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3° dimanche du Temps Ordinaire.


       
« Ce qu’il y a d’encourageant dans les évangiles, c’est que tous les personnages sont des gens comme nous, pas des super-héros. »
C’est ce que me disait Mikhaël, ce jeune père de famille qui découvre la foi chrétienne et souhaite commencer un chemin vers son baptême.
Dans l’évangile de ce jour, on voit Jésus choisir ses premiers disciples. Choisir n’est d’ailleurs pas le verbe le plus approprié. On a l’impression dans ce récit qu’il les appelle un peu au hasard. Pas d’entretien d’embauche, pas de long discernement, ni même de période d’essai. C’est toi, c’est maintenant, et c’est définitif. En effet, l’évangéliste Mathieu nous dit que ces quatre pêcheurs du lac, Simon-Pierre et son frère André, comme les deux fils de Zébédée, répondent immédiatement à cet appel : « aussitôt, ils le suivirent ». Les premiers, en abandonnant même dans le lac les filets qu’ils venaient à peine de jeter ; les seconds en laissant leur père terminer seul la réparation de leurs filets.
Ces quatre premiers disciples sont des pêcheurs, des gens simples, très ordinaires. Jésus ne les a pas appelés en raison de leurs mérites, de leurs exploits, de leur apparence physique ou de leur aptitude à s’exprimer, ni même de leurs qualités morales. Ce ne sont pas des super-héros, ce sont des gens comme nous. Ils nous ressemblent. Ils ne nous paraissent donc pas inaccessibles, et nous pouvons facilement nous identifier à eux. En un mot, ils nous sont bien sympathiques.
Pour autant, on peut noter un certain paradoxe. Nous-mêmes, lorsqu’on reçoit un appel pour une mission à laquelle on n’aurait pas pensé ; lorsqu’on nous demande de nous engager dans un service pour lequel l’on ne s’est pas proposé spontanément ; lorsqu’on nous propose de rejoindre un groupe paroissial et qu’on ne s’y attendait pas ; nous qui sommes tous des gens ordinaires, notre premier réflexe est de nous dire : « pourquoi moi ? ». On se cherche – et on se trouve ! – très facilement des bonnes raisons pour refuser : je ne serai pas capable, je ne suis pas quelqu’un d’extraordinaire, j’ai mes limites ; je n’ai pas les compétences ; je ne saurai pas faire… pourquoi moi ?
Eh bien justement, parce que je suis une personne ordinaire. Je n’ai pas besoin d’imaginer que Dieu fait appel à moi parce que je serais quelqu’un d’extraordinaire. Oh oui, ce serait flatteur ! Mais ce serait nous faire illusion, ce ne serait pas juste. Les plus grandes choses se font souvent par des gens ordinaires.
Et pendant que nous nous perdons dans ces considérations, dans ces réflexions ; pendant que nous tentons de comprendre ce qui nous arrive ; pendant que nous cherchons comment argumenter notre réponse, nous retardons le moment de notre « oui ».
Par le fait, ces disciples, ces gens bien sympathiques dont nous avions pensé qu’ils étaient des gens comme nous, des gens ordinaires, auxquels nous avions peu de mal à nous identifier, voilà que nous prenons avec eux une certaine distance. Nous creusons nous-mêmes un fossé entre eux et nous. Voilà que nous les rendons, finalement, si différents de nous, si inaccessibles… parce que, eux, ils ont dit « oui » tout de suite !  « aussitôt, ils le suivirent ».
Alors c’est vrai, sans doute que le récit évangélique est un peu exagéré. Sans doute que Saint Mathieu a tenu à nous dépeindre des disciples très zélés, immédiatement disponibles et prêts à tout, comme les scouts « toujours prêts » à suivre Jésus. Il a voulu nous montrer que les disciples sont des modèles. Exagération suspecte, puisque Mathieu faisait lui-même partie des disciples ! Alors je suis allé voir dans les autres évangiles ce même épisode de l’appel des disciples : dans St Marc, c’est exactement pareil ! « aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent » ; dans St Luc : « laissant tout, ils le suivirent ». Et enfin dans St Jean, le récit est différent, mais la réponse des disciples, là encore, est presque immédiate.
Que signifie donc cette spontanéité, ce zèle extrême des disciples décrit unanimement par chacun des quatre évangélistes ? quel est le message ?
Le message, c’est l’urgence ! et cette urgence est vraie pour tous les temps, pour aujourd’hui encore, ici, chez nous, et maintenant. Les quatre évangélistes continuent leur récit avec, sans aucune transition, Jésus qui aussitôt enseigne, proclame l’évangile, guérit les malades, chasse les démons. Le temps n’est plus à l’attente ! le temps désormais est à l’action ! l’urgence permanente est dans l’annonce de l’évangile. « le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Ça y est, le temps est venu ! la nuit est terminée, la lumière est là, c’est maintenant ! Il nous faut profiter de cette lumière reçue lors de la venue de Dieu parmi nous pour agir au grand jour. Sinon, à quoi bon avoir fêté Noël ? Laissons nos peurs et nos timidités. Cette lumière est notre force, notre soutien, nous l’avons encore entendu dans le psaume d’aujourd’hui : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? Le Seigneur est le rempart de ma vie ; devant qui tremblerais-je ? ».
Cette lumière toujours nouvelle, c’est le Christ. Si nous sommes croyants, nous savons que le Christ vit en nous. Ça ne doit pas nous laisser indifférents, nous laisser passifs devant la marche du monde. Au contraire, ça doit nous dynamiser, nous mettre en route, immédiatement, à la suite du Christ.
C’est bien beau, tout ça, mais concrètement, comment faire ? Que faut-il faire pour se mettre à la suite du Christ ?
Dieu ne demande pas à tous de tout laisser derrière eux pour le suivre. C’est vrai, certains y sont appelés. Ils abandonnent leur confort, leur travail, leur famille pour vivre un lien plus radical avec le Christ, dans un couvent, un monastère, ou dans le service d’un diocèse, d’une paroisse… Mais si tous ne sont pas appelés à une telle radicalité – nous ne sommes pas tous des super-héros – chacun de nous est appelé à discerner dans son cœur de quelle manière suivre le Christ. Ça peut être très modeste : Se rendre disponible dans son entourage, dans sa famille, auprès de personnes seules ou dans le besoin… Chacun de nous a une conscience, chacun de nous est habité par l’Esprit Saint, qui sait ce qui est bon pour nous et pour les autres, pour notre salut et pour le leur. Écoutons-le ! Il nous appelle !
(Chant : Si le Père vous appelle…) 


Daniel BICHET, diacre permanent
22 janvier 2023
Gorges, Boussay, Clisson
 

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