Dimanche de la Parole + Unité des Chrétiens
3ème dimanche du temps ordinaire !
Temps
ordinaire ? En fait pas si ordinaire que çà, puisque cette Parole que
nous
venons d’entendre, c’est
aujourd’hui
qu’elle s’accomplit ! et que, de plus :
1.
c’est le dimanche de la « Parole
de
Dieu », instauré par notre Pape François il y a 3 ans, et qui nous
dit aujourd’hui
: « le Royaume des Cieux est tout
proche !» Bonne
nouvelle non ?
2.
ce dimanche se situe au milieu de la semaine de prière pour l’Unité
des Chrétiens.
Découvrons
les richesses
que nous offrent les textes de la
Parole
que nous venons d’écouter :
Dans l’évangile, Matthieu nous présente le début
de la mission de Jésus, et, pour en donner le sens, il cite le prophète
Isaïe.
Pour le mettre en valeur, vous avez remarqué que la liturgie nous
proposait ce même
passage d’Isaïe comme première lecture. Encore faut-il que nous sachions
de
quoi il s'agit…
Il s'agit d'une période particulièrement
troublée de l'histoire d'Israël. Environ 700 ans avant Jésus, l'Assyrie
(en
gros, l'Irak actuel) vient d'envahir le Nord d'Israël (Zabulon,
Nephtali, bref,
la Galilée). Toute cette région est passée sous occupation des
Assyriens, une
partie de la population est déportée et remplacée par des « colons »
venus
d’ailleurs. C'est à cette époque que la Galilée va devenir la « Galilée
des nations » : un pays où les
races et les religions se côtoient, puis se mélangent.) C'est le pays où
vivra
Jésus et où il commencera sa mission.) Alors
que
ce pays est « dans les ténèbres
», le prophète Isaïe prophétise la fin de cette période trouble : il
annonce
une « lumière », une
espérance, donc,
une libération.
Eh bien, dit Matthieu, ce qui s'est passé il y a
sept siècles, ça recommence, mais infiniment mieux, avec Jésus. Non
seulement
pour la Galilée, mais pour toute l'humanité, à partir de la Galilée. Et
Matthieu dit l’œuvre de Jésus en termes de libération,
libération de tout homme et de tout l'homme !
Mais Jésus ne veut pas accomplir sa mission tout
seul. Dès l'annonce de la Bonne Nouvelle du Royaume, il va appeler des hommes à travailler avec lui : en premier lieu Pierre,
Jacques, André, Jean. Et ici, il faut faire attention à deux choses :
d'abord,
on risque d'avoir une fausse idée de ce qu'on appelle la « vocation ». La vocation, ce n'est pas une sélection, par Dieu, de
quelques-uns parmi les hommes ; la vocation, c'est pour tout le
monde :
chacun de nous est appelé ! Fausse
idée également de croire que
le Seigneur nous embauche comme un chef de chantier qui dit : « il me
faut dix
hommes ici » ou comme l'adjudant qui crie : « untel, de corvée... »… Ce
n'est
pas cela, la vocation ! Il nous laisse entièrement libres, et tout
au long
de l’Évangile il nous dit : « Si
tu
veux... », mais tu es libre ! La vocation, ce n'est
pas de
chercher à discerner quel serait le plan de Dieu sur notre vie comme une
route
toute tracée ; la vocation nous laisse entièrement libres et
responsa-bles
de nos actes, y compris la liberté de dire non, même après avoir dit
oui. Mais
si on le veut, nous dit Jésus, on peut marcher avec lui. Pour quoi faire
? Pour
être « pêcheurs d'hommes »…
et là
encore, il faut s'expliquer !
Cette image employée par Jésus pourrait sembler
vouloir dire : on va « piquer » des hommes pour les faire entrer dans
l’Église
comme dans une secte. Or, il ne s'agit absolument pas de cela dans le
propos du
Christ. Il ne s'agit pas de prendre, de posséder, d'avoir
quelqu'un ; il
ne s'agit pas de « pêcher », mais de
« re-pêcher ». Pour
comprendre
cela, il faut savoir que, contrairement aux Phéniciens et aux Grecs qui
ont
utilisé la mer pour faire du commerce et des conquêtes, le peuple juif
n'a
jamais été un peuple de marins : on avait peur de la mer. Pour eux, la
mer,
c'est le mal, le néant, le monde vide de sens, c'est la mort !
Quand Jésus
dit à Pierre et à ses camarades : « Vous serez pêcheurs d'hommes »,
cela
veut dire : « ces pauvres hommes, vous allez leur mettre la tête hors de
l'eau
pour qu'ils puissent respirer. » Autrement dit : « Vous allez les
sauver
des ténèbres, du malheur, de la mort ; vous allez, avec moi, leur
permettre d'exister ; vous allez les libérer. » Les hommes,
l'humanité
tout entière est en risque de mort, et vous allez les sauver !
Voilà l’œuvre entreprise : « le
Royaume des Cieux » qu'il vient
inaugurer. Il faut également bien s'entendre sur le mot « Royaume ». C'est vraiment
Dieu qui reprend le pouvoir, mais pas pour dominer ; pour que les hommes
puissent
enfin vivre ! Dieu vient dire, en Jésus : si vous le voulez, le mal
du
monde, ce n'est pas irrémédiable ! Vous y pouvez quelque chose,
avec Jésus, dans
les actes d’amour que vous posez ! Comprenons-le bien : nous sommes tous
appelés : les enfants, les jeunes, les adultes, à travailler,
dès
aujourd'hui, à ce Royaume ! …Une Bonne Nouvelle
au cœur de nos hivers, au cœur même de notre
monde déboussolé, en crise, déchiré, en guerre… qui a peur de l’avenir …
Alors me direz-vous mission impossible, c’est du
rêve tout ça ?
