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14° dimanche du Temps Ordinaire


Nous venons d'entendre et d'écouter des textes de la bible, Parole de Dieu, et de quoi nous parlent ces textes ? De la Parole elle-même et de ceux qui l'écoutent! De la force et de la puissance de cette Parole qui vient interpeller, prendre et habiter ceux qui la reconnaissent comme une parole vraie et authentique. Parole qui s'adresse à tous, mais d'abord, à ceux qui acceptent et reconnaissent que ce Père attentionné, ce Dieu d'amour, leur parle pour vivre avec eux la joie promise. Une Parole qui ne s'impose pas comme une contrainte mais qui, dans la liberté de la personne à qui elle s'adresse, lui propose un chemin, chemin de vérité et d'accomplissement. Une parole qui, si nous la partageons, si nous la donnons, si nous la proclamons, nous fait être prophète.
Un prophète…un prophète n'est ni un devin, ni un mage, ni même un voyant, non, c'est une personne qui, après s'être approprié la Parole pour mieux la partager, la redonne à ses frères humains. Une Parole qu'il respecte et reconnaît comme venant de Dieu, de son Esprit à l'œuvre en ce monde, une marque de l'attention de notre Père. Une parole qui guide, qui guérit et qui sauve. Combien de fois dans les évangiles entend-on Jésus, verbe de Dieu, Parole du Père affirmer : " Va, ta foi t'a sauvé." Alors pourquoi aujourd'hui dit-il qu'un prophète n'est méprisé que dans sa famille, dans son pays? Son message, celui d'Ézékiel ou celui de Paul sont-ils si incompréhensibles ?
Ézékiel envoyé vers les hébreux exilés au milieu des païens dit, au nom du Seigneur, à ce "peuple rebelle" que, bien qu'ils aient trahis l'Alliance conclue avec eux, il ne les renie pas et continue à les aimer en leur parlant par l'homme qu'il a désigné. Paul, lui, est accablé de voir la dérive du message évangélique, ce message reçu du Christ, dans l'Église qu'il a fondée et qui réfute son autorité. Jésus lui-même qui enseigne dans la synagogue de Nazareth, sa ville, là où il a grandi, où il vit, est en butte avec ses détracteurs et reste impuissant. Pourtant, rien d'incompréhensible dans leur message, rien de trop exigeant ni de déroutant! Mais le doute des auditeurs est plus fort que leur espérance, la défiance domine sur la confiance.
La parole donnée est sans doute trop radicale, trop vraie, trop absolue mais surtout on doute de l'intégrité de la personne qui la donne : "nous le connaissons, lui, sa famille, il est de chez nous…" Comment peut-il affirmer que ce qu'il nous dit vient de Dieu? Comment pouvons-nous accepter que, celui qui nous ressemble, qui vit à nos côtés, que nous connaissons depuis toujours, est celui que Dieu a choisi pour nous dire sa vérité, pour nous dire qu'il nous aime ?
Orgueil ou humilité, révolte ou patience, doute ou confiance, foi ou reniement… un combat pour chaque croyant d'autant plus criant, dérangeant qu'il est dévoilé par celui que l'on pensait tellement semblable à nous, identique en tous points même dans nos limites et notre faiblesse humaine ! Si seulement il était différent, si seulement il venait d'ailleurs…
Cette parole ne nous est-elle pas adressée ? À nous qui, par notre baptême avons reçu cette triple mission d'être prêtre, roi et prophète ? Prêtre pour prier et célébrer notre Dieu, Roi pour, à l'image de Jésus, vivre par amour une charité fraternelle, je suis d'accord! Mais prophète? Moi qui a tant de doutes, moi que personne n'écoute vraiment, qui ne sais jamais quoi répondre ? Et pourtant, c'est bien chacun de nous que Dieu, par le baptême, fait prophète.
Les parents ou grands parents se disent : pourtant nous leur avons parlé de Dieu et de Jésus. Où sont-ils nos enfants maintenant? Les catéchistes s'attristent de ne plus voir à leurs côté ceux qu'ils ont si longtemps accompagnés. Bien des chrétiens désespèrent et doutent de leur mission prophétique par manque de retour, de retombées. Nous ne sommes sans doute pas envoyés que vers ceux qui nous sont proches, ceux vers qui notre cœur se tourne en premier. Jésus lui-même le constate "un prophète n'est méprisé que dans son pays, sa famille, sa propre maison.".
Être prophète, c'est dire la Parole de Dieu et la partager. Être prophète c'est donc dire l'amour de Dieu pour l'homme, pour chaque femme, chaque homme, chaque enfant. Ça passe par des mots, sans doute… mais aussi par des gestes : les actes de notre vie, à chaque instant de nos vies. Comme Jésus nous parle de l'amour de note Père dans les gestes qu'il pose pour soulager, guérir ou sauver, c'est humblement mais avec conviction que nous avons à prophétiser cet amour au milieu du monde. Dans des gestes de solidarité posés, gratuitement et par amour, auprès de chaque personne rencontrée, paroles et actes de paix, d'amour fraternel fruits que l'Esprit nous a donnés de faire nôtres.
Être prophète, c'est aussi faire confiance à Celui qui nous a fait prophète, à son Esprit ! Avons-nous l'audace de croire profondément que l'Esprit de Jésus nous inspire quand nous parlons de lui et que nous partageons son message ? Avons-nous l'humilité et la confiance de laisser travailler l'humus où nous déposons la graine de sa Parole ? Avons-nous la patience de l'entretenir délicatement, secrètement, en attendant que germe l'herbe et que gonfle l'épi ? Le jardin de Dieu, le temps de Dieu, ne sont pas ceux des hommes ! Refusons l'orgueil de se dire, je l'ai fait… mais semons, semons, n'arrêtons pas de semer la Parole et l'amour de Dieu dans nos actes, dans nos vies. Soyons présents et acteurs mais laissons l'Esprit du Christ agir pour que pousse et grandisse la graine de la foi. Cela ne nous appartient plus ! C'est un chemin que la personne, enfant, frère, voisin, catéchumène, fait avec son frère Jésus. Nous pouvons tout de même apporter notre humble et discrète contribution dans le respect de sa liberté, en l'accompagnant par une prière fervente, confiante et joyeuse. En demandant à ce Père aimant qu'il mette sur sa route d'autres prophètes, inspirés par son Esprit, qui sauront lui faire entendre la parole d'amour qui réchauffe, qui guide, qui sauve et qui envoie vers d'autres hommes.



Patrick DOUEZ, diacre permanent.
8 juillet 2012

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