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2° dimanche ordinaire.






Journée mondiale du migrant et du réfugié

Le Pape Benoît XVI propose pour la journée mondiale du migrant et du réfugié de réfléchir sur le thème « une seule famille humaine ». C’est certainement parce qu’il voit, comme nous,  que ce n’est pas si évident que cela, de former « une seule famille humaine ». Avec la mondialisation, les hommes et les femmes ont pris, certes, conscience de leur unité, de leur interdépendance, et de leur solidarité. Mais dans le même temps, les conflits politiques, sociaux, économiques voire religieux s’exacerbent, et les écarts entre riches et pauvres se creusent ! En France, les évènements de cet été concernant les ROMS, les gens du voyage et les migrants montrent bien la pertinence de l’interpellation du pape aux communautés chrétiennes. Nous ne pouvons pas échapper à ces questions :
Une seule famille humaine, qu’est ce qu’en dit la Bible ? Comment se reconnaître frères entre gens de cultures et de races si diverses ? Comment cela concerne-t-il notre communauté ?

Tout au long des pages de la bible est rappelée, sans cesse, l’exigence de respecter et d’aimer son frère pour vivre une relation vraie avec Dieu notre Père. Jésus nous a appris à appeler Dieu « Père » ; non seulement il est le créateur qui nous fait tous exister, mais aussi ce Dieu, qui aime chaque homme comme son enfant, quelque soit sa langue, sa race, sa religion… Nous sommes frères, parce que fils d’un même Père, « notre Père ».
L’attention à l’autre, et notamment aux pauvres est présente tout au long de l’ancien et du nouveau testament. « Tu n’exploiteras ni n’opprimeras l’émigré, car vous avez été émigrés au pays d’Egypte. Vous ne maltraiterez aucune veuve ni aucun Orphelin » Ex 22,20-21. Les prophètes rappellent constamment qu’Israël a été un peuple émigré, étranger en Egypte, que cela fait partie de sa nature même. Par conséquent, l’étranger doit être accepté, respecté, protégé quelles que soient les raisons sociales, économiques, politiques qui l’ont amené à quitter sa famille et son pays. Le Seigneur est le Dieu des émigrants en terre étrangère, des pauvres et des sans-droits. Dès le début du nouveau testament, les parents de Jésus n’ont-t-ils pas dû, eux aussi, fuir en Egypte pour échapper au massacre des enfants ordonné par Hérode ? Dès sa naissance Jésus lui-même est un migrant en terre étrangère !
Les Eglises chrétiennes tout au long des siècles ont eu souci du pauvre et de l’étranger. Vatican II a souligné (je cite) « l’étroite solidarité de l’Eglise avec la famille humaine ». « Les joies, les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout, et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et  les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur. » La communauté des chrétiens est donc intimement solidaire de tous les hommes et de leur histoire.

Au quotidien, cette solidarité se vit dans les rapports humains que nous construisons avec les autres. Mais quand cet autre vient d’un autre pays, d’une autre culture, d’une autre religion, ce n’est pas évident de l’accueillir comme un frère. Il y a bien des familles, ici, dont le gendre ou la belle-fille vient d’ailleurs, et je sais combien cela a été souvent difficile et parfois douloureux, aux parents, d’accepter cet autre comme conjoint de leur enfant, avec les difficultés rencontrées liées aux différences de culture, à la couleur de peau et au racisme ambiant… Quand nous rencontrons des gens très différents, reconnaissons que nous avons tendance à juger, à se méfier de l’autre, voire à en faire un bouc émissaire.
C’est là, qu’il nous faut regarder comment Jésus vivait ces situations face à l’étranger ou à l’autre différent. Les Evangiles sont remplis d’épisodes à ce sujet. Jésus face à la Syro-Phénicienne ou au centurion romain ne nie pas la distance et la différence avec l’autre. Mais devant leur attente confiante ou leur insistance,  le dialogue s’instaure, Jésus dépasse les différences pour répondre à leur attente. Respect de l’autre dans son altérité et établissement d’un dialogue authentique, c’est bien ce que l’on retrouve aussi avec la Samaritaine.
Pour nous, cela veut dire, qu’en aucun cas nous ne pouvons nier l’humanité de l’autre, même si nous avons tendance à détourner notre regard. Travailler à la construction de la famille humaine, c’est reconnaître chacun dans sa singularité, dans son histoire, dans sa culture, dans son milieu social. C’est établir un rapport authentique de fraternité avec l’autre, en acceptant nos propres limites et ses propres limites. C’est aussi susciter un nouveau regard sur l’autre, sortir des clichés qui ont la vie dure et qui stigmatisent les minorités. Il y a donc urgence à connaître l’autre en profondeur. Laissons l’autre se dire, et, se définir par lui-même, au lieu de lui coller des étiquettes. A ce moment-là, nous évaluerons mieux nos différences qui pourront devenir des richesses partagées.

Le défi de construire cette famille humaine, passe par une recherche du vivre ensemble. C’est un défi pour la société civile comme pour l’Eglise qui doit y prendre sa place. C’est aussi un défi évangélique. Avec le regard que nous venons de porter sur les Ecritures, nous découvrons que l’accueil des migrants et des réfugiés est un test pour notre communauté chrétienne. Quand nous arrivent dans nos assemblées dominicales des personnes d’origine étrangères –et il y en a, réfugiés, demandeurs d’asile ou régularisés- nous ne leur demandons pas leurs papiers, nous les accueillons comme des frères qui ont les mêmes droits que nous, dans le cadre de la vie paroissiale... Quand sur Orvault, nous rencontrons des migrants, des gens du voyage, des ROMS, c’est peut-être plus difficile de les accueillir, mais ils sont là. Ce sont nos frères. Quels regards portons-nous sur ces populations ? Acceptons-nous qu’elles vivent à côté de nous ? Seize familles ROMS sont arrivées sur Orvault, après expulsion, courant décembre. A la demande de personnes en lien avec eux, la municipalité a branché eau, électricité installé des toilettes. Mais aujourd’hui ces familles, en grande misère, manquent de tout. Les petits enfants de 3 à 6 ans errent dans la boue, car ils ne sont pas scolarisés. Certains jeunes mettent une heure et demie pour rejoindre l’école qui les avait accueillis avant l’expulsion. Des adultes, qui le souhaitent, auraient besoin d’apprendre le Français… On ne peut sans cesse les expulser sans solution de lieu d’accueil stable et décent, sans propositions d’accompagnement vers l’intégration pour ceux qui le souhaitent… Des travailleurs sociaux et des hommes de bonne volonté, dont des chrétiens, sont en lien avec eux, et c’est heureux. Situation certes complexe et difficile, mais qu’il faut affronter courageusement. Nous faisons bien partie de la même famille humaine… Ils ont le droit d’être traités avec dignité et respect.

Concluons avec BenoîtXVI :
« Ne perdons pas l’espérance et prions ensemble Dieu, Père de tous, afin qu’il nous aide à être, chacun en première personne, des hommes et des femmes capables de relations fraternelles; et, sur le plan social, politique et institutionnel, afin que s’accroissent la compréhension et l’estime réciproques entre les peuples et les cultures. »

Yves Michonneau, diacre permanent.
Paroisse St Léger-Ste Bernadette d’Orvault
le 16 janvier 2011

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