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Imaginons
un instant que nous devions quitter nos proches pendant une période
plus ou moins longue. Même si le motif de cette séparation est légitime
et présente beaucoup d’intérêts - si l’avenir professionnel est en jeu,
ou même s’il s’agit de vacances, de voyages - cela génère malgré tout
des inquiétudes chez les uns et les autres. Pourvu que tout se passe
bien, tant pour ceux qui restent que pour ceux qui partent. Nous avons
alors envie de nous donner mutuellement des conseils, des
recommandations. « Soyez prudents !», « surtout
n’oubliez pas de nous donner de vos nouvelles.», « ne vous
inquiétez pas. » Nous avons tous vécu cela déjà, en tant que
parents ou en tant qu’enfants ou amis. Pourquoi cette inquiétude, ces
recommandations ? Tout simplement parce que nous nous aimons.
Le
passage d’Evangile que nous venons d’entendre commence par cette
phrase : « À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père
il disait à ses disciples », ceci pour nous rappeler que, Jésus,
peu de temps avant sa mort, tient à rassurer ses disciples et aussi à
leur donner des recommandations. On y trouve trois grands thèmes :
- Jésus souligne l’unité profonde qui existe
entre lui-même, Dieu, son Père, et nous tous : “Comme le
Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés”
- il
tient compte des inquiétudes que cause à ses disciples la perspective
de son « départ » et veut les rassurer : « Je vous
ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que vous soyez comblés de
joie. »
- enfin, il leur donne une ultime
recommandation et insiste particulièrement sur la nécessité de l’amour
fraternel : « Ce que je vous commande, c’est de vous aimer
les uns les autres.”
Au point de départ, c’est l’amour de Dieu.
“Comme
le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés” C’est parce qu’il y a, au
point de départ, cet amour du Père et du Fils que Jésus nous dit qu’à
son tour il nous aime. Il nous fait entrer dans l’amour divin en nous
donnant son Esprit. Et, il nous prouve son amour en donnant sa vie.
C’est en quelque sorte une chaîne d’amour partagé, une communion qui se
constitue entre le Père, le Fils, l’Esprit, nous et les autres. Oui, si
nous entrons dans l’Amour qui est Dieu, nous vivrons cet amour en nous
aimant mutuellement et cela produira du fruit.
Si nous acceptons
d’entrer dans cette communion, notre relation à Dieu va s’en trouver
modifiée totalement : Dieu devient notre ami. Dieu nous aime
malgré notre pauvreté, nos limites, nos faiblesses.
Dieu nous
aime, c’est le cœur du message de Jésus mais, y croyons-nous
vraiment ? Il est encore difficile, notamment lorsque nous
traversons des épreuves, de croire que nous sommes vraiment aimés de
Dieu, ce d’autant plus qu’on nous a trop souvent donné l’image d’un
Dieu autoritaire, qui surveille et qui punit. Croire que Dieu nous
aime, c’est réaliser que chacune et chacun de nous est le fruit de
l’Amour, c’est croire qu’à travers l’amour de nos parents, c’est Dieu
qui est Amour et qui donne la vie. Si je crois vraiment que Dieu donne
la vie, j’accepte de vivre de son amour. Celles et ceux qui en ont fait
l’expérience peuvent comprendre la force du propos de Jésus :
« Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que vous
soyez comblés de joie. »
Si nous voulons entrer dans la joie de
Dieu, il nous faut accepter de devenir un maillon de cette chaîne
d’amour partagé. L’amitié que nous offre Jésus n’est pas réservée à une
élite, car tous les hommes y sont invités.
Dans la première
lecture, lorsque Pierre se rend à Césarée chez un Centurion de l’armée
romaine, c’est-à-dire chez un païen, il s’écrie : « Dieu ne
fait pas de différences entre les hommes. » Pour nous,
aujourd’hui, cela paraît une évidence - est-ce si sûr… ? -
mais en tout cas, pour les juifs et les chrétiens de l’époque, cela
n’allait pas de soi. Le grand projet de Dieu sur le monde, c’est que
tous les humains finissent par former ensemble une immense chaîne où
tous se voudront frères les uns des autres, quelles que soient leur
culture ou leur religion. C’est ainsi que nous pourrons nous enrichir
mutuellement dans le respect de nos différences. Car chacun doit garder
son identité propre : ce ne doit pas être une fusion, mais une
communion dans la diversité de tous. Dieu souffre quand il voit ses
enfants s’affronter. Son grand désir, c’est de nous voir nous
accueillir et fraterniser ensemble.
τ “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés…”
Autant
dire que le disciple est appelé à passer par où Jésus est passé. Le
verbe aimer prend alors un sens bien précis. “Nul n’a de plus grand
amour que celui qui donne sa vie pour ses amis.” C’est en regardant
vers la croix du Christ que nous comprenons mieux ce que cela signifie
pour nous chrétiens d’aujourd’hui. On commence à donner sa vie en
écoutant, en supportant, en partageant, en encourageant. C’est tous ces
gestes d’amour et de partage qui font la valeur d’une vie et qui sont
source de bonheur. Saint Paul, dans les Actes des Apôtres, au chapitre
10, verset 35 , nous demande de nous souvenir des paroles de
Jésus : « Il y a plus de bonheur à donner qu’à
recevoir. »
Ces paroles m’ont longtemps étonné mais
j’ai mieux compris, depuis que je suis diacre, que pour avoir quelque
chose à donner, il faut d’abord recevoir. C’est pour cela que Jésus
nous demande de « demeurer » dans son amour. Oui, j’ai mieux
compris l’importance d’accueillir l’amour de Dieu et de reconnaître sa
présence dans les sœurs et les frères que je suis appelé à rencontrer.
Je peux dire que, même si ce n’est pas toujours facile, je fais très
souvent l’expérience de vivre mon ministère diaconal avec grand
bonheur. Par exemple, aider des jeunes qui veulent s’unir dans le
mariage demande certes un gros investissement en temps d’écoute, de
partage, de réflexion et aussi de préparation mais quel bonheur de les
voir heureux et rayonnants de joie ! Prendre du temps pour
rencontrer quelqu’un, se mettre à son écoute et l’aider dans ses
difficultés, cela peut parfois sembler contraignant, exigeant et
pourtant procurer une grande paix intérieure. Il m’arrive de partir à
une réunion, en soirée notamment, plus par devoir que par enthousiasme
et d’en revenir régénéré. Vous l’avez sûrement tous expérimenté :
lorsqu’on accepte de donner un peu on est parfois surpris de recevoir
beaucoup plus en retour. Nous éprouvons tous le désir d'entrer en
relation avec les autres et nous nous réalisons pleinement quand nous
nous donnons librement aux autres.
«Ce que je vous commande, c'est
de vous aimer les uns les autres ». Que cette Eucharistie nous aide à
former avec tous une grande chaîne d’amour partagé en accueillant celui
qui est Amour et source de tout amour.
André ROUL
17 mai 2009
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