Année B
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retour vers l'accueilDimanche de la Sainte Famille
Comment recevons-nous, dans la
foi, les récits de la sainte famille de Nazareth, comme celui que nous
venons d’écouter ? Nous pouvons éprouver de l’admiration, devant une
famille sainte, unie, toute simple, à une époque sans matérialisme
étouffant, sans médiatisation à l’excès des événements du monde, une
famille choisie par Dieu pour une mission exceptionnelle, celle
d’accueillir Dieu dans son humanité, dans son peuple, dans sa tradition
et sa foi, en vue de se révéler à toute l’humanité.
Nous pouvons aussi éprouver de la
difficulté : ce que certaines de nos familles vivent semble loin de cet
idéal : Il y a des événements douloureux, parfois terribles : pauvreté
extrême, maladie, disparition tragique précoce, crise dans les
relations entre parents, entre parents et enfant, séparation, et sans
oublier les couples qui ne voient pas l’enfant venir.
Ces récits sur l’enfance de Jésus
ne cherchent ni à idéaliser, ni à culpabiliser. Alors méditons comment
ils peuvent nourrir notre foi et notre espérance, sur ce mystère
insondable qu’est la transmission de la vie et que Dieu a confié à nos
familles.
Toute famille accueille la joie
comme la souffrance, l’espérance comme le doute. La sainte famille de
Nazareth fait partie de nos familles et n’y a pas échappé. Marie et
Joseph accomplissent ce qui est prescrit, comme nos familles le font du
mieux possible. Ils vont au Temple accomplir les rites prescrits qui
constituent le mémorial de l’Alliance de Dieu avec son peuple. Ils
élèvent Jésus du mieux qu’ils le peuvent, dans les conditions de vie de
l’époque, non sans s’interroger sur le devenir de cet enfant. Les
prophéties de Syméon et d’Anne les troublent, ils sont étonnés, nous
rapporte Luc. Ils se laissent surprendre par l’inattendu. Ce qui leur
échappe vient d’ailleurs, de bien plus loin, de bien plus haut. Nous
aussi, nous sommes parfois surpris et troublés par l’inattendu de nos
enfants.
Alors reconnaissons cette réalité
inouïe : Dieu a fait le choix d’être en famille, de naître dans une
famille. Il aurait pu faire autrement, par exemple apparaître de
manière spectaculaire, avec un scénario à la Hollywood. Dieu a choisi
de tisser l’humain avec le divin, dès la conception de Jésus. Dieu a
fait le choix d’apprendre à marcher, à parler, à lire, à écrire dans
une famille, à ressentir joies et peines, à vivre en relation avec ses
semblables dans un petit village, au sein d’un peuple qui vivait sous
l’occupation politique et militaire d’une armée étrangère, l’armée
romaine, au sein d’un peuple qui attendait quelque chose de Dieu pour
le sauver. Oui, cette famille a une place singulière et unique dans
l’histoire de l’humanité : Dieu a choisi d’y vivre comme nouveau-né,
comme enfant, aujourd’hui on ajouterait comme pré-ado et comme ado,
quoique ce temps devait être court car, dans la foi juive, le garçon de
13 ans et la fille de 12 ans étaient considérés comme adultes dans la
foi, et les conditions de vie imposaient de travailler dès cet âge. Ce
n’était pas forcément simple à vivre.
Enfant parmi les enfants, homme
parmi les hommes, Dieu en Jésus n’a pas cherché le confort et la
protection : pensons au lieu improvisé de sa naissance. Il n’a pas
échappé aux dangers : n’oublions pas la fuite en Egypte devant les
horreurs perpétrés par le roi Hérode qui massacra tant d’enfants. Ce
massacre des innocents que le Pakistan vient de connaître avec
l’assassinat de 132 enfants. Jésus a vécu une trentaine d’années, avant
de commencer son ministère. C’est long, 30 ans. Dieu a pris son temps
pour être totalement en humanité avant de se révéler dans sa divinité.
C’est aussi cela, la famille : que chaque enfant ait le temps de
grandir, d’advenir : ne pas aller trop vite, ne pas brûler les étapes,
discerner librement pour l’avenir sans céder aux modes, ne pas donner
trop vite son corps à un autre, prendre le temps d’édifier la vie.
Sur ce chemin long et complexe,
la Sainte Famille nous offre une pédagogie. Elle témoigne d’une foi et
d’une espérance. Tout spécialement Marie. De la crèche à la croix, de
la paille au tombeau, Marie a gardé confiance. La vie n’est possible
que si la confiance existe. Car la confiance ouvre à l’amour. Ce long
travail d’approche a commencé dans la nuit des temps, aussi loin que la
mémoire du peuple d’Israël peut remonter dans le passé. Abraham, le
père des croyants, n’attendait plus rien de la vie. Il fit seulement
confiance en Dieu : il eut foi en Dieu. Abraham ne pouvait imaginer la
descendance de croyants, et pourtant nous en sommes. Marie, elle aussi,
garda confiance et fut témoin de la résurrection de Jésus.
Avec la Sainte Famille, plus rien
de ce qui est humain n’est étranger à Dieu, mais surtout, plus rien de
ce qui est de Dieu n’est étranger à la famille. Et ceci quelles que
soient nos situations de famille. Le rapport final du Synode de 2014
sur la famille écrit : « Toute famille doit en premier lieu être
écoutée avec respect et amour, en se faisant des compagnons de route,
comme le Christ avec les disciples sur le chemin d’Emmaüs » (46).
Accueillons-nous, écoutons-nous, soutenons-nous, avec le ressuscité qui
nous précède dans la Sainte Famille et qui nous invite à présent avec
le don de l’Eucharistie.
Christophe DONNET
Diacre permanent, Diocèse de Saint-Etienne
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