8° dimanche du Temps Ordinaire.
Depuis
quelques dimanches nous lisons le discours de Jésus sur la
montagne : des pages difficiles à entendre comme dimanche dernier
où Jésus nous demandait d’aimer nos ennemis et voilà qu’aujourd’hui il
nous demande de choisir entre 2 maîtres Dieu et l’argent !
Voilà
encore des paroles dures pour nos oreilles. Qu’on écoute peut-être avec
un sourire amer… Comment est-il possible d’accueillir ces mots répétées
4 fois : « Ne vous faîtes pas tant de souci » N’est-ce
pas même indécent vis à vis des plus démunis de notre société, qui
vivent en grande précarité, quand la vie chère, les fins de mois, la
petite retraite, le RSA ou le chômage nous empêche de dormir.
Dites donc cela à celui qui ne trouve pas de travail, n’a plus de
logement, ne peut plus nourrir sa famille, se soigner ou prendre des
loisirs ? il va vous rire au nez ou vous prendre pour un illuminé…
sorti de la réalité quotidienne si vous lui dites en plus que Jésus
l’invite à vivre à la manière des oiseaux du ciel qui ne sèment ni ne
moissonnent ? Une mauvaise compréhension de la pensée de Jésus
serait vraiment une insulte aux pauvres.
Pourtant les 1ères phrases
nous livrent peut-être la clé : « vous ne pouvez à la fois
servir Dieu et l’argent » : le verbe servir qui s’appliquait
aux esclaves, l’Argent (avec majuscule) le dieu argent Mammon auquel on
s’asservit et puis maître quelquechose qui nous domine. Illusion de
vouloir servir 2 maîtres : si je m’attache à l’argent, je méprise
Dieu et les autres, car l’argent devient alors mon Dieu. Il faut donc
choisir un principe de conduite, Dieu nous invite à ne pas nous tromper
de priorité... de qui suis-je serviteur ?
Que nous
possédions de l’argent, des biens, rien de plus normal ; mais
c’est d’en être possédé qu’il faut éviter à tout prix. C’est notre
relation à l’argent qui est mise en cause. Vous les parents vous vous
faîtes du souci pour la vie quotidienne de vos enfants : la
nourriture, les vêtements, les études; et pour faire les courses il en
faut de l’argent ! Jésus qui a eu un métier à Nazareth, gagné sa
vie à la sueur de son front, ne condamne pas le fait d’avoir de
l’argent mais l’asservissement à l’argent. Mise en garde d’une
actualité brûlante, dans une société d’abondance qui conduit à
consommer du superflu, du gadget, dans un monde de + en + régi par la
finance (spéculation délirante, subprime, enrichissement personnel,
fraude fiscale, scandales financiers, corruption…); un monde qui ne
pense que croissance, qu’il faut poursuivre sans cesse comme un but
sacré, sous peine d’hérésie selon le canon de la société marchande,
toujours plus de productivité, de profit. La rentabilité passe avant le
souci du bien des personnes. La sagesse populaire dit bien que l’argent
est un bon serviteur mais un mauvais maître. Il ne peut à lui seul nous
assurer l’avenir ni le vrai bonheur quand le Seigneur nous attend dans
la gratuité et le don de notre temps. Un jour viendra où il nous faudra
bien tout laisser… !!
Jésus et l’Église nous rappelle
régulièrement cette nécessité d’une libération intérieure :
« ne vous faites donc pas tant de souci », une façon de nous
dire : ne perdez pas votre temps et votre sommeil à trop vous
inquiéter des choses matérielles et ce qui n’en vaut pas la peine. Il
serait tout aussi dangereux de lire ici un éloge de la paresse. Chaque
homme, chacun de nous est un collaborateur de Dieu et son travail
consiste à bien gérer les richesses qu’il lui confie, à mettre en œuvre
nos talents, faire fructifier les dons reçus, mettre nos têtes et nos
bras à l’organisation d’un monde plus juste en vue du bien et du
bonheur de tous. Et parmi nos talents, est-ce qu’il n’y a pas aussi
ceux reçus à notre baptême, qui nous invitent à grandir dans la foi, la
confiance et pas seulement dans l’opulence ?
Regardez les
oiseaux qui ne sèment ni ne moissonnent et les lys des champs qui ne
peinent ni ne filent Cette image ne nous fait-elle pas grand bien à
nous qui menons une vie de dingue avec notre maladie du rendement, nos
infarctus, nos AVC, tensions nerveuses, angoisses dus à nos soucis
souvent exagérés - bien que certains soucis viennent de l’amour porté à
nos proches dont on a la responsabilité (enfants, parents âgés), des
soucis dont on a pas le droit de se débarrasser, ce serait le signe
d’un monstrueux égoïsme -... Ces nuances étant mises, comment ne pas
admettre que le monde moderne occidental, dans son ensemble, est très
fiévreux. Si Dieu est plein de sollicitudes pour les oiseaux et les lys
des champs, ne fera-t-il pas bien plus pour nous ? Nous
savons qu’Il ne nous abandonnera pas : car « nos cheveux
mêmes sont comptés ». Notre attitude de chrétien n’est-ce pas de
vivre dans la confiance, l’ouverture à la vie, à surtout privilégier
l’ETRE avant l’AVOIR…
Jésus semble nous dire prenez donc la vie du
bon côté. Au lieu de passer votre temps à courir, à gagner de l’argent,
« à travailler plus pour gagner plus » prenez de temps en
temps le temps de vivre ! ! la détente, la contemplation de
la nature…si nécessaire dans notre monde désaxé…
Le texte finit par
une maxime assez répandue : ne vous faîtes pas tant de souci
pour demain ; demain se souciera de lui-même ; à chaque jour
suffit sa peine. Voilà de quoi nous décontracter, nous déstresser
nous si inquiets de demain ! !
Et puis, vous, nous les
parents n’avons-nous pas dit bien des fois à nos enfants :
« fais-moi confiance, crois-moi ». Et bien c’est exactement
ce que Dieu nous dit ce matin (ce soir) N’est-il pas un père et une
mère pour chacun de nous ?
François CORBINEAU, diacre permanent.
26-27 Février 2011
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