
Chaque matin
il est bon de confier au Seigneur la journée qui vient, avec ses joies
et les
difficultés à affronter. Alors, avec le psalmiste, nous pouvons
dire :
"Rassasie-nous
de ton amour au matin,
Que
nous passions nos jours dans la joie et les chants,
Que vienne sur nous
la
douceur du Seigneur notre Dieu,
Consolide pour nous
l’ouvrage de nos mains."
Ainsi nos journées ne
seront pas vaines !