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Épiphanie
L’astronome Kepler, en 1604,
démontra qu’une conjonction de plusieurs planètes du système solaire
eut lieu en l’an 7 avant notre ère, et ceci trois fois dans l’année,
dans la constellation des Poissons considérée à l’époque comme le
reflet céleste d’Israël. D’autres évènements, d’ordre historique comme
le recensement que connut la Sainte Famille, sont cohérents avec cette
période. Ainsi, l’an 7 avant notre ère est probablement l’année de
naissance de Jésus.
Mais ce qui est signifiant dans
ce récit des mages, c’est moins l’exactitude des dates que l’événement
lui-même rapporté par Saint Matthieu dans son évangile que nous
proclamons Parole de Dieu. Ainsi, Dieu nous parle dans cet événement
appelé « épiphanie », qui signifie
« manifestation » de Dieu.
En quoi cet épisode des mages
peut-il nourrir notre foi ? Quels sens autres que le merveilleux
lui donner ? Trois sens me paraissent à relever pour notre vie
chrétienne d’aujourd’hui.
Pour cela, repartons du récit
évangélique. Avec les connaissances de leur temps, trois mages, donc
trois scientifiques, observent une lumière céleste à caractère
exceptionnel, qui apparaît dans une partie du ciel hautement
symbolique. Ils décident de se mettre en route, on dirait aujourd’hui
de « mener une campagne sur le terrain », pour aller au bout
de leur intuition. Il se rendent en Palestine.
Le pape François déclare :
« ils ne se lassent pas d’affronter les difficultés de la
recherche ». D’ailleurs, si Hérode les reçoit, c’est que ces
personnages avaient une notoriété « internationale »
certaine. On n’entre pas chez Hérode comme cela !
Le premier sens de l’épiphanie,
c’est que, dès la naissance de son Fils, Dieu fait le premier pas vers
chacun d’entre nous. Un pas de proximité, en appelant des bergers à
venir adorer l’enfant Jésus. Un grand pas culturel, en appelant des
scientifiques de l’époque à venir de loin, adorer aussi le même enfant
Jésus. Chacun est ainsi rejoint par la Bonne Nouvelle. D’abord les
pauvres, ensuite les savants. Que ce soit ceux qui gardent les
troupeaux, attentifs aux nouvelles des environs, ou que ce soit ceux
qui étudient le monde, qui cherchent à en décrypter le fonctionnement,
attentifs aux phénomènes de la nature. L’appel du Seigneur est premier
et destiné à tous. Ce qui est remarquable, c’est que les mages sont
appelés à partir de ce qu’ils étudient, dans leur propre sujet de
recherche. C’est précisément là que Dieu les rejoint, au point qu’ils
se mettent en route.
Et voici précisément le deuxième
sens de l’épiphanie : Dieu, présent en humanité dans l’enfant
Jésus, peut être reconnu dans la foi quelle que soit notre condition,
notre culture, notre éducation, nos diplômes, notre métier, nos
passions, nos goûts. Regardez les mages : à partir de leur
science, ils font un chemin qui se termine par un acte de foi,
l’adoration devant l’enfant Jésus nouveau-né. Le chemin des mages a
débuté par la rationalité, il se termine par la grâce, lorsque Dieu se
fait reconnaître.
Ainsi, c’est d’abord Dieu qui
cherche chacun d’entre nous. Il fait toujours le premier pas vers nous,
personnellement, avant même que nous fassions le premier pas vers lui.
Ainsi, soyons davantage attentif aux signes que Dieu nous adresse pour
nous rejoindre, parfois discrètement, au cœur de nos activités humaines
dans la réalité de notre quotidien, non seulement à travers des
événements et des rencontres, mais aussi à travers ce que nous sommes,
et même à travers nos connaissances et nos expériences quotidiennes,
comme pour les mages. Tout ce que nous sommes, tout ce que nous vivons
et partageons, peut se révéler être chemin vers Dieu.
Nous sommes alors invités à ne
pas nous limiter à l’accusé de réception de cet appel, mais à orienter
nos pas à partir de l’appel, pour rejoindre le Seigneur dans cette même
réalité quotidienne, comme les mages qui se déplacent jusque sur le
lieu de la naissance de Jésus, et qui le reconnaissent à travers la
symbolique de leurs présents : l’or signe de la royauté, l’encens
signe du grand prêtre éternel qui nous relie à Dieu, la myrrhe utilisée
pour embaumer les morts, signe de la mort aussi bien que signe de la
victoire sur la décomposition des corps. Jésus-Christ connaîtra la
mort, mais ressuscitera des morts. Roi de l’univers, grand prêtre et
unique médiateur entre Dieu et les hommes.
Cela nous conduit au troisième
sens de l’Épiphanie : le Christ universel est venu pour tous, afin
qu’aucun ne soit perdu et ne reste dans l’obscurité. Comme nous l’écrit
Saint Paul dans la seconde lecture, l’épitre aux Éphésiens, « ce
mystère, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage,
au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus,
par l’annonce de l’Évangile ». Toutes les nations : ce n’est
pas seulement au sens politique, c’est aussi au sens culturel, donc
universel. L’avènement du Christ-Jésus donne sens et salut à l’univers,
à la vie, à nos propres vies, même si l’obscurité du mal, de la
souffrance est encore présente autour de nous et en nous. Le livre
d’Isaïe et le psaume que nous avons écoutés l’affirment :
« Voici que les ténèbres couvrent la terre, et la nuée obscure
couvre les peuples. Mais sur toi se lève le Seigneur » (épi :
sur, phanos : se lève, se manifeste) ; « Il délivrera le
pauvre qui appelle et le malheureux sans recours. Il aura souci du
faible et du pauvre, dont il sauve la vie ». Le faible et le
pauvre, c’est celui qui éprouve un manque, que ce soit matériel pour sa
survie, que ce soit affectif ou même encore spirituel dans sa propre
humanité.
Cette Épiphanie, nous la recevons là où nous sommes, tels que nous
sommes. Nous en vivons et elle nous transforme pour nous diviniser
progressivement. Que cette solennité de l’Épiphanie nourrisse notre
foi, notre espérance et notre charité afin de poursuivre notre
pèlerinage vers le Seigneur, au cœur de notre quotidien, comme les
mages l’ont expérimenté.
Christophe DONNET, diacre permanent.
Paroisse St Benoît – Diocèse de Saint-Etienne
8 janvier 2017
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