Aujourd’hui, nous sommes réunis pour prier pour la paix dans le monde
Quel autre souhait pourrions-nous avoir aujourd’hui ?
Les raisons ne manquent pas. Vous pensez forcément à l’un ou l’autre de ces conflits qui envahissent la terre.
Et nous souvenir de ces soldats morts au combat, et des civils aussi, dans tous les camps.
L’injustice crie à nos oreilles, l’injustice faite aux petits, aux veuves, aux orphelins, aux étrangers et aux prisonniers, et à ceux qui œuvrent pour la paix.
Sans oublier la terre qui nous nourrit, sans considération pour la couleur de notre peau ou notre religion.
L’injustice qui crie comme la colère de Jésus sur l’esplanade du Temple de Jérusalem.
Allons bon, ce bon Jésus que l’on pourrait croire par moment un bisounours, ce bon Jésus se met en colère.
Aurait-il des émotions celui en qui nous reconnaissons Dieu ?
Pourquoi est-il en colère ?
Vous l’avez entendu, la Pâque approche. Le peuple monte à Jérusalem pour la grande fête qui célèbre la sortie d’Égypte, la libération de l’esclavage, le passage d’une terre à une autre, d’une façon de vivre à une autre.
Le peuple vient au Temple pour demander à Dieu de renouveler l’alliance avec son peuple.
Cela passe par une étape de purification, ce que nous venons de vivre par la reconnaissance du péché, la « volonté de Dieu », et la « déclaration du pardon ».
Et bien sûr par l’écoute de la Parole de Dieu, qui est une forme de sacrifice, puisque nous prenons ce temps sur notre vie personnelle et familiale pour venir ici, pour le chanter, le louer et apprendre à l’accueillir dans nos vies.
Jésus est en colère parce que ces marchands laissent croire qu’une offrande, qu’un sacrifice, peut suffire pour s’acquitter de ses devoirs envers Dieu et les hommes. A leur manière, ils détournent les croyants de leur responsabilité, ils les détournent d’une relation juste et vraie avec Dieu et leurs prochains.
Bien entendu, il ne s’agit pas de tous les croyants, mais de certains, qui peuvent croire qu’en s’acquittant d’une offrande, d’un sacrifice, si possible le plus cher et le plus visible par tous, j’en serais quitte avec Dieu, et qu’après je pourrais retourner à ma manière de vivre sans devoir m’occuper des autres.
Mais qui ne nous n’a jamais été tenté de marchander avec Dieu ?
Voilà à mon humble avis, ce dont la colère de Jésus peut être le signe.
Ensuite, les autorités du Temple lui demandent d’où vient l’autorité avec laquelle il agit ainsi ?
Sa réponse est plutôt énigmatique :
« Détruisez ce temple et, en trois jours, je le relèverai. »
Au moment où Jésus dit cela, personne ne comprend ce qu’il veut dire. Il faudra la résurrection de Jésus pour que les disciples comprennent qu’il parlait de son corps. Mais même en le sachant, la phrase reste étrange.
Pourquoi comparer le corps d’un homme, fusse-t-il Jésus, avec le Temple ?
Tout d’abord, qu’est-ce que le Temple, si ce n’est le lieu de la rencontre de Dieu avec son peuple, pour que son peuple vienne et se rassemble, pour qu’il se reconnaisse comme le peuple aimé de Dieu, et pour prendre des forces ; et ensuite porter au-dehors cette bonne nouvelle de l’amour et de la fidélité de Dieu pour tous les hommes et toutes les femmes de ce monde.
En un mot, le Temple est lieu du rassemblement et de l’envoi.
C’est le sens précis du mot Église qui veut dire en latin comme en hébreu : la convocation, l’assemblée.
En vous disant cela, je pense à cette synagogue où au-dessus de la porte d’entrée, est gravée la phrase « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu », et toujours au-dessus de cette même porte mais dans le sens de la sortie, on peut lire « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
Il me semble que la raison d’être du Temple peut se résumer dans ces deux phrases.
Et qu’est-ce que le corps d’un être humain dans le plan de Dieu, si ce n’est le lieu de la rencontre entre Dieu et sa créature ?
Quand Dieu créé l’homme et la femme, il met en eux son souffle de vie, qui est l’âme de notre corps (נִשְׁמַת חַיִּים).
C’est ce que dit Saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens :
16Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu
et que l'Esprit de Dieu habite en vous ?
17Si quelqu'un détruit le temple de Dieu,
Dieu le détruira.
Car le temple de Dieu est saint, et ce temple, c'est vous.
Pour conclure, je terminerai par une histoire juive, comme j’aime à le faire souvent. Une histoire qui raconte une histoire de temple vivant, bien entendu.
« Un rabbin demande à ses étudiants :
– Comment sait-on que la nuit s’est achevée et que le jour se lève ?
– Au fait qu’on peut reconnaître un mouton d’un chien, dit un étudiant.
– Non, ce n’est pas la bonne réponse, dit le rabbin.
– Au fait, dit un autre, qu’on peut reconnaître un figuier d’un olivier.
– Non, dit le rabbin. Ce n’est pas la bonne réponse.
– Alors comment le sait-on ?
– Quand nous regardons un visage inconnu, un étranger, et que nous voyons qu’il est notre frère, à ce moment-là le jour s’est levé. »
Cette courte histoire, me semble-t-il, nous ramène à notre prière pour la paix.
Apprendre
à reconnaître en celui, en celle, qui est en face de moi, un
frère, une sœur, c’est le travail de toute une vie.
C’est ce qui me surprend souvent quand je rencontre des personnes détenues en prison : de découvrir en chacun d’eux, dans le secret de leur cellule, quand nous apprenons à nous connaître, combien le Seigneur est présent entre nous, et comment il nous confie les uns aux autres avec une grande confiance.
Demandons au Seigneur, du fond de notre cœur, à être vigilant dans notre vie de chaque jour, pour accueillir notre prochain comme un hôte de sa présence, fidèle et bienveillante pour nous.
Michel BERDAH, diacre permanent
9 novembre 2025
Temple protestant de Houilles (78)