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Dimanche de la Sainte Famille


(Baptême d'un petit enfant pendant la messe)

        Nous voici aujourd'hui rassemblés dans cette église, pour ce dimanche un peu particulier, situé entre les festivités de Noël et celles du nouvel an. Deux moments importants dans la vie des familles, qui se réunissent à l'une ou l'autre de ces occasions. Et au milieu donc, ce dimanche que l’Église a choisi justement pour célébrer les familles, à travers la Sainte Famille, celle de Nazareth, celle de Joseph, Marie et leur enfant Jésus. C’est aussi ce jour que vous avez choisi, Jean-Etienne et Hélène, pour le baptême de Rose. Et pour cette fête du Seigneur, les textes qui nous sont proposés par la liturgie sont pour le moins étonnants, voire énigmatiques, mystérieux…

        L'Evangile d'aujourd'hui nous montre la Sainte Famille, dans un épisode bien connu, celui de la présentation de Jésus au temple. La démarche que font Joseph et Marie est la même que celle que font aujourd’hui Jean-Etienne et Hélène, qui viennent présenter leur fille Rose à l’Eglise.
L’Eglise nous propose donc de contempler la Sainte Famille aujourd’hui, mais, curieusement, dans un épisode où les principaux personnages ne sont ni Jésus, ni Joseph, ni Marie.
        Le premier rôle dans cette scène est tenu par cet homme, que l'on suppose vieux, appelé Syméon. On ne sait rien de lui, si ce n'est qu'il était un homme « juste et religieux qui attendait la Consolation d'Israël » et surtout, même si ça passe un peu inaperçu, que « l'Esprit Saint était sur lui ». Mystérieuse affirmation ! Ce n'est pas un prophète, et pourtant, on nous dit que l'Esprit Saint est sur lui. Et les paroles qu'il prononcent relèvent bien de la prophétie. Paroles elles aussi bien mystérieuses : « Voici que cet enfant  provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction – et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui  viennent du cœur d’un grand nombre. »
Et comme second rôle principal, voilà cette vieille femme, Anne. Personnage mystérieux, elle aussi, qui à la vue de cet enfant, « proclame les louanges de Dieu et parle de l'enfant à tous ceux qui attendent la délivrance de Jérusalem. »

        Autre texte mystérieux de ce jour : la première lecture, du livre de la Genèse, dans laquelle on passe allègrement du chapitre 15 au chapitre 21, dans un raccourci impressionnant de l'histoire d'un homme qui s'appelle Abram au début du texte et Abraham à la fin. Encore un vieil homme, à qui Dieu promet pourtant une descendance aussi nombreuse que les étoiles dans le ciel.

        Pourquoi tant de mystères ? Que veut nous dire l’Église à travers le choix de ces textes ? Autrement dit, comment notre présence aujourd'hui dans cette église va-t-elle permettre à notre foi de grandir, de s'affermir à l'écoute de ces passages bibliques ? Comment l'Esprit-Saint peut-il élargir notre coeur par l'écoute de ces histoires qui nous sont rappelées aujourd'hui ? Car c'est ça, l'enjeu.

        Le sens de cet ensemble de textes peut se condenser pratiquement sur deux mots, deux notions fondamentales : l'Alliance et la Promesse. Deux mots qui n'apparaissent pourtant explicitement que dans le psaume 104 pour l'un, et dans la deuxième lecture, la lettre aux Hébreux, pour l'autre. Ces deux mots, alliance et promesse, sont la porte d'entrée de la compréhension de ces mystères. Mais pour ouvrir ces portes, il nous faut une clé. C'est encore la deuxième lecture qui nous procure cette clé qu'est tout simplement la foi. « Grâce à la foi... » nous répète l'auteur de la Lettre aux Hébreux. Grâce à la foi, nous pouvons entrer dans le mystère de l'Alliance. Grâce à la foi, nous comprenons le sens de la Promesse.

        Dieu fait alliance avec les hommes. Cette alliance qu'il renouvelle avec nous en permanence, c'est bien plus qu'un contrat, ou qu'un pacte de non-agression. C'est une alliance d'amour qui prend la forme d'une promesse. Promesse faite à un homme, d'abord : Abram. Mais ensuite, Dieu déploiera cette alliance en réalisant sa promesse à travers toute la descendance de cet homme, c'est-à-dire nous tous, peuple de Dieu, et à toute l'humanité à qui nous avons la charge de l'annoncer.

