Année B
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29° dimanche ordinaire


Le passage que nous venons d’entendre se situe juste après la 3° annonce par Jésus à ses disciples de sa passion, de sa mort et de sa résurrection.
Pour la troisième fois, les disciples n’ont rien compris. Rappelons-nous, dans l’Evangile d’il y a quelques dimanches, lors de sa première annonce : Pierre prend Jésus à part et lui fait de vifs reproches. Et la réponse de Jésus : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ! ». Stupeur des disciples. Juste après la deuxième annonce de sa passion, les amis de Jésus ne trouvent rien de mieux à faire que de se disputer pour savoir lequel serait le plus grand dans le Royaume ! Là encore, la réponse de Jésus va les déconcerter : Il place un petit enfant au milieu d’eux, l’embrasse et leur dit : « Quiconque accueille un enfant comme celui-là à cause de mon nom, c’est moi qu’il accueille ».
Et aujourd’hui, donc, comment réagissent les disciples à la troisième annonce de la passion ? Eh bien, ils restent dans le même registre du pouvoir : « Accorde-nous de siéger l’un à ta droite, l’autre à ta gauche » ! décidément, le message ne passe pas !
Mais, il faut le reconnaître, quel scandale : Le chef de la bande, le maître, le leader comme on dirait aujourd’hui, au lieu d’annoncer à ses troupes la victoire de Dieu sur l’occupant,le rétablissement de l’indépendance d’Israël , ou plus généralement celle du Bien sur le Mal, eh bien ce chef, Jésus, annonce des épreuves de souffrance et de mort ! Evidemment, pour nous qui connaissons la suite de l’histoire, et avec 2000 ans de recul, et surtout après l’événement capital de la Résurrection, nous comprenons bien à quoi Jésus fait allusion dans cette triple annonce. Mais pour eux, humbles Galiléens, comment admettre que l’issue de la démarche dans laquelle ils sont entrés en suivant Jésus, sera la persécution et la mort ?
C’est pourquoi, justement, Jésus, par trois fois, tente de les amener à comprendre, progressivement, la mission pour laquelle il est venu, la mission pour laquelle ils le suivent et qui ne consiste pas à prendre le pouvoir et à se le partager :
Tout d’abord : « Vos pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes », comme pour nous dire : n’essayons pas de placer Dieu dans nos modèles. L’homme est à l’image de Dieu, pas l’inverse. Puis il va faire un geste, en embrassant l’enfant, le petit, le faible, le sans-droit, l’esclave « Celui qui accueille un enfant – entendons : un petit, un faible, un sans-droit, un esclave – en mon nom, c’est moi qu’il accueille ». Et enfin, dans l’Evangile d’aujourd’hui, il enfonce le clou : Non seulement il nous faut accueillir ce petit, ce faible, ce sans-droit, cet esclave, mais il nous faut le devenir ! Devenir le serviteur, celui qui se met au service de ses frères, et non pas celui qui les met à son service, qui cherche le pouvoir. Et Jésus va plus loin : Il se propose lui-même comme modèle, lui qui va, quelques jours plus tard, signifier par ses actes ce message que les mots, apparemment, ne parviennent pas à faire comprendre : il lavera les pieds de ses disciples, tâche de l’esclave, lui le Maître et Seigneur, puis il donnera sa vie, après avoir dit « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Et nous sommes bien dans la prophétie d’Isaïe, que nous avons entendue dans la première lecture : « A cause de ses souffrances, le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes, et se chargera de leurs péchés ». Car le salut ne peut faire l’économie de la croix. Certes, il est plus confortable, moins dérangeant, de se projeter vers la résurrection  (tout est bien qui finit bien, et nous siégerons finalement à droite et à gauche du Père) que d’accepter que cette résurrection n’existe que par le passage par la croix. Ce n’est pas l’ambition, mais c’est le service qui sauve. C’est ce que nous dit Jésus : « Celui qui veut devenir grand sera votre serviteur ». Non, vraiment, nos pensées ne sont pas celles de Dieu. Là où le disciple demande « pouvoir », Dieu répond « service ».
Alors, pour être à côté de Jésus dans son royaume, il ne s’agit pas de se préparer à exercer un pouvoir, mais à se faire serviteur.
Devenir serviteur… Se mettre au service de nos frères… Dans le texte original de l’Evangile de Marc, écrit en grec, le mot « serviteur » est « diakonos », et les mots « service » et « servir » sont de cette même racine « diakonê ». Je ne peux donc pas m’empêcher, et vous me le pardonnerez, de me sentir particulièrement concerné par cette parole, moi qui inaugure aujourd’hui, en ce moment, mon ministère diaconal. (Et à ce propos, n’oublions pas que « ministre » signifie aussi « serviteur », même si on a tendance à y voir un pouvoir avant un service). Mais le diacre que je suis désormais, le serviteur donc, n’est pas au service de son propre salut. Il est là, ils sont là, tous les diacres de notre Eglise, (et les prêtres sont d’abord diacres et restent aussi diacres), nous sommes là pour rappeler à l’Eglise, au peuple de Dieu sa mission de service que Jésus nous confie, et qu’il nous rappelle avec force dans l’Evangile d’aujourd’hui. L’Eglise est le corps du Christ au service du monde, de l’humanité. Pas « à côté » mais à l’intérieur ; pas « en-dessus » ou « en-dehors » du monde, mais au cœur du monde. Cette mission de service, nombreux sont les chrétiens qui l’incarnent, parfois en toute discrétion, en toute humilité. Je pense à tous ces chrétiens de notre paroisse ou d’ailleurs, engagés dans des mouvements caritatifs, et en particulier ce samedi où le Secours Catholique fête ses 60 ans au service des plus démunis. Je pense à ces chrétiens engagés dans de nombreuses associations solidaires, qui se sont rendues particulièrement visibles à Clisson cette semaine et encore ce dimanche, associations chrétiennes ou non, dont la finalité et la raison d’être est justement le service des hommes, qu’elles soient à caractère social, éducatif, ou de la santé. Au service des plus petits de nos frères, les petits, les faibles, les pauvres, les sans-droit. Mais je pense aussi à ces hommes et ces femmes de l’ombre, au service de l’humanité tout entière, qui la portent par leur prière au fond de leur monastère ; à ces personnes peut-être toutes proches de nous, qui, à leur manière aussi, servent leurs frères en portant dans la prière leurs souffrances jusqu’au cœur de Dieu.
Frères et sœurs, si nous sommes ici rassemblés  aujourd’hui, pour rendre grâce à Dieu de toutes les merveilles qu’il nous donne – c’est le sens de l’Eucharistie - nous sommes là aussi pour être, à la fin de cette célébration, envoyés par Lui auprès de nos frères les hommes, pour nous mettre à leur service, pour leur annoncer :
-    par nos actes, même dans la modestie ;
-    par notre parole, même dans l’incompréhension ;
-    par notre vie, même dans l’humilité ;
-    par notre prière, même dans le secret ; pour leur annoncer de
quel amour les aime ce Dieu qui, décidément, ne cesse de nous étonner, ne cesse de se révéler, et en qui nous allons maintenant réaffirmer notre foi, notre confiance, en disant ensemble « je crois ! ».
Amen !

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