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Aujourd’hui,
nous fêtons l’Ascension du Seigneur. Nous avons gardé ce terme
« ascension », car il est question dans les récits
d’aujourd’hui de Jésus « emporté au ciel ». Il a donc bien
fallu qu’il « monte », qu’il y ait une ascension ! Mais le
ciel dont il est question ici n’est pas celui que l’on voit au-dessus
de nos têtes. D’ailleurs, quand on parle du ciel aujourd’hui, c’est
plutôt à la météo que l’on pense : « Comment est le ciel, ce
matin ? » un coup d’œil en levant la tête, et nous savons de quoi
sera faite la journée. Nous avons le sentiment de bien connaître le
ciel. Mais pour les hommes de l’Antiquité, et jusqu’à une époque
récente, le ciel, c’est d’abord l’inconnu, l’indicible, le domaine de
l’invisible et de l’imprévisible. C’est le lieu d’où proviennent les
bonnes choses : l’heureuse alternance des saisons, la pluie qui
arrose les semailles, le soleil qui fait mûrir les fruits et s’épanouir
les fleurs… Mais le ciel est aussi le lieu d’où arrivent les
dangers : la foudre, les tempêtes, les inondations, les
sécheresses… Autant de phénomènes que l’homme ne peut maîtriser, qui
échappent à son contrôle, qui le dépassent. C’est donc tout
naturellement que les Anciens de toutes cultures ont vu, dans le ciel,
le siège de toutes ces forces de la nature, et par conséquent, en ont
fait le lieu de résidence des dieux. Plus tard, et avec la Bible, c’est
encore tout aussi naturellement dans le ciel que sera situé le trône de
Dieu, le Dieu unique et universel.
Le ciel dont il est question
dans les lectures de ce jour est donc la résidence de Dieu. C’est
pourquoi nous disons dans nos prières « Notre Père qui es aux
cieux » et dans le Credo, en parlant de jésus : « Il est
monté aux cieux » ; Mais le ciel dont nous parlons n’est
évidemment pas un lieu précis. Il n’est pas cette voûte au-dessus de
nos têtes que les météorologues et autres astrophysiciens explorent en
permanence. Le ciel échappe à l’espace et au temps, tels que nous les
percevons. Alors, ne soyons pas étonnés de ne pas avoir de réponse à
donner aux enfants qui nous questionnent sur ce ciel. Ni aux
non-croyants en général qui se moquent parfois de nos conceptions parce
qu’ils opposent la connaissance et la foi, le rationnel et
l’irrationnel, le matériel et le spirituel, au lieu de les comprendre
comme des valeurs complémentaires.
« Jésus fut enlevé au
ciel » nous dit St Marc. Que veut-il nous dire ? je crois
qu’il essaye de nous transmettre le sentiment des disciples après la
résurrection : Ils se rendent bien compte que, dans leur
quotidien, Jésus n’est plus là, à leurs côtés. En tout cas, plus là
« comme avant ». Ils commencent à comprendre que, s’ils l’ont
revu après sa mort et sa résurrection, c’était bien lui, mais il était
tout autre. Il leur apparaissait, mais ils ne le reconnaissaient pas
tout de suite, eux qui pourtant le connaissaient si bien. Il fallait
qu’il se dévoile par un geste, par une parole, pour qu’ils le
reconnaissent, avant qu’il disparaisse à nouveau, comme sur le chemin
d’Emmaüs le soir de Pâques.
L’évangéliste exprime par cette image de
l’ascension de Jésus que rien ne sera plus comme avant. Il y a une
rupture dans leur vie. La présence de Jésus ne peut plus être cette
présence palpable, matérielle, concrète comme lorsqu’il cheminait avec
eux sur les routes de Galilée. Il est toujours là, mais pas de la même
manière. Il est à présent « au ciel », c’est-à-dire dans ce
lieu mystérieux qui est tout à la fois infiniment lointain et pourtant
si proche ; tout à la fois invisible et pourtant si évident ; tout
à la fois à venir et pourtant déjà là.
Bref, ce récit veut nous dire
- et c’est ainsi que nous, croyants, nous le comprenons - que
Jésus rejoint son Père, « notre Père qui est aux cieux ». Il
rejoint Dieu dans ce ciel où il réside. Il est désormais « assis à
la droite de Dieu » Il retourne vers son Père, et, en quelque
sorte, il nous montre le chemin, il nous ouvre ce chemin. Car,
nous aussi, nous le rejoindrons à notre tour, et nous verrons Dieu face
à face ! Jésus ne nous a-t-il pas dit : « Je suis le
Chemin, la Vérité, la Vie » ?
Mais ce départ de Jésus n’est pas
un abandon. Dans le récit de la première lecture, il dit à ses amis,
juste avant de disparaître à leurs yeux : « vous allez recevoir
une force, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous. Alors, vous
serez mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre. » Non, c’est
tout le contraire d’un abandon : l’évangile nous dit « Quant
à eux, ils s’en allèrent proclamer partout la Bonne Nouvelle. Le
Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes
qui l’accompagnaient. » Non seulement il ne les abandonne pas,
mais il travaille avec eux.
Alors, en attendant ce jour où nous
le rejoindrons, ne restons pas comme les disciples, le nez en l’air à
regarder le ciel comme dans la première lecture : « Galiléens,
pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? » Comme les
deux hommes vêtus de blanc, rappelons-nous, au matin de Pâques disant
aux femmes « pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est
vivant ? » deux hommes en vêtement blanc viennent à nouveau
dire à ses amis : « ne cherchez pas Jésus où il n’est
pas ; ne le cherchez pas chez les morts, il est vivant ; ne
le cherchez pas dans les nuages, il habite désormais chez les
hommes. » C’est, ni plus ni moins, un envoi en mission :
« Vous serez mes témoins, ici à Jérusalem et jusqu’aux extrémités
de la terre ».
Pour les disciples, il faudra attendre la
Pentecôte pour que, ayant reçu l’Esprit Saint, ils aient le courage de
sortir de leur cachette où ils se terraient de peur d’être à leur tour
mis à mort. Mais nous, aujourd’hui, nous n’avons plus à attendre
l’Esprit saint : il nous a été donné à notre baptême, il nous
accompagne et se manifeste à nous à chaque eucharistie, il vient nous
réveiller en se manifestant dans chaque sacrement que nous recevons par
l’Eglise. Alors, ne pas rester le nez en l’air à regarder le ciel,
c’est prendre conscience que l’Esprit nous envoie vers nos
frères ; c’est faire en sorte d’habiter toutes nos rencontres de
cet Esprit Saint par qui nous sommes, par notre baptême, témoins de
l’Evangile, ici à Clisson (à Gétigné) et jusqu’aux extrémités de la
terre.
Amen !
Daniel BICHET, diacre permanent
21 mai 2009
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