Année B
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retour vers l'accueil3° dimanche de Carême
Il y a quelques années, pendant une messe paroissiale, tout un groupe
d’enfants a été invité à aller réfléchir autour du texte d’évangile et
de revenir présenter leurs réflexions sous la forme de dessins à
exposer à la fin de la célébration.
Le texte était celui que nous venons d’entendre et l’un des enfants a
dessiné Jésus dans sa sainte colère et le dessin était très expressif.
Mais la catéchiste a trouvé justement que ce n’était pas bien de
présenter Jésus dans une telle explosion de fureur et le dessin n’a pas
été exposé avec les autres! Le petit garçon est devenu l’adulte qui me
l’a raconté et qui en a été marqué à vie : pourtant m’a-t-il dit Jésus
était bien en colère !
Je n’ai jamais rencontré la catéchiste mais je pense qu’elle n’est pas
la seule à être un peu gênée par cet épisode où Jésus tresse un fouet
avec des cordes et montre une telle violence.
Alors aujourd’hui je vous propose de regarder ce texte comme si c’était la première fois que nous l’entendions.
En le regardant bien, on y voit 2 parties :
- La première où il chasse les marchands du Temple,
- la seconde où il parle de détruire le Temple.
En fait la seconde partie est la plus choquante pour les juifs : le
Temple était le lieu de la présence de Dieu parmi son peuple ; si l’on
détruisait le Temple, le peuple n’aurait plus de raison d’exister et
d’ailleurs, en l’an 70, lorsque le Temple sera entièrement détruit par
les Romains, les juifs auront beaucoup de mal à reconstruire leurs vies
sans ce lieu de culte. C’est en partie à cause de cette menace que
certains responsables juifs vont se radicaliser et souhaiter la mort de
Jésus.
La première partie, elle, est à regarder avec attention : si Jésus
semble violent avec les marchands de bœufs, de brebis et contre les
changeurs de monnaie, Il est plus doux avec les marchands de colombes,
les seuls à qui il adresse cette parole : « Enlevez cela d’ici. Ne
faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. » Souvenez
vous que lors de la Présentation au Temple de Jésus par ses parents,
Marie et Joseph avaient eux aussi sacrifiés 2 petites colombes :
c’était l’offrande des pauvres.
Mais alors quel était le vrai problème et pourquoi cette réaction de Jésus ?
Jésus s’est incarné pour réconcilier les hommes avec Dieu et que
découvre-t-il en entrant dans le Temple ? Que pour beaucoup de ses
contemporains, la relation avec Dieu est une relation marchande :
j’offre un beau sacrifice et je vais être protégé par Dieu, je vais
m’attirer ses bonnes grâces. Et c’est tout ?
Jésus avait déjà mis en garde ses Apôtres et ses auditeurs en regardant
la pauvre veuve qui mettait son obole alors que la plupart des gens y
mettait de grosses sommes. L’important c’était la manière de donner et
pas la quantité.
Cette démarche avait souvent été rappelé par les prophètes. Dans le
psaume 49 on lit : « Écoute, mon peuple, je parle ; Vais-je manger la
chair des taureaux et boire le sang des béliers ? Offre à Dieu le
sacrifice d'action de grâce, accomplis tes voeux envers le Très-Haut.
Qui offre le sacrifice d'action de grâce, celui-là me rend gloire.»
Jésus qui a appris aux Apôtres à prier en disant Abba, Papa, se retrouve avec des marchands comme si Dieu était à vendre !
Mais ne leur jettons pas la pierre trop vite ! Au XVI° siècle la vente
des indulgences pour financer la construction de la Basilique St Pierre
à Rome sera, entre autre, la cause de la séparation de Martin Luther et
des protestants.
Et nous aujourd’hui ?
Pourquoi lisons nous ce texte au milieu du Carême ?
C’est la première lecture qui nous en donne la clef.
« Tu n’auras pas d’autres dieux que moi » C’est la première parole du Décalogue, les dix commandements donnés par Dieu à Moïse.
Mais si vous ouvrez le journal ces jours ci tout est évalué par sa
valeur financière : toujours plus et à n’importe quel prix : La voilà
l’idole de notre monde !
Jésus nous dit :« Enlevez cela d’ici » Si vous voulez retrouvez la
proximité avec Dieu ( et c’est bien le but de notre carême)
désencombrez vous de tous ces marchandages qui nous empêchent de
retrouver le Temple, par la prière, le partage et la maîtrise de soi.
Quand Jésus nous demande de prier, de partager et de jeûner c’est pour
nous rapprocher de Dieu, changer de regard sur les personnes qui nous
entourent et pour nous détacher de notre petit moi, de nos désirs si
envahissants. Mais pas pour faire des comptes d’apothicaires avec Dieu.
Débarrassons nous de tous nos calculs, de tous nos marchandages : le
carême n’est pas un temps de négociation avec Dieu (je vais faire plus
de prières, plus de jeûne et je vais plus partager) mais plutôt je vais
me jeter dans les bras de mon Père, de mon Papa du ciel, et lui dire
que je l’aime, gratuitement.
Ainsi, d’un Carême compris à l’envers peut émerger le véritable
Carême à l’endroit, celui qui, seul, va plaire au Seigneur : « enlever
le joug qui pèse » sur les épaules de nos frères et « rendre la liberté
à ceux qu’on écrase » (Isaïe, ch 58, 6). C’est ce Carême à l’endroit
que je vous propose, moins regardant sur les rites à honorer coûte que
coûte - « faire ses pâques » - et plus ouvert sur un autre rapport au
sacré, celui du huitième sacrement, le sacrement du frère à qui il faut
laver les pieds et qu’il faut conduire à l’auberge, s’il est blessé au
bord du chemin. Mais c’est aussi la démarche que nous proposent les
évêques avec Diaconia.
« La loi du Seigneur est parfaite, qui redonne vie ; […] plus
désirables que l’or, qu’une masse d’or fin, […] le commandement du
Seigneur est limpide, il clarifie le regard.. »
Philippe ARRIVE, diacre permanent.
Vertou 10-11 Mars 2012
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