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Dimanche de la Sainte Famille



La famille : une promesse ?

En ce jour où l’Eglise fête la famille de Nazareth – Joseph, Marie et Jésus leur enfant – c’est d’une autre famille dont il est question, dans les textes que nous venons d’entendre : La famille d’Abraham, de son épouse Sara, qui, en enfantant Isaac, lui donnera une descendance promise par Dieu. Le psaume également fait mention de cette famille d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, et de cette promesse. La seconde lecture, de la lettre aux Hébreux, évoque elle aussi la descendance du Père de Croyants, descendance qui est le fruit d’une promesse. Enfin, dans le passage d’évangile que je viens de lire, la famille dont on parle est bien celle de Jésus, avec Marie sa mère et son père Joseph, même si nom n’est jamais cité. Mais ce qui est commun à ces quatre textes de la Bible, écrits à des époques très éloignées les unes des autres, ce n’est pas seulement l’idée de famille. C’est surtout celle de la Promesse, et d’accomplissement de cette promesse.
Abraham, on le sait, s’est mis en route, a quitté son pays, a quitté les siens. Il a laissé sa sécurité, son confort, pour chercher une autre vie, pour chercher ailleurs un sens à sa vie. Et pourquoi est-il parti ? En raison d’une promesse, d’une promesse de Dieu. Lui, Abraham, qui ne s’appelle encore qu’Abram, deviendra le père d’une descendance aussi nombreuse que les étoiles dans le ciel. Il deviendra Abraham, le père des croyants. À cause de cette simple promesse, Abraham est parti. Dieu ne lui a pas promis la fortune, ni la gloire, ni une vie facile. Seulement une descendance, une famille. Mais Abraham a jugé que cette promesse était suffisante pour tout quitter à cause d’elle. Ça valait le coup. Il était pourtant déjà âgé de 75 ans quand il s’est mis en route !
On voit cependant, dans le passage que nous avons entendu dans la première lecture, que cette promesse ne s’est pas réalisée tout de suite. Abraham est déjà parti depuis de nombreuses années au moment de cet épisode. Et Abraham semble un peu désabusé : « Mon Seigneur, qu’est-ce que tu vas me donner ? Je suis sans enfant… Tu ne m’as pas donné de descendance, et c’est un de mes serviteurs qui sera mon héritier. » C’est alors que Dieu lui renouvelle sa promesse. Ce qu’il a promis, il ne le reprend pas. Comme le souligne le psaume 104 d’aujourd’hui : « Il s’est toujours souvenu de son Alliance, parole édictée pour mille générations : promesse faite à Abraham, garantie par serment à Isaac. »
Abraham mérite bien son nom qui signifie « père des croyants ». Il est le patriarche, le premier père de cette famille nombreuse dont nous faisons partie. Il est celui qui va découvrir et transmettre après lui ces valeurs qui vont fonder nos sociétés, valeurs qui nous font vivre aujourd’hui, nous, chrétiens. Il va découvrir la vraie nature de Dieu : Un Dieu qui aime l’humanité, puisqu’il vient faire alliance avec elle par l’intermédiaire d’Abraham ; un Dieu qui propose l’espérance, puisqu’il lui fait une promesse ; un Dieu qui est digne de confiance, c’est-à-dire de foi, puisqu’il tient ses promesses.
À une époque où tous les peuples de la terre sont terrifiés par la puissance capricieuse de leurs multiples dieux, Abraham va persévérer dans la confiance en ce Dieu unique, Dieu d’amour qui se révèle à lui avec tendresse. Au point de tout quitter pour le suivre, pour se mettre à son service, pour faire sa volonté.
Faire sa volonté, c’est-à-dire garder, transmettre et mettre en pratique la foi transmise par Abraham, c’est justement ce que vont faire Joseph et Marie dans l’épisode d’aujourd’hui. Il nous est dit : « les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la loi ». Par le mot « loi », entendons « foi d’Israël », foi transmise depuis Abraham et codifiée à partir de l’époque de Moïse. La loi dont il est question, c’est un peu comme notre « credo » qui définit les contours de notre foi, et auquel s’ajouteraient ses implications concrètes dans la vie sociale et politique. C’est donc pour respecter cette loi, pour continuer à pratiquer et transmettre cette foi, que Joseph et Marie présentent leur fils premier-né au temple de Jérusalem : « les parents y entraient avec l’enfant Jésus pour accomplir les rites de la loi qui le concernaient ».
Arrive alors Syméon. Qui est cet homme ? le texte nous dit simplement que  « c’était un homme juste et religieux qui attendait la Consolation d’Israël ». Juste, c’est-à-dire « ajusté à la volonté de Dieu ». Syméon, lui aussi, a cru en la Promesse de Dieu : « l’Esprit lui avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur ». Et cette promesse aussi va s’accomplir. Il reconnaît en ce tout petit enfant, Jésus, le Messie que le peuple attend, et c’est l’Esprit qui lui inspire ses paroles prophétiques. Un autre personnage, Anne, prophétise elle aussi, à sa manière. Même si on ne nous rapporte pas ses paroles, on nous la décrit un peu comme on décrirait une religieuse aujourd’hui : « Elle ne s’éloignait pas du temple, servant Dieu nuit et jour dans le jeûne et la prière ; elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance d’Israël ». Elle prophétise dans sa vie quotidienne. Comme le font aujourd’hui les sœurs religieuses depuis leur monastère ou dans le monde.
Les parents de Jésus, quant à eux, ne semblent pas comprendre le sens de ses paroles. Pour eux, Jésus, c’est simplement leur enfant, leur fils premier-né. Ils ne se considèrent que comme une famille ordinaire. Ils sont, eux aussi, comme tous les autres hommes et femmes du peuple d’Israël, dans cette attente de la consolation d’Israël, c’est-à-dire de la venue du Messie. Mais ils ne peuvent évidemment pas se douter que c’est par cette famille, leur propre famille, celle que l’on appellera la Sainte famille, que se réalisera la Promesse. Leur enfant Jésus est même celui par qui s’accomplira définitivement cette promesse. Ils ne le savent pas encore. On ne connaît pas toujours la richesse de sa propre famille. Ce n’est qu’avec suffisamment de recul, ce n’est qu’après la résurrection et l’illumination de la Pentecôte que, bien plus tard, les apôtres vont comprendre la signification de ces prophéties de Syméon et d’Anne, et en mesurer la portée.
Famille, promesse… l’histoire du peuple de Dieu, qui se continue à travers nous, s’articule autour de ces deux mots. Dieu fait à Abraham la promesse d’une descendance, d’une famille. En lui faisant le cadeau de devenir père de famille, Dieu montre qu’il tient sa promesse. Par les prophètes de l’ancienne alliance, il montre à la famille d’Israël qu’il n’oublie pas sa promesse. Par cette même famille, Dieu accomplit sa promesse en suscitant en son sein la Sainte Famille de Nazareth, qui sera le foyer dans lequel pourra grandir Jésus, qui accomplira la Promesse.
Puissions-nous voir nos propres familles, avec leur simplicité et leur humanité, comme les lieux de l’accomplissement de la promesse de Dieu pour tout homme.
Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent.
Clisson, le 28 décembre 2008


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