10 août
Fête patronale
St Laurent
Homélie pour la fête patronale - Saint Laurent
BERGBIETEN – 7 août 2016
2 Co 9,6-10 – Ep 3,8-19 – Jn 12,24-26
Chers paroissiennes et paroissiens de Bergbieten,
Chers Sœurs et Frères dans le Christ,
Lorsque votre curé m’a sollicité pour prêcher en ce jour de fête
patronale je ne savais que peu de choses de votre saint patron Laurent :
1. qu’il était diacre, ce que je suis également
2. qu’il fut martyrisé, rôti sur un gril (tel qu’il est représenté habituellement) ... ce que je ne saurais me souhaiter !
En préparant cette homélie j’ai découvert d’autres éléments de sa vie que je vous propose de découvrir ou redécouvrir avec moi.
Après avoir été élève du futur pape Sixte 2, Laurent
fut diacre auprès de lui, dans l’Eglise de Rome. Il eut pour mission
d’être le gardien des trésors de l’Eglise et était chargé d’en
distribuer les revenus aux pauvres. L’empereur Valérien ayant pris un
édit de persécution interdisant le culte chrétien, Laurent fut arrêté
ainsi que les autres diacres et le pape Sixte II. Ces derniers furent
mis à mort mais Laurent fut provisoirement épargné car le préfet de
Rome escomptait que Laurent lui livrerait les trésors de l’Eglise. Il
lui accorda un délai de quelques jours pour lui apporter ces trésors.
Laurent revint, entouré d’une cohorte de pauvres, d’infirmes, de
boiteux, d’aveugles et, les désignant au préfet, il lui dit : « Voilà
les trésors de l’Eglise que je vous avais promis ... l’Eglise n’a pas
d’autres richesses ! » C’est cette attitude et cette parole qui mit le
préfet dans une fureur meurtrière de sorte qu’il fit torturer et mettre
à mort Laurent en l’an 258 après Jésus-Christ.
C’est cette parole qui a retenu mon attention et qui
rejoint la parole de Jésus dans l’évangile du 19e dimanche du temps
ordinaire (Année C) : « ...là où est votre trésor là aussi sera votre
cœur » Lc 12
Saint Laurent a ouvert tout son être, son cœur et
son esprit, à l’amour du Christ. Cet amour et l’exemple du Christ
lui-même a inspiré toute sa vie. Il est resté « enraciné dans cet
amour » sans mesure dont il a pu savourer la plénitude. C’est
l’Evangile, la Parole vivante de Dieu qui a guidé Laurent et qui l’a
rendu attentif aux pauvres dont il avait grand souci. C’est la
miséricorde de Dieu qui lui a permis de faire lui-même œuvre de
miséricorde et de donner le meilleur de lui-même car comme il est dit
dans la 2ème lettre de Saint Paul aux Corinthiens que nous avons
entendue : « Dieu aime celui qui donne joyeusement ».
Diacre, serviteur à l’exemple du Christ Serviteur,
il a accompli son service jusqu’à donner sa vie. Comme « le grain de
blé tombé en terre qui meurt et donne beaucoup de fruits ». Habitant la
campagne, vous connaissez aussi bien que moi le processus de la
germination de la graine semée. Vous êtes sans doute émerveillé autant
que moi devant cette petite graine qui va donner de si beaux épis !
Chers frères et sœurs,
Comment la vie et l’œuvre de Saint Laurent, peuvent-elles inspirer
concrètement le quotidien de nos vies ? Quels sont les trésors dans
notre Eglise que nous pouvons faire fructifier pour en distribuer les
fruits ? Comment pouvons-nous, jour après jour donner notre vie, quel
que soit notre ministère dans l’Eglise : laïc, diacre, religieuse,
prêtre, évêque ou pape ? Quelle que soit notre fonction.
Vous permettrez que j’évoque plus particulièrement
le ministère diaconal, non pour me donner en exemple. Non pour me
mettre en avant mais pour témoigner que malgré mes fragilités et mes
erreurs, Dieu fait chaque jour pour moi des merveilles.
