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3° dimanche de Carême

 Ex 20, 1-17 ; Ps 18 ; 1 Co 1, 22-25 ; Jn 2, 13-25


La première lecture que nous venons d’entendre, est appelée ordinairement les Dix commandements. Cette expression, qui a même donné le titre d’un film célèbre, est en fait assez erronée car elle dit autre chose que ce que nous dit l’hébreu.
Le terme en hébreu est les Dix paroles, ou Décalogue.
Pourquoi rappeler le nom d’origine ?
Eh bien, l’expression les Dix commandements peut donner l’image d’une loi qui tombe du ciel, qui s’impose sans appel, qui dit ce qui est permis et ce qui est défendu sans nuance, et qui ne se préoccupe pas des personnes.
L’expression les Dix paroles, nous dit déjà qu’il s’agit d’une relation entre personnes puisque quelqu’un parle à quelqu’un d’autre. Il y a un Je et il y a un Tu. Et bien sûr, il y a un prochain.
D’ailleurs en regardant de près, le texte commence par un « Je », Je suis l’Eternel ton Dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte » et se termine par « ton prochain », Tu ne convoiteras rien de ce qui appartient à ton prochain.
Comme si les dix paroles entre le mot « Je » et le mot « prochain » étaient un guide pour construire le chemin, notre chemin entre Dieu et notre prochain.
Comme si le projet de Dieu pour chacun de nous était une invitation à inventer, à fabriquer chacun à notre manière le lien entre Dieu et notre prochain.
Comme une promesse de liberté et de bonheur.

Croyons-nous qu’il y a un chemin de bonheur à fabriquer du lien entre Dieu et notre prochain ?
En guise d’image, je vous propose celle-ci :
En entrant dans certaines synagogues, qui sont comme les églises pour les Juifs, nous pouvons lire au dessus de la porte l’inscription : « tu aimeras le Seigneur ton Dieu ». Et en repartant, nous pouvons lire cette fois du côté intérieur au moment donc où l’on rejoint le monde, une seconde inscription : « tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
Y entendez-vous le commandement de Jésus : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu (Dt 6,5) et ton prochain comme toi-même (Lev 18,19). » ?

Voyons maintenant le passage de l’évangile selon St Jean.
Le passage que nous venons de lire, où Jésus chasse les marchands du Temple, est au chapitre 2. Nous sommes donc tout au début de l’évangile et Jean veut sans doute nous dire quelque chose d’important.
Nous sommes ici au Temple de Jérusalem car la fête de Pâque approche. Nous pouvons y voir les marchands d’offrande et les tables des changeurs d’argent.
Personnellement, j’ai toujours compris cet épisode comme celui des « marchands du Temple » plus intéressés par l’argent que par Dieu ; et Jésus un justicier qui punit les méchants.
Un peu simpliste non ? Oui, quand même.
Avec le temps, j’ai appris à me méfier de mes premières impressions surtout quand elles pointent du doigt si facilement « les gentils et les méchants. »
Quand en plus ces impressions sont teintées de préjugés sur la relation à l’argent de certaines personnes, les raccourcis peuvent coûter cher.
Voyons d’un peu plus près ce qu’il se passe dans cette scène.
En premier, autour des marchands, nous voyons des Juifs et des « Craignant Dieu ». Les « Craignant Dieu », n’étaient pas des juifs mais ils étaient attirés par le Dieu des Juifs.
Toute cette foule venait de Judée, de Galilée, et aussi des différents pays autour de la Méditerranée. Ils avaient tous des pièces de monnaie différentes. Et changer de l’argent était une nécessité. Pensez aux guichets de change pour les touristes que l’on trouve à Paris ou dans les aéroports. C’est la même chose.
Tous ceux qui pouvaient venaient donc à Jérusalem en pèlerinage pour célébrer la grande fête de la Pâque, qui chaque année encore aujourd’hui, rend actuelle la libération d’Egypte du peuple hébreu.
Nous aussi en Eglise, nous en ferons mémoire en lisant le récit de la sortie d’Egypte et la traversée de la mer Rouge lors de la prochaine nuit de Pâques.
Donc tous les peuples qui étaient sous le ciel, venaient à Jérusalem pour présenter l’offrande pascale : un agneau que l’on va immoler, rôtir et partager en famille.
Le point important dans cet épisode est que l’esplanade du Temple, appelée également le parvis des Nations, était un espace réservé aux juifs et aux non-juifs. C’est donc un lieu qui manifestait que le Dieu des Juifs attire toutes les nations sous le ciel.
Ainsi par son geste, Jésus cherche à redonner à cet espace sa vocation première : permettre à tout homme et à toute femme de s’approcher de Dieu, quelque soit sa richesse, sa religion ou son pays d’origine.
Et ce récit a aussi un deuxième effet kiss cool : par son geste Jésus nous montre ce qui compte en premier : l’intention du cœur.
La question est : Offrir quelque chose ou offrir sa vie, son cœur ?
Nous pouvons le reconnaître, ce qui est plus facile c’est de donner quelque chose à Dieu, en espérant que cela suffira pour mériter son amour.
Ce qui n’est pas simple, et les saints et vos grands-parents vous le diront, c’est de se laisser aimer par Dieu.
Alors voici : je vous propose d’essayer, simplement, avec quelque chose de très concret.
Je vous propose de vous associer à la prière que dit le diacre au moment de la préparation du vin de l’offrande : « Comme cette eau se mêle au vin pour le sacrement de l’Alliance, puissions-nous être unis à la divinité de Celui qui a pris notre humanité. »
Au moment où cette goutte est mélangée au vin, je présente à Dieu ma vie, ma semaine, les personnes que j’ai rencontrées, mes copains de classe, mes voisins de quartier, les personnes avec qui je travaille, mes amis, ma famille, et aussi mes espérances comme mes désespoirs, nos luttes et notre péché.
Saint Cyprien, qui était évêque au 3ème siècle à Carthage tout près de Tunis, nous dit :
« L’eau, c’est le peuple, c’est nous. Et le vin, c’est le sang du Christ. Quand on mêle l’eau au vin dans le calice, c’est le peuple qui ne fait plus qu’un avec le Christ. ».
Par cette offrande ainsi nous devenons chaque fois un peu plus les adorateurs en Esprit et en vérité que cherche le Père.
Amen

Michel BERDAH diacre permanent
8 mars 2015


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