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6° dimanche du Temps Ordinaire.

Mt 5, 17-37

Quelle joie d’être aujourd’hui ici avec vous, en cette église St Vincent de Paul pour ce qui restera, quoi qu’il advienne, la 1ère messe au cours de laquelle j’aurai servi comme diacre.
Quelle joie, et quel trac aussi, au moment de prononcer ma toute 1ère homélie ! Car, même s’il s’agit ici de la Parole de Dieu et non de la performance du prédicateur, il n’en reste pas moins que comme le disait ma grand-mère, on n’a pas 2 fois l’occasion de faire une 1ère bonne impression !
Aussi, cela fait plusieurs jours, et même plusieurs semaines, que je médite sur ce texte de l’Evangile selon St Mathieu.
Et ce texte, quel texte ! Qu’elle peut être dure, la parole de Dieu ! Il y est question d’œil arraché, d’amputation de la main, de géhenne de feu pour y brûler vif… Quand on se rappelle qu’en grec Evangile signifie « Bonne nouvelle », là, subitement, en s’arrêtant à une 1ère lecture, on peut avoir des doutes !
Mais l’Evangile est comme un excellent vin. Il faut le faire tourner longuement en bouche, et dans le cœur, pour en apprécier l’infinie saveur. Et en laissant tourner ce texte, en le dégustant, on en perçoit peu à peu la rondeur, la longueur, le retour…
J’ai aussi réalisé à quel point il m’évoque le ministère diaconal, tel que je le perçois en ce moment où je viens de recevoir le sacrement de l’ordination.
Le 1er point qui m’interpelle est le lien qui est fait entre la Loi et la Foi. On a tous en tête cette expression qui dit de quelqu’un qui ne respecte rien ni personne, qu’il est « sans foi ni loi ». Le dicton fait, bien justement, le lien entre les 2, et souligne que le pire, en somme, est de n’avoir ni l’un, ni l’autre. Une autre tentation, que l’on trouve dans l’histoire, et encore aujourd’hui, est celle de contester la Loi des Hommes au nom de sa Foi en Dieu. C’est ce que les fondamentalismes de toutes sortes nous montrent, et l’on en sait les dangers. Dans ce texte d’Evangile, Jésus dit clairement qu’il n’est pas venu abolir la Loi, mais bien l’accomplir. Il nous rappelle ainsi que Loi et Foi ne s’opposent pas mais sont indissociablement reliées. La Loi, c’est ce que j’accepte comme ligne de conduite, comme règle de vie. C’est visible, c’est concret, et il n’est pas évident d’en discuter le bien-fondé humain. Ne pas tuer, ne pas voler, ne pas convoiter la femme de son voisin, on est tous d’accord pour dire que c’est plus raisonnable. La Foi, cela va au-delà. C’est ce en quoi je crois, au-delà de toute raison, de toute objectivité. C’est un engagement, ça dépasse le « raisonnable ». La Foi permet d’accomplir la loi ; respecter la loi « à la lettre » ne suffit pas, encore faut-il en vivre l’Esprit, c’est-à-dire avoir la foi. C’est une sorte de double lien entre Dieu et les Hommes, un double sens entre Ciel et Terre. La Loi de Dieu, pour les Hommes, elle nous vient du Ciel. C’est Dieu qui l’a dictée à Moïse, dans les 10 commandements, pour qu’elle soit transmise aux Hommes, et appliquée. La Foi des Hommes, elle doit monter de la terre vers le Ciel. C’est la confiance des Hommes en Dieu, la reconnaissance que ce que nous vivons, nous le devons au cadeau de Dieu fait aux Hommes : La Vie et son Amour inconditionnel. Le ministère du diacre est souvent appelé « ministère du lien ». Faire lien entre Loi et Foi, tous deux aussi importants dans la vie chrétienne, je vois là un des enjeux de mon ministère.

Le 2ème point qui me parle, pour ce ministère de diacre, mais qui parle à tout baptisé, est celui de la manière dont Jésus nous invite à vivre ce lien entre Loi et Foi. A mettre nos actes humains en cohérence avec notre Foi en Dieu. Et ne pas oublier que la règle, la loi, aussi importante soit elle, n’est pas tout et surtout n’est pas l’essentiel. Il cite la justice des scribes et des pharisiens. Qui sont les scribes et les pharisiens ? Ce sont les tenants de la Loi, les gardiens de la Loi ! En toute chose, ils appliquent la Loi à la lettre. Jésus ne dit pas de faire différemment d’eux, il nous dit d’aller au-delà « si votre justice ne dépasse pas la leur, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux… » Mettre ses actes en cohérence avec sa foi (aller au-delà de la Loi), voilà un vrai engagement pour le diacre tout récemment ordonné que je suis, mais également pour toute personne qui se dit « chrétienne ». Ne pas se contenter d’appliquer quelques règles de bonne conduite, mais mettre sa vie en cohérence avec sa Foi, avec l’enseignement de Jésus, et donc l’exemple qu’il nous a donné. Cela doit se tra-duire par ce que l’on fait, ce que l’on dit, ce que l’on est. C’est un chemin de grande exigence, c’est un vrai projet de vie, Un vrai parcours de Foi.

Le 3ème point est dans la fin de cet Evangile. Cette phrase aussi simple que définitive : « Que votre parole soit ‘oui’, si c’est ‘oui’,‘ non’, si c’est ‘non’. ». (On peut se dire que pour les normands, ça va être difficile…) On ne tergiverse pas dans l’engagement que l’on prend avec Dieu. On ne pratique pas la demi-mesure. On s’engage, corps et âme. C’est un engagement total, celui du cœur, de l’âme, pas uniquement celui du « contrat ». Lorsqu’on dit « oui » le jour de son mariage, lorsque j’ai dit oui hier lors de mon ordination, on prononce un oui qui s’engage à ne pas revenir en arrière. Le oui que l’on partage avec Dieu est une promesse d’éternité, un serment de fidélité. On a beau avoir « signé », telle que les règles le demandent, si on veut tenir, et ne pas se renier, on a besoin d’une aide qui va au-delà des lois. L’aide de la confiance, l’aide de la Foi. Hier, en disant « Oui » à l’Evêque qui me demandait « Voulez-vous être consacrés à la diaconie de l'Église, accomplir votre fonction de diacre avec charité et simplicité, conformer toute votre vie à l'exemple du Christ ? », j’avais en tête 2 choses qui m’ont fait répondre « oui » avec assurance : La 1ère, c’est la certitude que Dieu, en qui je mets ma Foi, m’aidera chaque jour à tenir ce oui. Et la 2nde, c’est l’assurance que vous, ma famille, mes amis, ma communauté paroissiale, vous serez avec moi témoin de ce oui et que nous le porterons ensemble pour qu’il soit, en chaque instant, un acte de Foi en celui qui nous donne son Amour inconditionnel.
Que cet Amour infini de Dieu mette chaque jour de la lumière en nos cœurs et qu’il nous aide à ne jamais perdre de vue l’essentiel de ce qui fait notre vie. Amen.

Olivier RABILLOUD, diacre permanent
le 16 février 2020
Rezé, église St Vincent de Paul,


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