12° dimanche ordinaire.
Année A 21/06/08
Décapante
cette page d’évangile ! Pour la comprendre, il faut d’abord se
dire qu’elle a été écrite pour des chrétiens d’origine juive une
cinquantaine d’années après la mort de Jésus. Ces juifs passés au
christianisme, considérés comme des renégats. Aussi cherchait-on
à les éliminer. Témoigner de sa foi à cette époque, c’était souvent
risquer sa vie. On peut comprendre que certains aient cherché de se
faire très discrets et de ne pas élever la voix. Les disciples avaient
de bonnes raisons d’être inquiets. Jésus ne leur a pas caché que
l’entreprise est risquée : « je vous envoie comme des agneaux
au milieu des loups… prenez garde aux hommes… vous serez haïs de tous à
cause de mon nom… »
C’est donc pour eux et pour
nous que Matthieu rappelle ces paroles de Jésus qui invitent à l’audace
et au courage : « Ne craignez pas... Soyez sans crainte », leur dit-il.
Expression qu’on retrouve 366 fois dans la Bible. Chaque matin,
en se levant, le chrétien peut lui aussi se dire : « Allez ! Ne
crains pas. » On peut y aller joyeusement témoigner de l’Évangile.
C’est
en regardant vivre le Christ lui-même que nous comprenons mieux toute
la portée et les exigences de ce message : il n’a jamais eu peur
d’affronter les autorités religieuses qui étaient opposées à son
message de vérité et de miséricorde. Il est allé vers Zachée, il a
accueilli les lépreux, les prostitués et les pécheurs publics qu’il
fallait éviter. Il a pardonné les péchés. On peut dire que Jésus a vécu
dangereusement. Tous ces risques qu’il a acceptés pour rester fidèle à
sa mission jusqu’au bout.
Alors, Jésus prévient ses disciples
et nous-mêmes aujourd’hui : Eux aussi, nous aussi connaîtront des
tempêtes. Les chrétiens sont effectivement persécutés quand Matthieu
écrit son évangile. Il leur écrit, et nous écrit, ce message
d’espérance: « N’ayez pas peur… Je suis avec vous ». Les
hommes les plus mal intentionnés ne peuvent atteindre l’âme ; Dieu
n’abandonne pas ses enfants. Comme le dit saint Paul : « Rien ne peut
nous séparer de son amour ».
Le Christ compte sur la fermeté de
notre foi et de notre confiance. Dans notre monde d’aujourd’hui,
parfois bien malmené et bien moche, les causes d’inquiétude ne manquent
pas (maladie, chômage, exclusion, humiliation, mépris,
incompréhension). Tenez encore tout récemment ce tiraillement, cette
incompréhension au sein d’une association au sujet de la laïcité mal
comprise par certains allant jusqu’au rejet de l’autre. Ailleurs,
d’autres sont confrontés aux moqueries ou à l’indifférence. N’y a-t-il
pas aussi la peur de passer pour des rétrogrades et des marginaux. Nous
pouvons avoir peur du regard et du jugement de ceux qui nous entourent.
Les jeunes qui sont en collège ou au lycée et qui vont à l’aumônerie en
savent sans doute quelque chose. Alors Jésus veut
nous rassurer: nous n’avons pas à craindre ceux qui peuvent aller
jusqu’à tuer le corps : le vrai danger c’est celui qui peut tuer notre
dynamisme, notre énergie et notre confiance, celui qui nous fait perdre
notre dignité, celui qui nous fait douter de nous-mêmes, de l’autre et
de l’amour de Dieu, jusqu’à y « perdre son âme » (selon
l’expression..). Mais, Jésus nous dit aussi que ce n’est pas le moment
d’abandonner; ces forces là n’auront pas le dernier mot.
Le Christ
nous veut partenaire, il veut nous associer tous à sa victoire sur la
mort, c’est à dire sur tout ce qui défigure l’homme.
Alors cette
bonne nouvelle, accueilli dans le secret de notre cœur, n’ayons pas
peur de l’annoncer avec courage. Le Christ compte sur l’engagement
personnel de tous les baptisés, de chacun d’entre nous, pour faire
retentir son Evangile dans tous nos milieux de vie et personne ne peut
le faire à notre place.
Car si être disciple de Jésus c’est
uniquement aller à la messe le dimanche, ne pas voler, mentir ou
tromper l’autre… donner un peu d’argent pour la lutte contre la faim
dans le monde… méditer au fond de son cœur ou dans sa chambre… alors il
y a de grandes chances que nous ne soyons pas inquiétés. Mais si
être disciple de Jésus Christ ce n’est pas seulement « pratiquer
une religion », mais aussi et en même temps
« pratiquer l’Evangile », c’est à dire le VIVRE dans
toute la VIE, alors oui les ennuis risquent de commencer, de
s’accumuler jusqu’à en faire reculer beaucoup… Pourquoi ?
Parce
que vivre l’Evangile, c’est d’abord le faire en actes pour que Jésus
VIVANT en moi transforme ma vie et la vie du monde. C’est à dire
travailler avec LUI concrètement à ces transformations, ces
conversions… le suivre et s’engager sur les chemins de la lutte et des
combats… mais pas n’importe comment car lutter avec Jésus c’est lutter
en respectant les personnes et même en les aimant. Alors on peut être
attaqué sur bien des fronts (ceux qui nous disent que ce n’est pas
chrétien ou ceux qui déclarent que par n’importe quels moyens, y
compris la violence, on peut régler les problèmes humains)
La
dernière invitation que Jésus adresse à ses disciples et nous adresse
est absolument essentielle : c’est un appel à nous compromettre pour
lui, un appel à ne pas avoir peur d’affirmer notre foi (sans
prosélytisme), même en milieu indifférent ou hostile. Cela n’est jamais
facile de vivre en chrétien. Ne pas avoir peur d’être fidèles à nos
convictions. Se dire que le Christ est avec nous. Pour cela on a des
outils : on peut le rejoindre dans la prière, l’accueil de sa
parole et l’Eucharistie. Il est le Chemin, la Vérité, la Vie.
Bien
sûr, qu’on croit être du bon côté, celui des amis de Jésus. Mais quand
il s’agit de prendre position contre l’injustice ou l’intolérance,
qu’en est-il ? Etre solidaire du Christ, ce n’est pas seulement des
mots, de belles paroles. N’oublions pas qu’il est présent en celui qui
souffre de la faim, de l’exclusion, de l’injustice, de la violence.
Etre solidaire du Christ et se prononcer pour lui, c’est le reconnaître
en chacun d’eux, dans chaque homme, chaque femme que je côtoie :
celle ou celui qui est mon collègue, mon voisin…
et d’agir à mon
niveau, pas tout seul, mais avec d’autres, en réseau. C’est ce que nous
avons fait en pôle solidarité lundi soir en s’apportant des solutions
concrètes…
Oui laissons-nous interpeller par cet évangile qui est un
appel à la confiance. En ce temps, nous accueillons des enfants pour le
baptême, la 1ère communion ou la profession de foi. Nos jeunes ont
besoin du témoignage d’adultes courageux qui n’ont pas peur de
témoigner de l’espérance qui les anime, là où ils sont dans le
quotidien :
« C’est ce qui reste de chrétien en elles qui
empêche les sociétés modernes d’exploser » (O.F. du ). Nous
valons bien plus que tous les moineaux du monde !! Dieu passe en
permanence dans nos vies… faisons-lui confiance
François CORBINEAU, diacre permanent.
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