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« Pitié pour nous, Seigneur, pitié pour nous : notre âme est rassasiée de mépris. C’en est trop. Nous sommes rassasiés du mépris des orgueilleux. » Ce cri – qui constitue la troisième strophe du psaume 122 que nous venons de chanter – ce cri, c’est celui des Israélites revenant à Jérusalem, après un exil de plusieurs générations déportées à Babylone. En retrouvant leur terre, ils trouvent aussi un autre peuple installé à leur place, et un temple dévasté, détruit. Et ces israélites de retour n’étaient pas les bienvenus, on le comprend. Ils ont été perçus comme des étrangers sur leur propre sol. Leur première urgence était de rebâtir le temple, mais ils se sont heurtés à l’incompréhension et la réprobation des nouveaux habitants.
Ce cri aurait aussi pu être celui d’Ezechiel, prophète parmi ce peuple exilé à Babylone, et dont la première lecture nous raconte comment Dieu l’a appelé. Prophète envoyé par Dieu vers ce peuple au « visage dur » et au « cœur obstiné », « engence de rebelles ». Mais « qu’ils écoutent ou qu’ils refusent, ils sauront qu’il y a un prophète parmi eux ». Personne n’est obligé de croire, mais le message doit être proclamé et entendu, envers et contre tout, même au prix de l’incompréhension, de l’hostilité, de la persécution. Et le prophète connaîtra cette incompréhension, cette hostilité de son propre peuple, et la persécution.
« Pitié pour nous, Seigneur, pitié pour nous : notre âme est rassasiée de mépris. C’en est trop. Nous sommes rassasiés du mépris des orgueilleux. » Ce cri aurait aussi pu être celui de St Paul, qui écrivait aux Chrétiens de Corinthe : « j’accepte de grand cœur, pour le Christ, les faiblesses, les insultes, les contraintes, les persécutions et les situations angoissantes. »
Et Jésus, lui aussi, a dû méditer ce psaume et faire sien ce cri vers Dieu, tant on voit dans ce passage que St Marc nous rapporte, dans quel contexte Jésus a dû annoncer la venue du Royaume de Dieu, dans l’incrédulité ambiante, voire l’hostilité.
Ce cri, c’est encore celui qui monte des cœurs de tous ceux qui sont persécutés pour leur foi en Jésus Christ, tout au long des siècles, et encore aujourd’hui. En Irak, au Liban, au Pakistan, en Afghanistan, en Chine, au Vietnam, en Corée du Nord, en Arabie Saoudite, mais hélas aussi dans beaucoup d’autres pays, et tout particulièrement, en ce moment, en Inde, les Chrétiens vivent une situation dramatique, à cause de leur foi. Leurs églises sont régulièrement incendiées, leurs prêtres menacés, parfois assassinés ; leurs villages soumis à des pressions mafieuses qui les contraignent à renier leur foi ou à partir, à s’exiler dans des camps de réfugiés à l’intérieur même de leur propre pays.
« Pitié pour nous, Seigneur, pitié pour nous : notre âme est rassasiée de mépris. C’en est trop. Nous sommes rassasiés du mépris des orgueilleux. » Ce cri est enfin celui que certains d’entre nous ont senti monter en eux, voici quelques semaines, à l’occasion du festival Hellfest qui s’est tenu à Clisson. Même s’il ne s’agit pas de diaboliser ce festival, on ne peut pas faire semblant d’ignorer que beaucoup de paroles de chansons qui ont été jouées pendant ce week-end de juin sont blessantes pour nous, chrétiens. Parce que ces paroles se moquent de nos convictions ; parce qu’elles sont irrespectueuses envers Dieu et ceux qui ont foi en lui. Parce que certaines d’entre elles prônent la violence en général, et la haine envers  les Chrétiens en particulier. Oui, « notre âme est rassasiée de mépris. »

Mais les textes de ce jour, s’ils se font tous l’écho d’une ambiance défavorable, d’un contexte difficile dans lesquels les croyants ont à témoigner, sont aussi des textes pleins d’espérance : Ainsi dans la première lecture, Ezéchiel raconte l’appel de Dieu sur lui en commençant par ces mots : « L’Esprit vint en moi, il me fit mettre debout » ! l’esprit me fit mettre debout… N’est-ce pas le propre de l’Esprit Saint de faire se lever l’homme qui croit en lui ? de remettre debout celui dont la vie est brisée à cause du malheur qui s’abat sur lui ?  De redonner sa dignité à celui qui subit le mépris de ses semblables ? L’apôtre Paul s’appuie lui aussi sur cette conviction, lorsqu’il écrit qu’il « accepte de grand cœur, pour le Christ, les insultes, les persécutions,… » Car, dit-il, « lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. » Voilà quelle est notre espérance rappelée dans ces textes d’aujourd’hui. Elle tient dans cette phrase de St Paul : Le Seigneur m’a déclaré : « Ma grâce te suffit. Ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ».
En effet, c’est dans l’humilité que l’Esprit Saint de Dieu peut le mieux manifester sa puissance. Dans celui qui se reconnaît faible, petit, pauvre. Car le fort n’a pas besoin de la force de Dieu ; le puissant n’a pas besoin de la puissance de l’Esprit ; celui qui est riche de tout n’a pas besoin des richesses que le Christ propose à ceux qui le suivent. Et c’est pourquoi, dans ce passage de l’Evangile de Marc, Jésus ne pouvait accomplir aucun miracle dans son pays : les gens ne croyaient pas en lui. Ils le connaissaient trop, comme on peut connaître à la manière humaine, Comment croire qu’il est fils de Dieu, celui dont on sait depuis son enfance qu’il est fils de Joseph et de Marie ? Comment pourrait-il être un prophète, celui qui, quelques mois auparavant, travaillait encore le bois dans l’atelier du charpentier de Nazareth ? Connaître à la manière humaine, c’est connaître selon la chair, selon les apparences. Ce que Jésus attend de nous, c’est de le connaître selon l’Esprit. Ce manque de foi des proches de Jésus les empêche de s’ouvrir à l’Esprit. St Marc écrit : « Et là, il ne pouvait accomplir aucun miracle : il guérit seulement quelques malades. » Il y a bien guérison, mais ces guérisons ne peuvent être appelées miracles, puisque qu’un miracle est un signe adressé à des croyants. Or, les gens présents ne sont pas croyants. Ils voient selon  la chair : ils peuvent constater la guérison. Mais ils ne voient pas selon l’Esprit : Ils ne comprennent pas la portée spirituelle de la guérison. Alors Jésus, au lieu de s’acharner à essayer de convaincre, laisse chacun libre de ses convictions. Il préfère s’en aller dans d’autres villages, et poursuivre sa mission, tout en s’étonnant du manque de foi des gens.
Frères et sœurs, contentons-nous, nous aussi, de nous étonner du manque de foi de nos contemporains. Mais que cela ne nous empêche pas pour autant de poser des actes de salut, de guérison, autour de nous. Il y a mille manières de le faire. Si nous agissons ainsi au nom du Christ Jésus, alors nous aussi nous serons prêts à supporter « les insultes, les persécutions, les situations angoissantes. » Car, lorsque nous sommes faibles, c’est alors que nous sommes forts.

Amen !


Daniel BICHET, diacre permanent.
5 juillet 2009

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