14° dimanche ordinaire
« Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je
vous procurerai le repos. » Ça fait du bien d’entendre ces paroles en
arrivant en vacances. Certains parmi nous sont déjà en vacances depuis
une semaine, et pour les autres, ils ont un œil sur le calendrier en
attendant avec une certaine impatience que cette période bénie arrive.
Tous, quelles que soient nos activités, nous aspirons de façon tout à
fait légitime à ce temps de récréation. Oui, tous, même les retraités.
J’en connais qui ont un agenda drôlement rempli ! Je ne connais
personne qui n’ait pas sur les épaules un fardeau dont il aimerait bien
être soulagé. Alors, puisque cette invitation de Jésus s’adresse à
chacun d’entre nous, écoutons-la.
Dans l’Evangile de Matthieu, ce passage fait suite à une série de
malédictions prononcée contre les villes du lac de Galilée. Jésus vient
de guérir des malades de toutes sortes : un lépreux, le serviteur
d’un centurion paralysé et souffrant atrocement, la belle-mère de
Pierre, des possédés, des muets, des infirmes, des paralytiques, une
femme qui avait des pertes de sang, des aveugles… Il a même ressuscité
la fille d’un chef de la synagogue. Mais tous ces miracles, au lieu
d’être reçus comme des signes de la venue du Royaume, ont entraîné des
critiques de la part des chefs des prêtres et des pharisiens, comme de
la part de tous ceux qui font appel à leur savoir et à leur
intelligence pour refuser des évidences toutes simples, trop simples.
Au lieu de s’enfermer dans un sentiment de révolte ou de désespoir
comme çà nous arrive après avoir vécu l’échec, Jésus se tourne vers son
Père dans une prière étonnante que Matthieu nous livre : « Père,
Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as
caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. » Vous
ne trouvez pas cela étonnant ? Dans nos prières, est-ce que nous ne
commençons pas par demander à Dieu de faire nos quatre volontés ? Ne
nous arrive-t-il pas de lui demander de faire en sorte que nos projets
se réalisent comme nous le souhaitons ? Et lorsque çà n’a pas marché
comme nous l’avions prévu, ne sommes-nous pas tentés de lui demander
des comptes ? Jésus, au contraire, rend grâce à son Père parce que ce
sont les petits, les gens simples qui ont accueilli son message, au
milieu du refus général de l’intelligentsia.
Voici donc une première indication pour trouver le repos : faire
confiance à Dieu, notre Père, et chercher, en relisant notre vie,
quelle est sa volonté. Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais ce
n’est pas le travail que j’ai fait qui me fatigue, mais celui qui me
reste à faire. Je reste soucieux, inquiet (=sans repos) tant que je
n’ai pas atteint mon objectif. Mais qu’est-ce qui détermine mon
objectif ? Est-ce que je l’ai décidé sous l’emprise de la chair ou sous
l’emprise de l’Esprit, selon l’expression de St Paul ? Ne nous y
trompons pas, la chair chez St Paul, çà n’a rien à voir avec le corps,
ou l’adultère. Cette expression doit plutôt nous renvoyer à l’attitude
des pharisiens et des docteurs de la Loi qui ont refusé d’admettre la
venue du Royaume au nom de leur savoir, au nom de leur pouvoir, au nom
de leur avoir, au nom de leur valoir. Au contraire, l’emprise de
l’Esprit, c’est l’adhésion à la volonté de Dieu et à son amour de
prédilection pour les humbles, les petits ; Pour tous ceux qui sont
pauvres de savoir, de pouvoir, d’avoir ou de valoir.
C’est bien cet idéal qui est incarné par Jésus, lui le Fils de Dieu, le
Sacrement du Père. Par lui, « les aveugles voient et les boiteux
marchent, les lépreux sont guéris et les sourds entendent, les morts
ressuscitent et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. » C’est
bien lui, le roi juste et victorieux, humble et monté sur un âne.
L’âne est la monture de la vie quotidienne, opposé au cheval de guerre.
C’est lui, Jésus, qui détruira la guerre et proclamera la paix à toutes
les nations. Pour trouver le repos, pour vivre en paix avec nous-mêmes,
nous n’avons rien de mieux à faire que de nous atteler à la même tâche,
de nous mettre sous le même joug que Jésus. Avec lui, nous sommes sûrs
de faire la volonté de son Père et de demeurer en sa présence. «
Cherchez d’abord le Royaume de Dieu, tout le reste vous sera donné en
plus. » Alors, ne ratons pas une occasion d’aider quelqu’un à se
relever, que ce soit un jeune qui a perdu l’espoir d’accéder à une
formation, que ce soit un chômeur qui a l’impression de ne plus rien
valoir, que ce soit des parents qui baissent les bras parce qu’ils ont
le sentiment qu’ils ne peuvent plus rien pour éduquer leurs enfants. Ne
ratons pas une occasion d’être vraiment fraternels avec tous ces
pauvres : ils sont les sacrements du Christ. Ils nous révèlent qui Il
est.
Venez à moi, nous dit Jésus, çà s’entend aussi comme une invitation à
passer du temps à ses pieds, comme Marie qui l’écoutait pendant que
Marthe s’agitait. Le temps des vacances, c’est le temps ou l’on peut
aller s’exposer au soleil (sans excès) pour bénéficier des bienfaits de
l’héliothérapie. Pourquoi ne pas imaginer quelques instants chaque jour
réservés au « bronzing spirituel » ? Quelques instants pendant
lesquels nous nous exposerions au regard d’amour de Jésus sur nous, en
nous laissant aimer tels que nous sommes, en écoutant sa Parole, en
l’écoutant prier son Père, en nous laissant guider par lui jusque dans
l’intimité de son Père. Bien sûr, pour venir à lui, il faut laisser au
vestiaire nos quatre « oir » : savoir, pouvoir, avoir et valoir,
pour être pauvre devant lui comme lui est pauvre devant son Père. Tout
ce qu'il a, il le tient de son Père. Tout ce qu’il a, il nous le donne,
sur la croix. Et ce tout, c’est l’Esprit Saint.
Nous cherchons le repos, nous cherchons une récréation. Il nous propose
une re-création. C’est ce que nous dit St Paul : « Celui qui a
ressuscité Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps
mortels par son Esprit qui habite en vous. » Laissons-nous entraîner
par cet Esprit jusque dans l’intimité de notre Dieu Trinité, là où se
trouve notre vrai repos, et demeurons en sa présence pour qu’il refasse
nos forces, nos forces d’aimer.
Jean-Jacques BOURGOIS
Le 6 juillet 2014
St Michel, Les Moutiers, La Bernerie
Sommaire année A
Accueil