A la suite du Christ-Serviteur, être présence d’Eglise auprès de mes
prochains quels qu’ils soient, mais particulièrement auprès de celles
et ceux qui sont blessés par une maladie, une séparation, un divorce,
un deuil, une fragilité psychologique, la perte d’un emploi, la
précarité, la solitude du grand âge, une carence affective... Etre
tendresse de Dieu auprès de celles et ceux qui n’existent dans le
regard de personne. Etre à l’écoute attentive de ceux qui sont plongés
dans les ténèbres du doute, ou empêtrés dans des situations
inextricables. Etre présent aussi à leur bonheur, à leurs joies et à
leurs fêtes.
Jésus – et à sa suite Saint Laurent – nous invite à changer de regard,
à poser un regard bienveillant sur ceux que nous rencontrons, à
considérer que la vraie richesse ce sont les personnes avec leurs
singularités, leurs différences, leurs richesses et leurs pauvretés.
C’est en reconnaissant notre propre pauvreté que nous pouvons les
rejoindre. Certes, ce n’est pas toujours facile de poser un regard
bienveillant sur les autres.
Lors de mon ordination il y a bientôt 4 ans j’ai été appelé à être en
service « à la table de la Parole de Dieu, à la table de l’eucharistie,
et à la table du partage avec mes sœurs et frères en humanité ». Le
plus gros de ma mission se passe en visites de personnes âgées,
malades, exclues ou en situation de précarité. Lorsque je suis à
l’autel, un peu en retrait du prêtre, ce sont les visages d’Angèle, de
David, de Marie Louise, de Germain, d’Irène, d’Henry, de Marie
Andrée et de bien d’autres qui surgissent en moi. Ce sont ces
personnes que je confie au Seigneur. Je suis heureusement comblé lors
de mes visites lorsqu’Angèle, 91 ans, me dit : « Vous ne pouvez
imaginer quel bonheur vous m’offrez en m’apportant la communion » Ou
David le SDF qui me dit tout de go « Tu es mon ange gardien » ! Mais
loin de moi d’avoir la grosse tête ou de me voir pousser une auréole,
car je connais trop bien mes défauts et mes limites et me souviens très
bien du jour où j’ai détourné la tête en passant à côté d’une SDF
Dieu ne nous demande pas l’impossible. Il vous appelle vous, chacune et
chacun d’entre vous, chers sœurs et frères, à manifester concrètement
son amour dans votre vie quotidienne. Dieu nous invite, comme il a
invité Laurent, à mourir un peu à nous-mêmes, à mourir un peu à notre
confort, à notre tranquillité, à nos préoccupations égoïstes pour
devenir disponibles, et devenir, par nos actes quotidiens, visages de
sa tendresse, sourires de son amour auprès de nos sœurs et frères
humains. Ce sont ces petits gestes quotidiens d’attention et de
bienveillance qui illuminent nos vies. Le vrai trésor de l’Eglise est
là : ce sont ces graines d’humanité que nous aurons semées jour après
jour.
C’est « Dieu qui fournit la semence au semeur et le pain pour la
nourriture [il] vous fournira la graine ; il la multipliera, il donnera
toujours plus de fruit à ce que vous accomplirez dans la justice » Mais
Dieu veut avoir besoin de vos mains, de vos bras, de vos cœurs, de vos
oreilles, de vos yeux, de vos paroles et de vos silences pour semer des
graines d’espérance et mettre en œuvre sa miséricorde.
Chers frères et sœurs, que saint Laurent, patron des pauvres, nous aide
à être attentifs à tous nos prochains, en particulier à ceux qui sont
dans la détresse. Puissions-nous nous laisser façonner par la Parole de
Dieu pour inventer des gestes d’amour et de paix. Puissions-nous
découvrir ou redécouvrir des chemins de fraternité, de pardon et de
partage grâce à « l’amour du Christ qui surpasse tout ce qu’on peut
connaître ». Puissions-nous en chaque eucharistie « être unis à la
divinité de Celui qui a pris notre humanité ». Et puissiez-vous
me pardonner si mon homélie a été un peu trop longue ! AMEN
Arsène BUCHHOLZER
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