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16° dimanche du Temps Ordinaire


Gn 18, 1-10a ; Ps 14 ; Col 1, 24-28 ; Lc 10, 38-42

 
         Le récit de la visite de Jésus chez Marthe et Marie me laisse perplexe à chaque fois : « Marie a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée. »
Est-ce dans la bouche de Jésus un éloge de la paresse ?
        « Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée. »
On voit souvent dans ce texte l’opposition entre les contemplatifs et les actifs. Et Jésus nous encouragerait à ne rien faire ?
        Je voudrais répondre rapidement à cette comparaison en citant St Paul dans la 2ème lettre aux Thessaloniciens : « si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus. » (2 The 3, 10-12)
        C’est clair, la paresse reste un des sept péchés capitaux !
        Revenons à Marthe et Marie.
        N’y a-t-il pas en chacun de nous un peu de Marie, contemplative et silencieuse et un peu de Marthe, qui s’active, parle fort et en un mot brasse un peu d’air ?
Cette tension entre action et contemplation est permanente : l’un approfondira prière et adoration tandis que l’autre sera dans l’action et le service.
Mais c’est justement l’écueil que Diaconia, dont nous avons souvent parlé, veut signaler. L’un ne va pas sans l’autre.
        Autre exemple : le pape Benoit XIV nous a proposé de vivre une année d’approfondissement de notre Foi, et son successeur le pape François ne dit pas autre chose mais invite inlassablement à regarder au delà des portes de l’Eglise vers ceux qui souffrent. Ce n’est pas une opposition, c’est une continuité logique. Le pape François nous dit même clairement que sans la Foi (c’est à dire l’écoute de la Parole, et l’intériorisation du message de Jésus) notre Eglise ne serait qu’une ONG de plus. Le service, c’est bien mais en réalité c’est parce que nous sommes chrétiens que nous voulons aimer chacun de nos frères en Christ et évidemment que nous sommes attentifs aux plus fragiles aux plus petits. Comme dans une famille.
Mais en caricaturant un peu Marthe et Marie l’évangéliste nous invite aussi à regarder l’intérieur de notre cœur. L’évangéliste ne veut pas nous faire une leçon de morale familiale mais plutôt nous recentrer sur l’essentiel.
        Souvenez-vous que chaque juif redisait chaque matin et chaque soir (et c’est vrai encore aujourd’hui) : « Shémâ Israël », « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l'Unique.  » ( Deut 6 4-7) Le fidèle doit d’abord être quelqu’un qui écoute.
        En l’occurrence Marie écoute Jésus qui parle. Saint Luc nous invite à écouter Jésus pour pouvoir agir ensuite fortifié par cette Parole. Marthe agit vite en bonne maitresse de maison mais peut-être un peu trop vite au risque de passer à coté de quelque chose d’important.
        La vie trépidante de notre société est un peu comme Marthe : nous agissons souvent très vite : je reçois un e-mail ou un texto : je réponds tout de suite parfois un peu trop vite. Un fait divers fait la une des journaux, le gouvernement propose une loi dès le lendemain : c’est un peu rapide : quand prend-on le temps de s’asseoir et d’écouter ?
Lors du colloque sur les fragilités au mois de Février à Nantes, Emmanuel Faber – Directeur général délégué du Groupe Danone – expliquait que parfois une bonne intention (comme construire un puits pour un village qui va s’approvisionner en eau à 20 km de là), pouvait s’avérer une mauvaise idée car le temps passé permettait aux femmes qui faisaient ce chemin d’échanger, de communiquer et que depuis que le puits est dans le village chacun reste chez soi et que le village a perdu son âme).
        Regardez le texte de la Genèse : Abraham n’écoute pas son visiteur car son propos semble fou (avoir un enfant, lui qui est très âgé !!). Son invité lui redit avec douceur : « Je reviendrai chez toi dans un an, et à ce moment-là, Sara, ta femme, aura un fils. » (Gn 18 10)
        Dieu qui parle à notre cœur le fait avec douceur et attends que nous comprenions et acceptions sa Parole : il est prêt à attendre la durée de toute une vie. Pour Abraham entre les deux rencontres et la venue d’Isaac il s’est passé 25 ans !
        Mais il y a une autre raison à mettre en avant l’écoute, la contemplation, la rumination de la Parole comme disent certains auteurs : c’est pour former notre cœur, l’éduquer à l’amour vrai. Quelquefois l’élan de notre cœur, de nos émotions nous poussent à accepter certains faits comme bons. Et après réflexion, sur le plus long terme les résultats sont négatifs.
C’est souvent évident dans le domaine économique où une décision qui rapporte aujourd’hui beaucoup, coutera demain beaucoup plus en destruction de l’environnement ou en méfait sur la santé (vous entendez cela chaque jour à la télévision).
        Mais dans d’autres domaines c’est aussi vrai, mais nous n’avons pas toujours éduqué notre cœur pour discerner ce qui semble un bienfait immédiat et qui pourra engendrer une souffrance pour demain. Et sans rentrer dans les détails nous pouvons réfléchir aux lois sociétales qui fleurissent chaque matin dans les têtes de nos dirigeants.
Pourquoi avoir autorisé cette semaine les recherches sur les embryons alors que le dernier pris Nobel de médecine a montré que d’autres moyens plus respectueux étaient tout aussi efficaces. Les arguments donnés sont à courte vue.
        Certains se lèvent pour partager les fruits de la réflexion : ces fruits sont  l'amour, La joie, La paix, La patience, La bienveillance, La bonté, La douceur, La maîtrise de soi, mais écoutez St Paul : « Ce Christ, nous l’annonçons : nous avertissons tout homme, nous instruisons tout homme avec sagesse afin d’amener tout homme à sa perfection dans le Christ. »
Même si cela peut se terminer brutalement comme dans la chanson de Guy Béart « Le premier qui dit la vérité, Il doit être exécuté ».
Dans le psaume 42 on peut lire : « de l'homme qui ruse et trahit, libère-moi. »( Ps 42 1)
        Mais cet ennemi n’est pas toujours dans l’autre ; il peut être tapi en moi prêt à me mentir. N’accablons pas Marthe, ne jalousons pas Marie : elles sont peut être toutes les deux en moi.
        Seigneur apprends moi à écouter avant d’agir, apprends moi à chercher le chemin de l’amour avant de décider, apprends moi à regarder l’intérieur de mon cœur avant de juger. Amen

Philippe ARRIVÉ, diacre permanent
La Haye Fouassiere et Vertou                  
20-21 Juillet

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