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4° dimanche de Carême


Laissez-vous réconcilier avec Dieu.


« Je crois en Dieu, le Père tout-puissant… » Le Père que nous présente l’évangile de ce jour ne correspond pas tout à fait à cette image, vous ne trouvez pas ? Vous en connaissez beaucoup des parents qui laisseraient faire leur enfant de cette façon ? Qui lui donneraient sa part d’héritage alors qu’ils sont encore en pleine santé ? Qui le laisseraient claquer la porte sans dire un mot ? Et voilà le Père que Jésus nous dépeint aujourd’hui : un Père qui chaque jour, depuis le départ de cet ingrat, ne cesse de guetter son retour : « Alors qu’il était encore loin, son père l’aperçut et fût saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. » S’il l’aperçoit alors qu’il est encore loin, c’est bien qu’il guettait l’horizon avec cet espoir que son fils n’était pas définitivement parti.
Il ne lui demande aucun compte ; il n’attend pas que son fils lui manifeste un quelconque repentir ; il lui ouvre les bras comme le ferait une mère qui souffre d’avoir perdu son enfant et qui le retrouve dans l’état misérable que l’on peut imaginer. On peut même se demander si ce vaurien éprouve du repentir pour tout ce qu’il a fait endurer à son père. A-t-il la moindre conscience  de ce que son père a souffert en son absence ? Ce qui le met sur la route du retour vers la maison paternelle, c’est tout bêtement la famine. Et s’il reconnaît avoir péché, il ajoute : « Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. » Alors qu’il a fait valoir ses droits à l’héritage avant de partir à l’étranger, il sait bien qu’il n’a plus aucun droit à son retour. Mais, est-ce qu’on est fils de notre père parce qu’on le mérite ?
Cette façon de penser le fait ressembler étrangement à son frère aîné, celui qui pique une colère lorsqu’il apprend que son père a tué le veau gras pour fêter le retour du renégat. Lui aussi fonctionne en terme de mérite : « Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. » Bien que très différents dans leur comportement, les deux frères se ressemblent dans leur façon d’envisager leur attitude filiale en terme de comptabilité.
Le père, lui, est à cent lieues des calculs : il ne veut pas entendre parler de mérites, ni pour l’un, ni pour l’autre. Il a deux fils, et il les aime, sans tenir des comptes. Et ce qu’il souhaite par dessus tout, c’est qu’ils s’entendent, qu’ils s’aiment. N’est-ce pas l’aspiration de tous les parents ? Sans faire de différence, il donne à chacun de ses fils tout ce qu’il a : « Tout ce qui est à moi est à toi. » dit-il à l’aîné. Et s’il remet une bague au doigt du cadet, ce n’est pas pour faire beau ; c’est pour lui donner l’autorité sur le domaine, car cet anneau est le sceau du maître. Pour un père, ce qui a le plus d’importance, c’est que ses enfants soient vivants, et c’est pour çà qu’il se précipite pour faire la fête : « car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé. »
Cette parabole du fils prodigue, que l’on appelle aussi la parabole du père prodigue tellement sa prodigalité vis-à-vis de ses enfants est illimitée, la TOB l’a appelée « parabole du fils retrouvé » parce que, dans le chapitre 15 de St Luc, elle fait suite à la parabole de la brebis retrouvée, et à celle de la pièce retrouvée. Et chacune de ces paraboles se termine sur le même constat : « C’est ainsi, je vous le déclare, qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit. » On se souvient que le Royaume est semblable à un festin de noces auquel tous les estropiés que nous sommes sont invités, sans aucun mérite de notre part. Et c’est pour cela que le Christ est sorti, qu’il s’est risqué dans notre histoire : pour aller chercher les pécheurs et les revêtir de la robe nuptiale. Paul ne dit pas autre chose lorsqu’il affirme aux Corinthiens : « Tout cela vient de Dieu : il nous a réconcilié avec lui par le Christ » et il ajoute : « et il nous a donné pour ministère de travailler à cette réconciliation. »
C’est bien la mission de l’Eglise, de poursuivre l’œuvre du Christ : la réconciliation. Paul a employé 5 fois ce mot dans le court extrait que nous avons entendu. C’est un des mots qui veulent dire notre retour à Dieu, nos retrouvailles. Et nous venons de voir dans la parabole que Jésus fait, de ce changement radical de nos relations avec Dieu, une question de vie et de mort. On voit pourquoi Paul présente l’apôtre, et tous les prêtres avec lui, comme l’homme de la réconciliation des hommes avec Dieu. Ou plutôt l’homme de l’appel « à se laisser réconcilier » car c’est Dieu qui fait tout, mais jamais sans notre adhésion. « Dieu a réconcilié le monde avec lui par la mort et la résurrection de son Fils. » (c’est la formule même du sacrement de la réconciliation) Par cette parole de Paul, au cours de ce Carême, « c’est Dieu lui-même qui nous adresse un appel : Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu. »
En toute logique, ce grand retour vers notre Père nous tournera aussi vers nos frères et sœurs pour refaire les alliances rompues. Lorsque nous dirons ensemble tout à l’heure : « Notre Père… donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. » nous nous souviendrons que depuis l’entrée des fils d’Israël en Terre Promise, après la Pâque, la manne a cessé de tomber. Depuis, tous les hommes mangent les produits de cette terre, et Dieu nous donne la responsabilité de les partager. La vraie puissance de Dieu, c’est celle de son Amour qu’il répand dans nos cœurs pour que nous imitions sa     générosité. Notre offrande de Carême, collectée par le CCFD dimanche prochain sera une façon d’en témoigner.

Jean-Jacques BOURGOIS, diacre permanent
Ste Marie & Pornic, le 14 mars 2010

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