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9 novembre
Dédicace de la Basilique du Latran

        « Le Temple dont il parlait, c'était son corps. »
Encore une fois St Jean nous étonne dans son évangile si particulier, si différent des autres, parfois même énigmatique, dans son style tout en symboles, dans ses phrases qu'il faut souvent comprendre au second degré, où le signe est toujours à découvrir. « Le Temple dont il parlait, c'était son corps. » Quel mystère !
Si nous fêtons aujourd'hui la dédicace de la Basilique du Latran, il ne s'agit pas d'une simple commémoration de l'inauguration d'une église. C'est un jour de fête, et la couleur liturgique blanche nous dit même que c'est une fête du Seigneur. Alors, que signifie cette fête ?
En 324, il y a aujourd'hui 1690 ans, l'empereur Constantin décide  l'arrêt des persécutions des chrétiens, qui célèbrent leur culte de manière clandestine. Et pour signifier la reconnaissance officielle de la religion des chrétiens, il leur donne une basilique pour qu'ils puissent enfin librement et publiquement célébrer. Cette basilique du Latran est donc la première église ouverte au culte. Et le nom donné alors à cette basilique est « Saint Sauveur », en l'honneur du Christ qui apporte le salut au monde.

        Il ne s'agit donc pas seulement d'honorer ce vieux bâtiment romain, construit de pierre, cette église qui s'écrit avec une minuscule ; mais il s'agit de fêter le Christ sauveur, qui est la tête de l’Église, avec une majuscule. Eglise, peuple de Dieu ; Eglise, corps du Christ dont il est la tête.
Les textes que la liturgie nous propose aujourd'hui sont donc tous centrés sur le temple, ce bâtiment de pierre dans lequel se rassemblent les croyants de l'époque.
Mais déjà, le prophète Ezechiel, six siècles avant Jésus, parle du Temple comme d'une réalité bien plus grande que le simple édifice de pierre qu'il semble être. Comme St jean dans l'évangile d'aujourd'hui, il utilise l'image du temple pour parler du corps de ce Christ qui doit venir, et du côté de qui coulera cette eau qui assainira les eaux de la mer Morte. Du côté de Jésus sur la croix coulera l'eau qui donnera la victoire de la vie sur la mort.
Ré-écoutons quelques passages de cette parole prophétique et si belle d'Ezechiel, en re-situant notre pensée sur le Christ, sur son Eglise. Ezechiel nous fait faire le tour du Temple, pour en arriver à  nous montrer l'eau vive du torrent qui en jaillit : « Cette eau [...] se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux. En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent. Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. » Comment ne pas être saisi par ces allusions au Christ, à son Eglise, aux fruits qu'il fait naître en elle et par elle, qui sont les sacrements, et dont nous sommes tous les bénéficiaires ?


        Dans la deuxième lecture, St Paul, lui, ne s'embarrasse pas d'images, d'allusions ou de discours au second degré. Il est beaucoup plus direct. Il écrit carrément : « Vous êtes la maison que Dieu construit ». Il nous rappelle que cette maison a pour fondation le Christ, et lui seul. Il nous dit encore : « vous êtes le temple de Dieu, et l'Esprit de Dieu habite en vous » et il termine avec insistance : « le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c'est vous. »
Résumons : cette maison de prière dont il est question, que ce soit le temple ou l’Église, désigne à la fois la maison du Père : « Ne  faites pas de la Maison de mon Père une maison de trafic » ; la maison du Fils, d’où jaillit l’eau qui purifie selon la vision d’Ezechiel ; la maison de l’Esprit, puisque St Paul nous dit « l’Esprit de Dieu habite en vous ». Maison du Père du Fils et du St Esprit, maison de Dieu Trinité. Et cette maison, ce temple, désigne aussi l’Eglise, peuple de Dieu. C’est donc aussi chacun de nous. Considérées ensemble, ces images nous montrent à quel point nous sommes liés à Dieu : nous sommes « chez lui », dans son intimité comme il est « chez nous », dans la nôtre.
Dès lors, on comprend la colère de Jésus lorsqu'il voit de quelle manière on traite la maison de son Père, sa maison, notre maison ! C’est à dire en définitive, son propre corps, dont nous sommes les membres !

Ces mauvais traitements qui mettent Jésus en colère sont toujours d'actualité. L’Église corps du Christ, l’Église temple de l'Esprit, l’Église peuple de Dieu est aujourd'hui bien malmenée de par le monde. La situation est tellement grave que 3 éminents religieux : le français Mgr Di Falco, le frère dominicain britannique Timothy Radcliffe et l’historien italien Andrea Riccardi, fondateur de la communauté Sant’Egidio, se sont unis pour diriger l’écriture de ce livre qui vient de paraître, le « livre noir de la condition des chrétiens dans le monde », dans lequel on apprend que 150 à 200 millions de chrétiens vivent, aujourd’hui, à cause de leur appartenance à l’Église, une situation dramatique de persécution. Y compris dans notre pays. De la simple stigmatisation jusqu’au martyr, en passant par toutes les formes de discriminations, de brimades, de privations de libertés, de menaces de mort, de tortures, d'exécutions...
Comprenons bien la colère de Jésus. Ce n’est pas une simple indignation polie. Il renverse les comptoirs et se fait un fouet avec des cordes, tout de même ! Si elle n’est pas à considérer comme un modèle à suivre à la lettre, cette colère nous rappelle malgré tout que l’indignation et la dénonciation ne sont pas toujours suffisantes. 

Il est des situations qu’il faut certes dénoncer, avec toute la retenue qu’impose la miséricorde et la bienveillance, mais lorsqu’elles portent atteinte au corps même du Christ, alors il faut les combattre avec force. Mais attention, évidemment, à ne pas tomber dans l’excès qui ferait basculer dans la violence. La force n’est pas, n’est jamais la violence. Nous sommes le corps du Christ, nous pouvons donc nous appuyer sur la force de son Esprit, qui ne nous dictera jamais la violence. La force n’a pas besoin de la violence, qui est l’argument ultime des faibles.
Alors, frères et sœurs, nous qui sommes, ensemble, le corps du Christ, nous qui sommes le temple de Dieu, habités par son Esprit, soyons conscients de cette force qui nous est donnée. Dans nos épreuves, dans nos doutes, dans nos peurs, dans nos souffrances, souvenons-nous que même si nous sombrons, si nous sommes détruits, en trois jours, le Seigneur nous relèvera avec lui !

Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent.                                                                                                                                       
9 novembre 2014
Gorges, Monnières, Clisson


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