        Par cette alliance, Dieu se fait notre allié. Notre allié, c'est celui qui marche avec nous, qui nous accompagne ; c'est celui qui nous veut du bien. Il veut déployer sa puissance, qui n'est qu'amour, pour le plus grand bien de l'homme. Il manifeste cette alliance en se rappelant sa promesse. C'est ainsi que Syméon, en voyant l'enfant Jésus, reconnaît, grâce à la foi, l'accomplissement de la promesse qu'il a lui-même entendue : « qu'il ne verrait pas la mort avant d'avoir vu le Christ, le Messie du Seigneur. » C'est pourquoi il prophétise, c'est-à-dire qu'il parle aux hommes au nom de Dieu. En voyant cette promesse réalisée pour lui-même, il manifeste à tous que Dieu tient sa promesse. En effet, on nous dit que Syméon « attendait la consolation d'Israël », c'est à dire le salut de l'humanité. Et celui qui apporte ce salut, c'est bien sûr Jésus, par sa passion, sa mort et sa résurrection. « Mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples » proclame Syméon. Et à sa suite, Anne, la vieille prophétesse, « parle de l'enfant à tous ceux qui attendent la délivrance de Jérusalem. » Une autre façon de dire la même chose que Syméon : le salut pour le peuple de Dieu, et plus largement, pour tous les hommes.

        C'est donc la foi, c'est-à-dire la confiance, qui nous aide à comprendre cette alliance qui est la réalisation perpétuelle de la promesse. En demandant le baptême pour votre fille, baptême dans la foi de l’Eglise, Jean-Etienne et Hélène, vous faites confiance à l’Eglise, vous participez à l’Alliance que Dieu fait avec son peuple, et vous souhaitez que Rose, elle aussi, entre dans cette alliance.
        Mais outre le baptême, ce vocabulaire : foi, confiance, promesse, alliance, peut aussi nous faire penser au mariage. Il y a d'abord les fiançailles, c'est-à-dire l'attente dans la confiance mutuelle, la promesse de se donner l'un à l’autre pour la vie. Foi, confiance, fiançailles, trois mots qui puisent leur sens dans la même racine.

         Avec les fiancés, lors de nos rencontres pour préparer leur mariage, il est bien-sûr question d’alliance. Pour eux, l’alliance, c’est d’abord cet anneau qu’ils se passeront au doigt, l’un à l’autre, juste après avoir été unis par le sacrement de mariage. Cet anneau est pour eux le signe de leur engagement, de la concrétisation de la promesse qu'ils se sont faite l'un à l'autre. Et en cheminant avec eux, nous essayons de leur faire découvrir que cet engagement, cette alliance qu’ils concluent, revêt quatre dimensions fondamentales : leur alliance est indissoluble, c’est-à-dire qu’elle est scellée pour la vie ; elle suppose une volonté commune de fidélité ; elle n’est possible que dans la liberté de chacun ; elle doit être tendue vers une fécondité. Indissolubilité, fidélité, liberté, fécondité. C’est ce qu’on appelle les quatre piliers du mariage chrétien. Eh bien, l’alliance que Dieu scelle avec son peuple, l’alliance que Dieu passe au doigt de l’humanité, elle a aussi ces quatre caractéristiques fondamentales : Elle est indissoluble, et n’aura pas de fin. Elle est fidélité, et même s’il nous arrive, à nous, pauvres pécheurs, d’être infidèles, Dieu, lui, nous reste fidèle à jamais. Elle est liberté : Dieu vient comme un petit bébé, pauvre, nu et vulnérable. Il ne s’impose pas à nous, nous pouvons choisir librement de l’accueillir ou de le rejeter. Et elle est fécondité, car Dieu nous donne la vie en abondance, et nous fait cette grâce inouïe de pouvoir la transmettre autour de nous, si nous le voulons.

        Voilà ce qu'est la bonne nouvelle ! Ce mystère de l'incarnation, de Dieu qui réalise sa promesse en venant habiter parmi nous, dans une famille toute simple, ordinaire. Bonne nouvelle ! il vient pour nous sauver, réalisant ainsi sa promesse, concrétiser son alliance qui est fidélité, indissolubilité, liberté et fécondité. Voilà quelle est la « consolation d'Israël » qu'attendait Syméon, la « délivrance de Jérusalem » que proclame la prophétesse Anne, par la venue de cet enfant Jésus.                 Voilà ce que nous comprenons, « grâce à la foi ». Voilà ce que vous allez offrir à votre fille Rose, en la faisant entrer dans la grande famille des enfants de Dieu.

Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent.
Clisson, le 28 décembre 2014


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