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27° dimanche du Temps Ordinaire
 

        Lorsque nous lisons des textes de la Bible, nous accueillons dans la foi une Parole d’origine divine. Cependant, Dieu ne dicte pas sa parole à un secrétaire qui ne ferait que prêter sa main pour écrire. Dieu parle en passant par notre sensibilité humaine, par l’époque et la culture de celles et ceux qui écrivent sous l’inspiration de l’Esprit. En ce sens, Dieu respecte infiniment là où nous en sommes, quand il s’adresse à son peuple.
        Cette clé de lecture est bien nécessaire pour entrer dans les textes de la liturgie de ce jour.
Dans le texte de la Genèse, surtout, ne cherchons pas une réponse à la question : « comment le commencement du monde et l’existence de l’homme, de la femme se sont-ils passés ? », mais « pourquoi le monde, l’homme et la femme furent-ils créés ? ». Il s’agit bien de distinguer le comment de la science du pourquoi de la foi. D’ailleurs, la Genèse nous livre deux récits de la création, deux récits différents en terme de « comment », preuve qu’il ne s’agit pas d’un discours scientifique avant l’heure, mais de deux manières complémentaires de révéler le « pourquoi ».
        Ceci étant, quand il est écrit que les bêtes des champs et les oiseaux de la terre sont modelés avec de la terre, cela ne contredit pas le processus de l’évolution, puisque toute la matière vivante est formée d’atomes de notre planète Terre.  En hébreu, Adam signifie d’ailleurs « celui qui vient de la terre ».
        Ce récit a un sens symbolique. Un récit symbolique ouvre un sens profond que Dieu veut nous communiquer. Symbole ne s’oppose pas à vérité : le sens éthymologique de symbole, en grec syn-ballein, est « mettre avec, expliquer ». Il s’agit donc de rendre compte d’une vérité.
       
        Notre 1ère lecture nous livre deux vérités. La 1ère est la suivante. Comme Dieu, l’être humain créé à son image et à sa ressemblance, nomme toute chose. Nous cherchons à donner sens à ce qui nous entoure. Ainsi, nous poursuivons l’œuvre de création que Dieu a initiée. La seconde vérité est la suivante : comme Dieu, qui existe depuis toujours en relation avec le Fils et l’Esprit, l’être humain ne peut pas rester seul, il existe quand il est en relation. C’est ici qu’intervient la « première anesthésie de l’histoire », ce fameux sommeil mystérieux, au cours duquel la femme est née de la côte d’Adam. En fait, quand on lit le récit en hébreu, langue d’origine, il ne s’agit pas vraiment d’une naissance à partir d’une côte au sens de l’os, mais d’une naissance de la femme d’un côté de l’homme. Autrement dit, Dieu crée l’homme et la femme côte à côte, telle une nouvelle création à deux, une création qu’ils sont appelés à poursuivre au cours de leur vie.
        L’homme et la femme forment une seule chair, nous dit la Genèse. C’est sur cette affirmation divine que Jésus s’appuie, lorsque les intellectuels de son temps cherchent à le piéger.


        En effet, à l’époque de Jésus, dans la loi juive, un homme pouvait librement répudier sa femme (mais pas l’inverse !). Il suffisait d’un écrit la déclarant comme n’étant plus sa femme, sans justification. Tout était réglé par un processus juridique. La Parole divine fondatrice était oubliée.
        Jésus ne fait que rappeler cette Parole, en l’explicitant : Dieu a uni l’homme et la femme en une seule chair, pour continuer l’œuvre de la création. C’est pour cela que l’homme et la femme sont invités à ne pas séparer ce que Dieu a uni, car leur œuvre est sacrée. Ils sont invités à vivre selon le projet d’amour de Dieu, de se donner, de se recevoir, dans la confiance et la fidélité.
        C’est aussi le sens de l’épisode final de l’évangile, où Jésus accueille les enfants. Jésus nous  invite ainsi à accueillir ce projet de Dieu, comme un enfant accueille dans la confiance. N’y voyons donc pas une scène naïve, mais une invitation à l’ouverture, à la disponibilité, à la confiance.
        Cependant, nous savons bien qu’il peut y avoir, dans nos vies humaines, l’échec et la séparation. Une situation que Dieu a souhaitée bonne n’a pas pu s’accomplir pour toujours, entre telle et telle personne. D’une certaine manière, cela reste une blessure, même si une nouvelle union a pu naître. Nous savons que la fragilité de nos relations, et pas seulement conjugales, fait partie de nos grandes souffrances. C’est une réalité qui nous touche parfois de très près. L’Eglise y consacre deux synodes, sur la famille, dont le second qui vient de s’ouvrir ce samedi.
Dieu n’est pas indifférent à ces souffrances, à ces ruptures. En juillet dernier, notre évêque, le Père Dominique, a invité les personnes divorcées vivant une nouvelle union. Dans son invitation, il leur écrivait : « Je vous invite. J’aimerais vivre avec vous une belle célébration autour de l’évangile de Jésus. Nous rendrons grâce à Dieu pour tout ce qui est beau dans votre vie actuelle, y compris au sein de votre nouvelle union. Nous accueillerons la bénédiction du Seigneur. Confiant dans la miséricorde de Dieu, nous pourrons aussi demander pardon pour ce qui obscurcit notre chemin de vie, de foi et d’amour ».
        Dieu s’est fait homme en la personne de Jésus pour nous communiquer cette miséricorde, qui consiste à laisser en soi-même une place à l’autre. Et comme nous le rappelle la 2ème lecture, l’incarnation de Dieu en Jésus fut terrible à vivre, car lui aussi a fait l’expérience de la rupture de l’amitié et de la relation (pensons à Pierre qui nia le connaître…).
        Mais la résurrection a transformé ce chemin. Le Christ ressuscité soulève le monde, nos ruptures, nos échecs et nos souffrances telles que nous les vivons.
Lorsque le prêtre soulèvera la patène avec l’hostie consacrée corps du Christ, lorsque le diacre soulèvera la coupe de vin consacrée sang du Christ, quelle que soit notre situation, avec nos joies et nos souffrances, laissons-nous saisir par Dieu comme membres d’une même famille, en frères et sœurs du ressuscité.

Christophe DONNET, Diacre permanent
Le 4 octobre 2015
Paroisse St Benoît – Diocèse de Saint-Etienne


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