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17° dimanche du Temps Ordinaire


Gn 18, 20-32 ; Ps 137 ; Col 2, 12-14 ; Lc 11, 1-13

Je me souviens comme si c’était hier de la naissance de notre 1er enfant, une fille, née un soir de novembre 2000 et qui nous a fait, mon épouse Katia et moi, passer en quelques instants de l’état de jeunes gens, à celui de parent. Je ne peux oublier cette immense vague d’émotion qui m’a alors submergé, de cette énergie folle qui m’a empli, de cette conviction que, à partir de ce moment, ma vie toute entière prenait un nouveau sens, une signification merveilleuse. Lorsqu’on devient parent, on ressent, de manière incroyable, un sentiment jusque-là inconnu, celui d’une forme de dépassement de soi, la certitude que sa vie est désormais suspendue à celle que l’on vient de mettre au monde. En tant que Père, je réalise alors que j’ai tout à découvrir. Qu’il me faudra apprendre la générosité, l’abnégation, la disponibilité, la sévérité, aussi, mais, au-delà de tout, la compréhension et le pardon. Et je dois dire, 22 ans et 3 enfants plus tard, que tout cela reste encore à apprendre chaque jour.

Être père, c’est une chance merveilleuse, mais c’est aussi beaucoup de responsabilités et, bien souvent, quelques difficultés. Mais on réalise, à chaque fois que votre enfant tourne son regard vers vous, à quel point nous tenons en nos mains les clés d’un destin. A quel point cette vie qui vient de nous, cette petite personne que nous avons mis au monde, attend de celle et de celui qui l’ont fait naître l’Amour, l’attention, l’écoute et la mansuétude qui lui permettront de grandir et de construire sa vie.

En lisant les textes de ce jour, on réalise à quel point que ce qui nous unit à Dieu, notre créateur, est empreint de ce lien, indéfectible, qui unit l’enfant à son père.

Jésus, lorsqu’il propose à ses disciples, les termes qui leur permettront de s’adresser à Dieu, emploie, comme premier mot, celui qui vient avant tous les autres, celui de « Père ». Il nous donne la clé qui nous permet de comprendre la base, et peut être l’essentiel, de la nature de la relation entre chacun de nous et notre créateur.

Chacun de ces 3 textes nous permet de bien comprendre qui est Dieu pour nous, les êtres humains, et ce que nous savons pouvoir attendre de lui. La 1ère lecture, du livre de la genèse, évoque la bonté du père, sa mansuétude. Un père qui a sans doute de bonnes et solides raisons de se mettre en colère, de sévir, mais qui sait se laisser attendrir par les arguments qu’on lui apporte pour privilégier le pardon à la condamnation, le salut à la sentence. Je le trouve très beau ce passage où l’on entend Abraham, à la fois avec délicatesse, habilité et opiniâtreté, inviter le Seigneur à, peu à peu, infléchir sa résolution et, finalement quasiment renoncer au châtiment. Personnellement, mon cœur de père vibre à cette évocation, me souvenant du nombre de fois où, sous le coup de la colère, je m’apprêtais à sévir, et où, peu à peu, on réfléchit, on laisse refluer l’emportement, et où, finalement, on entre dans une démarche de compréhension, et de pardon. Voilà une image forte de notre Dieu. Il n’est pas un Dieu de colère, de punition, de sévérité brutale. Il n’est pas un Dieu avec un cœur de pierre, mais un créateur au cœur de Père. Tel le Papa qui accueille le fils perdu dans la parabole du fils prodigue, il nous aime tant, qu’il veut par-dessus tout, pouvoir nous pardonner.

La 2ème lecture, lettre de St Paul aux Colossiens, nous montre un père qui, non seulement est prêt à nous pardonner toutes nos fautes, à effacer le billet de la dette qui nous accable, mais, plus encore, est prêt nous donner ce qu’il a de plus précieux, son fils, pour nous sauver. L’exemple que nous donne Dieu, en laissant le Christ offrir sa vie en sacrifice pour nous, ses enfants, est absolument radical. Il nous montre la force inouïe de son Amour, en nous rappelant, sans cesse, que notre créateur veut nous sauver, on pourrait presque dire malgré nous ! Là encore, en tant que parent, nous comprenons, car je crois que nous le ressentons, cet élan qui peut nous pousser à donner notre propre vie pour épargner à nos enfants la douleur, la souffrance, la mort. Mais notre Dieu fait ici le sacrifice ultime. Il offre la vie de son fils, pour sauver celle de toute l’humanité menacée de mort par le péché. Notre père nous aime tant qu’il veut, par-dessus tout, nous sauver du péché, nous épargner la mort éternelle.

Et puis le texte d’Evangile, de Saint Luc, vient nous montrer un père à qui l’on peut oser tout demander et qui est d’une bonté infinie pour celles et ceux qui savent, vraiment, s’adresser à lui. Mais en lisant attentivement le texte, on se rend bien compte qu’il ne s’agit pas, pour notre père, de nous faire croire qu’il est un super magicien qui peut faire apparaître et nos offrir le moindre jouet qui pourrait répondre à nos exigences et à nos caprices. Il n’est pas le genre de père qui, pour se donner une bonne conscience en paternité, gâte ses enfants en leur achetant et leur offrant tout et n’importe quoi, les habituant ainsi, peu à peu, à tout obtenir même sans effort ni volonté. Non, dans ce texte il est question d’un père qui ne donne que si on sait faire la démarche d’aller vers lui, d’entrer en dialogue, de demander, non pas du bout des lèvres, mais avec toute la force de notre cœur. L’Amour du Père se nourrit de l’Amour partagé, de l’attention que nous prenons à ne pas négliger notre relation avec lui. Les 1ers mots de ce passage d’Evangile sont « Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière ». En prière, c’est-à-dire en dialogue avec son père ; dans une démarche où l’on accepte de laisser pendant un moment le flux de nos activités quotidiennes, pour entrer dans un espace d’échange avec Dieu. Et cette prière, que nous redirons dans quelques instants, la prière du « Notre père », commence, non pas par des demandes pour nous-mêmes, mais par une expression de reconnaissance pour notre créateur : « Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne ». Nous pouvons tout demander, à notre père. Mais il nous faut aussi ne pas oublier ce que nous pouvons nous même lui donner : notre Amour, notre confiance, notre reconnaissance.

Notre père nous aime tant, qu’il veut, par-dessus tout, dialoguer avec nous, nous entendre lui parler et, dans cet échange cœur à cœur, nous donner ce qu’il y a de meilleur pour chacune et chacun de nous.

Nous n’avons pas tous la chance d’avoir encore notre père terrestre auprès de nous. Certain, ne l’ont jamais connu, d’autres en gardent un souvenir compliqué, parfois, les difficultés de la vie nous ont séparé. Mais nous avons tous l’immense chance d’avoir un Père créateur du Ciel et de la Terre qui, au-delà de tout, nous aime si fort qu’il peut tout nous pardonner, nous offrir ce qu’il a de plus cher, et être disponible à nos prières. Que cette chance, ô combien précieuse, nous donne la paix que l’on ressent lorsqu’on se sait aimé. Et que cela nous invite à faire de même pour celles et ceux qui nous entourent, celles et ceux que nous sommes invités à aimer, comme notre Père nous a aimé.

Olivier RABILLOUD,

St Vincent de Paul

24 Juillet 2022




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