Fête de la Sainte Famille
Homélie de la fête de la Sainte Famille - 30 décembre 2007
Noël
a sans doute été, pour beaucoup d’entre nous, un moment privilégié pour
se retrouver en famille et il est heureux que l’Eglise ait choisi le
dimanche qui suit cette fête pour célébrer la Sainte Famille.
La
Sainte famille ! Cela évoque forcément quelque chose pour nous qui
avons reçu une éducation chrétienne . Nous avons tous en mémoire,
des images, des tableaux, des sculptures et bien sûr des crèches qui
représentent Jésus entouré de ses parents, Marie et Joseph. Pourtant,
on connaît finalement assez peu de choses sur elle, en dehors des brefs
épisodes tournant autour de la naissance de Jésus.
Si les deux
premières lectures parlent bien des vertus familiales et nous éclairent
sur la façon de vivre ensemble, elles peuvent nous déconcerter quelque
peu, par des formulations qui évoquent avant tout l’autorité, le
respect, voire même la soumission. Cette phrase de saint Paul
« Vous les femmes, soyez soumises à votre mari » prise au
premier degré est choquante si on n’a pas idée de ce qu’était le
concept familial de l’époque. Et, la page d’Evangile que nous
venons d’entendre, ne cherche pas à nous donner un modèle
« type » de famille ou de vie familiale valable pour tous les
temps et tous les pays. Heureusement d’ailleurs, car les conditions ont
beaucoup changé depuis deux mille ans.
Aussi, prendre exemple
sur la famille de Nazareth paraît à première vue bien difficile
et le message de l’Evangile d’aujourd’hui est manifestement ailleurs.
Le
récit est tissé d’allusions bibliques. On peut se souvenir des songes
de Jacob avant son départ pour l’Egypte (Gn 46, 2-4), de la sortie
d’Egypte et du retour du peuple en Israël sous la conduite de Moïse
(Ex).. Le lecteur de l’évangile comprend que Jésus récapitule
l’histoire de son peuple et qu’avec lui Dieu écrit une page nouvelle et
décisive de l’histoire sainte. Par leur accueil de la Parole de Dieu,
Joseph et Marie collaborent à ce projet de Dieu. C’est en cela qu’ils
sont une Sainte Famille.
En tout cas, ce n’est pas parce que
nous appelons la famille de Jésus « la Sainte Famille » que
tout a été facile pour elle, bien au contraire. Matthieu nous la
présente comme une petite famille en situation précaire et fortement
éprouvée. Regardez la crèche : Marie et Joseph n’ont même pas pu
avoir un logement décent pour la naissance de Jésus ! Plus grave
encore : la vie de l’enfant Jésus a été menacée très tôt ses
parents ont dû s’exiler pour la protéger : "Lève-toi ; prends
l'enfant et sa mère, et fuis en Egypte ! "
En Egypte, Jésus
vivra dans la condition d'un gosse de réfugiés. Il connaîtra dans sa
chair les difficultés et les épreuves des pauvres et des opprimés, avec
lesquels il s’identifiera toujours. Et Marie et Joseph vivront dans la
condition extrêmement difficile de tous les réfugiés politiques, sans
savoir combien de temps ils devront demeurer dans ce pays, dans cette
terre païenne où la langue, les cultures ne ressemblent pas aux
traditions du peuple juif.
Ce drame familial est pour nous un
message. Ce qu’a dû vivre la sainte famille ressemble à ce que vivent
encore malheureusement, de nos jours, beaucoup de familles. La fuite en
Egypte nous fait nécessairement penser à toutes ces familles qui,
aujourd’hui encore sont contraintes de quitter leur pays pour fuir les
conflits et la guerre ou, tout simplement, la misère.
Il y a un peu plus d’un an, le Pape Benoît XVI déclarait :
« A
l’occasion de la prochaine Journée Mondiale des Migrants et des
Réfugiés, en contemplant la Sainte Famille de Nazareth, icône de toutes
les familles, je voudrais vous inviter à réfléchir sur la condition de
la famille migrante… "Dans le drame de la famille de Nazareth nous
percevons la douloureuse condition de tant de migrants, et plus
particulièrement les exilés, les réfugiés, les persécutés, les
déplacés. Reconnaissons en particulier les difficultés de la famille
migrante comme les privations, les humiliations et les fragilités".
Puis, il ajoutait :
En
plus d’une assistance capable d’apaiser les blessures du cœur, une
présence pastorale attentive est nécessaire pour offrir un soutien de
la part de la communauté chrétienne, capable de rétablir la culture du
respect et de faire redécouvrir la véritable valeur de l’amour. Il faut
encourager ceux qui sont détruits intérieurement à retrouver la
confiance en eux-mêmes. Il faut ensuite œuvrer pour que soient garantis
les droits et la dignité des familles et qu’un logement répondant à
leurs exigences leur soit assuré. Oui, le message évangélique rejoint
toutes les souffrances humaines » fin de citation
Ce que
l’évangile de ce jour veut nous révéler en premier, c’est, que Dieu n’a
pas fait semblant de prendre la condition humaine en la personne de
Jésus. Il s’est fait volontairement pauvre avec les pauvres, il a même
été mis au rang des assassins et mis à mort.
Mais, en
Jésus, il nous a ouvert un chemin d’espérance, celui du matin de
Pâques. Pâques qui est la fête des fêtes, celle qui donne sens à tout
le reste.
Ce chemin ouvert par Jésus est celui de l’amour,
l’amour plus fort que la mort. En donnant sa vie pour nous, Jésus a
montré qu'il est possible pour l'homme de vivre de l'amour et là nous
rejoignons bien le cœur de la vie familiale car, la famille est le lieu
privilégié où on apprend à donner et à recevoir l'amour.
L’apôtre
Paul dans un des passages de sa lettre aux Colossiens que nous venons
d’entendre nous dit très clairement dans quelles dispositions nous
devons être pour emprunter le chemin ouvert par Jésus :
« Revêtez votre coeur de tendresse et de bonté, d'humilité, de
douceur, de patience. Supportez-vous mutuellement, et pardonnez si vous
avez des reproches à vous faire. Agissez comme le Seigneur : il vous a
pardonné, faites de même. Par-dessus tout cela, qu'il y ait l'amour:
c'est lui qui fait l'unité dans la perfection. »
Et
si nos réalités familiales ou communautaires ne correspondent pas
vraiment à cela, ne nous décourageons pas, gardons confiance. Nos
familles, nous en faisons tous l’expérience, sont tissées de bonheurs
bien sûr mais aussi parfois de souffrances. Accueillons-nous, les uns
les autres, tels que nous sommes dans l'humilité de nos réalités, sans
jugements, sans autre souci que de nous aider, les uns les autres, à
grandir dans l’amour.
Nous allons entrer dans une nouvelle
année. Que les vœux que nous échangerons dans nos familles et dans
notre communauté paroissiale ne soient pas une simple formalité mais
qu’ils soient vraiment imprégnés de ce message d’amour, tel qu’il a dû
être vécu au quotidien par Jésus, Marie et Joseph, la Sainte Famille.
André ROUL, diacre permanent
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