Avez-vous remarqué la transformation et le changement de vie auxquels se soumettent ceux
que Jésus appelle ? Pierre, André, Jacques et Jean quittent leur
mode de
vie antérieur pour un nouveau style de vie : ils laissent leurs
barques,
leurs filets, leur village et même leur père ! Arrêter de pêcher
des
poissons pour pêcher des hommes : c’est quand même pas une petite
affaire
d’être disciple de Jésus !
Aujourd’hui aussi ça ne se fait pas sans
difficultés, sans sacrifices…, mais il y a pourtant autour de nous des
gens
admirables, que nous connaissons, qui savent apporter autour
d’eux : joie
de vivre, enthousiasme, envie de bien faire. On en trouve dans la
paroisse,
dans les quartiers, dans les associations, au travail, et ils rendent la
vie
plus facile, plus heureuse… Ils sont des rêveurs efficaces et
agissent
pour créer ou recréer : la fraternité, la bonté, la justice, la liberté…
S’ils
écoutent en eux le murmure de l’espérance, c’est pour changer le monde par leur générosité et l’engagement du cœur…, à
côté d’eux, à la maison, au bureau ou à l’atelier, dans le voisinage…
par
exemple, en faisant attention à quelqu'un qui souffre, ou qui est
malade, ou
qui est malheureux… ou encore, beaucoup plus loin, dans un village
d’Afrique ou
d’Asie, en Ukraine ou en Palestine…
F&S, savons-nous nous émerveiller,
reconnaître,
dire merci pour toutes les belles choses qui s’accomplissent aujourd’hui
chez
nous, sur nos communes et partout dans le monde, pour autant de
générosité, de
disponibilité, de don de soi… ? Sommes-nous de ces hommes et ces
femmes
qui refusent le fatalisme de la violence, de l’indifférence et de la division
?
Or justement, nous sommes au cœur de la semaine
de prière pour l’unité des
Chrétiens
et c’est une Grâce de nous rapprocher petit à petit en remettant le
Christ au
centre… « Qu’il n’y ait pas de
divisions
entre vous » écrit St Paul à ses amis de Corinthe. Dans
l’Evangile, Jésus,
lui, nous dit : « Convertissez-vous,
car
le Royaume des Cieux est tout proche ». Ces deux recommandations
peuvent
sembler sans rapport entre elles… et pourtant ! Nos divisions ne
sont-elles pas
des preuves qu’il nous faut sans cesse nous convertir ? Ne sont-elles pas les révélateurs de notre manque de
foi en Celui qui est le modèle même de l’unité ? Unité entre les 3
personnes du
Père, du Fils et de l’Esprit, à la fois Trinité et pourtant Dieu unique
?
A un journaliste qui lui demandait un
jour « Que faudrait-il changer dans le monde pour qu’il soit meilleur ?
»
Sainte Mère Teresa a répondu simplement : « Vous et moi, Monsieur ». Se
convertir, c’est changer de direction, c’est avoir la volonté de changer
d’abord soi-même, au lieu d’attendre désespérément que les autres
changent. Il
nous faut sans cesse nous convertir, car c’est dans notre timidité à
nous
convertir que réside la source de nos divisions…
Et pourtant, les visions qui nous séparent
(di-visions) sont souvent bien futiles, au regard de l’Essentiel qui
nous
rassemble tous et toutes : notre foi au même Christ, Jésus, fils de
Dieu, qui a
donné sa vie pour nous sauver, est ressuscité et nous a laissé son
Esprit
Saint. Ces divisions, aussi infimes soient-elles, sont autant de
blessures qui
défigurent le visage du Christ. Divisions entre chrétiens, dans
l’Eglise, dans
nos paroisses, sur nos lieux de travail, parfois même, hélas, dans nos
familles… Pour les dépasser, faire ou refaire l’unité, il nous faut
passer par
la conversion que Jésus nous demande : « Convertissez-vous,
car
le Royaume des Cieux est tout proche », autrement dit : « le
Royaume de Dieu sera d’autant plus proche que vous vous convertirez. »
C’est bien
ce à quoi nous appelle également le psaume : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut (…) Il est le rempart de ma vie
(…) Je lui ai demandé une seule chose, habiter sa maison tous les
jours de ma
vie. »
Alors oui F&S, marchons ensemble et vivons entre nous cette unité qui respecte la
différence ; unité n’est pas uniformité ! A l’inverse des
premiers
chrétiens de Corinthe, soyons pour Gilles et pour Jo et Marcel et
pour les Patricks ! Soyons pour la liturgie nouvelle et
pour
l’ancienne ! Soyons de Mauves, de Thouaré, de Sainte-Luce et
de la
paroisse Saint-Matthieu sur Loire… !
Car oui,
Dieu est bien
présent au cœur de notre monde, au cœur de nos vies,
spécialement là où
l’on rencontre les divisions, la pauvreté, les injustices ou la
guerre ; c’est
là qu’Il nous attend. Comment pourra-t-il nous sauver si nous
sommes
ailleurs ? Oui
sa PAROLE est vivante,
« faite homme », incarnée ; elle est
actuelle,
elle peut toujours être neuve et éclairer ma vie d’aujourd’hui. Comme
nous
venons de le faire, apprenons à lire cette Parole au présent et si
elle nous
parle vraiment aujourd’hui, alors accueillons-là vite, pour l'annoncer
et en
témoigner à notre tour, particulièrement à celles et ceux qui ne
connaissent
pas la Bonne Nouvelle de Jésus
Christ,
comme nous y encourage notre Evêque dans sa lettre pastorale
« Dans la
joie que donne l’Esprit ».
Amen
Patrick JAVANAUD, diacre
permanent (avec la complicité de mes frères et de l’Esprit-Saint)