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Sainte Famille



        Sainte Famille.
    1 S 1, 20-22.24-28 ; 83, 3, 4, 5-6, 9-10 ; 1 Jn 3, 1-2.21-24 ; Lc 2, 41-52

        Entre Noël et la nouvelle année, nous fêtons la Ste Famille de Nazaeth : Marie, Joseph et leur enfant Jésus. L’image la plus célèbre, la plus populaire de cette famille, s’invite dans nos maisons depuis les premiers jours de l’Avent jusqu’au milieu du mois de janvier. Cette image, ce n’est pas une peinture, ni une photo, c’est une image en 3D : vous l’avez deviné, il s’agit de la crèche. Avec la crèche, nous avons un portrait de famille, le portrait en relief de la Sainte Famille. C’est un instantané, l’équivalent du « selfie » envoyé depuis la maternité juste après la naissance du bout de chou.
La crèche, cette belle tradition de plusieurs siècles, fait parler d’elle de manière inattendue, depuis quelques années. En France, en tout cas, avec l’irruption brutale de cette nouvelle religion, intransigeante, intolérante, qu’est devenue la laïcité.
Oui, la crèche est un sujet désormais polémique. Pour certains, en tant que signe religieux, elle devrait rester strictement dans nos foyers, et certainement pas « envahir l’espace public ». Comme si cette image de douceur, d’espérance, cette image d’une famille unie, était une agression contre… contre qui, d’ailleurs ? 
Pour d’autres, la crèche ne serait pas qu’un signe religieux, mais surtout une sympathique tradition, et aurait ainsi toute sa place n’importe où, et pourquoi pas dans nos édifices publics comme les mairies et les conseils régionaux.
Et pour les chrétiens ? La crèche, ça signifie quoi ? Eh bien justement, pour nous, chrétiens, la crèche, c’est l’image de la Sainte Famille que nous fêtons en ce jour. Cette représentation de la Sainte Famille dans la grotte de la Nativité, mise en scène dit-on par St François d’Assise, nous aide à contempler le mystère de l’incarnation. On y voit St Joseph, le protecteur, celui qui a accepté de prendre chez lui Marie, envers et contre tout, à la demande de l’ange. Celui aussi qui guidera sa famille, en exil vers l’Egypte, quelques mois plus tard, pour échapper à la cruauté d’Hérode. Celui qui, de retour à Nazareth, permettra par son travail de subvenir aux besoins de sa famille.
On y voit aussi Marie, celle qui a dit oui, sans comprendre mais dans une infinie confiance. Celle qui nourrira cet enfant, qui l’éduquera, puis qui se fera son disciple, discrètement, aux côtés des douze ; celle qui sera présente à la croix, et qui accompagnera la croissance de l’Eglise naissante, après la Pentecôte.
On y voit aussi l’enfant Jésus, bien-sûr, couché dans une mangeoire. Dans une mangeoire, comme pour préfigurer l’Eucharistie, dans laquelle il se fera nourriture pour le salut du monde. Cet enfant, ce tout-petit, si vulnérable, qui naît si pauvrement, loin de chez lui, dans un abri de fortune ;  cet enfant dans lequel nous voyons se réaliser la Promesse de Dieu faite à Abraham, bien des siècles auparavant, promesse rappelée par les prophètes à chaque génération.
Oui, pour nous Chrétiens, la crèche n’est pas seulement une belle tradition, mais bien une représentation de l’arrivée du Salut pour toute l’humanité. Salut rendu possible par le oui de Marie, puis le oui de Joseph, par la venue au sein de ce couple de cet enfant, Jésus, Dieu qui se fait homme. La Sainte famille, c’est donc le terreau de notre salut.
Quoiqu’il en soit, même si on n’est pas chrétien, la Sainte Famille représentée dans la crèche est porteuse de symboles forts, dont notre époque a grand besoin, peut-être plus que jamais. Comme on dit maintenant, elle représente des « valeurs », d’origine chrétienne, certes, mais que « la République » peut s’approprier sans être soupçonnée de compromission avec « la Religion ». Que seraient en effet les « valeurs républicaines » sans les deux millénaires de foi chrétienne qui ont fait l’histoire de notre pays ?
La crèche, c’est d’abord l’image de la famille. La famille, si bousculée et mise à mal de nos jours ; où elle est souvent éclatée, désunie, mais qui reste pour tous un lieu éminemment précieux, source de vie, de chaleur humaine, de transmission, d’entraide, de soutien…
La crèche, c’est la virilité d’un père, la féminité d’une mère, la fragilité d’un enfant sur qui repose pourtant l’espérance d’un avenir.
La crèche, c’est une famille de migrants Galiléens, d’étrangers dans la ville de Bethléem, qui n’ont pas été accueillis, qui ont dû trouver refuge dans une étable.
La crèche, c’est l’image de l’exclusion. Mais c’est aussi l’image de la solidarité, celle des bergers, pauvres parmi les pauvres, humbles parmi les humbles, qui viennent entourer cette famille de leur fraternité chaleureuse.
La crèche, c’est l’image de notre vulnérabilité. Cet enfant qui vient au monde, si petit et si dépendant, loin de l’entourage médical dont notre époque ne saurait plus se passer. Cet enfant qui pourtant est Dieu lui-même qui se fait l’un de nous.
La crèche, c’est l’amour. L’amour qui unit, l’amour qui accueille, l’amour qui donne vie.
La crèche, c’est la joie de la naissance. Naissance reçue comme un don et non comme un dû,  comme un cadeau et non comme un fardeau, dans une joie sans exubérance, sans artifice, joie humble et vraie.
La crèche, c’est l’innocence.
La  crèche, c’est la simplicité, le dénuement, la pauvreté, l’humilité.
Eh bien, frères et sœurs, c’est cette crèche, porteuse de tous ces symboles, de toutes ces « valeurs », que certains voudraient supprimer de notre champ de vision, de peur que ces symboles ne viennent émouvoir une société où l’émotion n’a sa place que si elle nous pousse à consommer toujours plus, au prétexte d’une illusoire liberté individuelle. Parce que, ne soyons pas dupes : dès que la crèche disparaît, la nature ayant horreur du vide, l’espace laissé vacant est aussitôt comblé par… le Père Noël. Avec le faux alibi des valeurs de liberté, égalité, fraternité. Mais où est la liberté, quand ce Père Noël incarne le mensonge institutionnalisé, que nous transmettons à nos enfants, mensonge dans lequel nous les enfermons et les tenons en dépendance ?
Où est l’égalité, quand ce bonhomme vêtu de rouge apporte des profusions de cadeaux aux riches, en oubliant les pauvres ?
Où est la fraternité, quand nos enfants ne savent plus que recevoir des cadeaux comme un dû, au risque d’oublier toute la joie qu’il y a à donner, à offrir, à partager dans la gratuité ?
Alors, à choisir entre la crèche et le Père Noël…

Frères et sœurs, en ce temps de Noël, en ce jour où nous fêtons avec gratitude la Sainte Famille qui se fait accueil pour notre salut, contemplons la crèche. Elle délivre au monde son message ; qu’elle continue à le faire, année après année, Noël après Noël.
Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent
Gétigné et Clisson
27 décembre 2015


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