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Rendez à Dieu…
« Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »… Il y a comme ça dans la bible des phrases que bien des gens utilisent sans même savoir qu'elles sont Parole de Dieu. Cette maxime, souvent utilisée, a été parfois détournée de son objectif, comme par exemple, pour lui faire dire que l'argent est le mal personnifié, qu'il serait préférable d'être pauvres. Mais nous le savons bien, la pauvreté matérielle, le manque d'argent, la misère ne sont, par eux seuls, ni un bien, ni un chemin de salut ! C'est trop souvent une souffrance, une injustice révoltante, un état qui crée des inégalités, des rejets, des refus et ce n'est pas juste. L'argent n'est pas un mal en soi, c'est sa mauvaise utilisation, son besoin exagéré, son idolâtrie qui détournent de Dieu et de son dessein en révélant l'orgueil et l'envie, instaurant des différences sociales inacceptables, générant des violences écartant de ce Dieu qui veut nous voir en paix, heureux de vivre en frères, dans la joie du partage et de l'amour fraternel. Un Dieu fidèle disant à chacun sa valeur et sa dignité. Le père Joseph Wresinski et ATD Quart Monde l'avaient bien compris et le 17 octobre 1987, ils ont inauguré, sur la parvis du Trocadéro à Paris, la dalle signant le devoir sacré du respect des droits de chaque homme et ils ont institué cette journée : "La journée mondiale du refus de la misère". Et le 17 octobre, c'est Lundi ! N'est-ce pas la vocation de l'Église et de chaque frère en Christ que de vivre la compassion de Jésus pour ceux qu'il croise?
Pourtant, comme dans les béatitudes, par exemple, Jésus nous invite souvent à la pauvreté. Certes, mais c'est d'abord celle du cœur, celle de ceux qui se reconnaissent petits devant Dieu, petits, humbles et simples, de ceux qui ne se voient pas intouchables, tout puissants ou supérieurs, et vous en conviendrez, il ne s'agit pas là de la même pauvreté.
« Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »…Ce que nous dit Jésus dans cette réplique aux pharisiens, c'est qu'il ne faut pas tout mélanger, tout mettre au même niveau, ne pas tomber dans un relativisme fade et mou dans notre vie de tous les jours. Nous avons à vivre comme chrétien, comme croyant, sans nous cacher, à être animé au travail, à la maison, au volant ou à l'école de cette foi en Christ ressuscité sans y mêler, sans y faire dépendre nos tracasseries administratives, financières ou scolaires. Vivre dans la société actuelle crée des obligations et des contraintes mais ne succombons pas aux sirènes et aux penchants actuels d'un individualisme forcené, du toujours gagner un plus en oubliant que derrière chaque service, chaque commerce, chaque produit vit un homme, une femme, un frère en humanité, en Christ.
"Rendre à César", on pourrait dire : rendre à l'état, à la société civile, à la nation ce qui lui revient, rendre ce qui est du niveau sociétal, social, administratif, financier ou politique mais en se battant évidemment pour que le message de l'évangile soit écouté, entendu et respecté par eux. Mais alors : qu'avons-nous à rendre à Dieu ?
Ce que nous avons à rendre à Dieu, c'est ce que nous sommes, l'être que nous incarnons. Si je rends à César ce qui est à son image, comme cette pièce d'argent dans l'évangile, je rendrai à Dieu ce qui est aussi à son image: l'homme. Dans le livre de la Genèse Dieu n'a-t-il pas dit: "Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance" (Ge 1,26). Alors rendons-lui ce qui lui revient : notre être, notre vie d'homme, la dignité humaine, la fraternité et surtout, tout l'amour qu'il nous donne sans cesse.
C'est en honorant l'homme, frère en humanité, frère dans la paternité que nous proclamons dans la prière de Jésus, que nous rendrons à Dieu ce qui est à son image. Honorer, magnifier, glorifier Dieu par et avec la personne qui est à mes côtés, celle que j'apprécie n'est déjà pas toujours facile. Qu'en est-il de mon regard, de mon attention face à celui que je ne connais pas, celui qui n'est pas comme moi, ce jeune avec ses piercings ou ses écouteurs, cet ancien qui se plaint du bruit, cet étranger qui ne vit pas comme moi, ce handicapé qui m'interpelle chaque matin pour me donner le bonjour, cette personne porteuse de handicaps qui révèle mes limites et réveille mes angoisses ?
Nous l'acceptons volontiers et nous en sommes pour beaucoup convaincus, la paternité de notre Dieu nous fait tous frères, enfants d'un même père dont nous avons reçu son Esprit. Cet Esprit Saint qui nous anime quand nous sommes en vérité. Comme Adam dans la livre de la Genèse reçoit de Dieu le souffle de Vie, nous sommes ses enfants vivants de son souffle divin, nous lui appartenons. Pour répondre à la demande de Jésus "rendre à Dieu ce qui lui revient", Il faut rendre à chacun de ses enfants ce qui lui est propre, ce qui le compose : sa personnalité, sa dignité, sa spiritualité, son unicité, son héritage divin et l'amour qu'il est en droit d'attendre de moi.
Il ne s'agit pas d'assistanat, de condescendance, de charité déplacée encore moins de pitié. Non ! Il s'agit seulement et uniquement d'amour, d'amour partagé dans une foi active. Après les prophètes de l'ancien testament, après Jésus dans son évangile, St Jean nous le rappelle : "Dieu est amour". C'est dans cette dynamique, avec cette certitude accrochée au cœur que nous avons à nous engager comme chrétien. Que je sois face à une personne avec handicap, ou que je vive moi-même le handicap : regarder et voir l'autre, lui faire confiance, me mettre à son écoute, l'accueillir tel qu'il est, ouvrir mon cœur et mon esprit pour vivre la rencontre et l'accompagner si c'est sa volonté, c'est ma mission de baptisé.
En vivant le service du frère dans la paix et l'amour fraternel, aidé par la prière, nourri par la Parole, confiant en l'Esprit qui habite chaque homme, je pourrai rendre à Dieu tout ce qu'il me donne et qui lui appartient : son amour présent au cœur du monde qui fait notre unité.

"Tout homme est une histoire sacrée, l'homme est à l'image de Dieu"

Patrick DOUEZ, pour le 16 octobre 2011

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