Année C
Sommaire année C
retour vers l'accueil2° dimanche de l'Avent
En voilà, du beau monde, au début de cet évangile !
L’empereur
Tibère ; le gouverneur de Judée Ponce Pilate ; Hérode, prince
de Galilée, d’autres princes de provinces voisines… et puis les Grands
Prêtres du temple, Anne et Caïphe.
Pourtant, aussitôt après cette
énumération des grands de ce monde, Luc écrit : « La parole
de Dieu fut adressée à Jean, fils de Zacharie ».
La parole de
Dieu n’est pas adressée à l’empereur, ni à ces princes, ces
gouverneurs, toutes ces élites du pouvoir temporel ; ni même aux
grands prêtres, élites du pouvoir spirituel. Non, la Parole de Dieu est
adressée à un homme simple, ordinaire : Jean, fils de Zacharie. Et
non-pas dans un palais, ni dans le temple, ni même dans le luxe de la
demeure d’un notable, mais dans le désert, lieu de pauvreté, de
simplicité, de dénuement.
Mais qui est-il donc, ce Jean, fils de
Zacharie ? Luc nous le présente en utilisant la même formule que
celle employée par les auteurs de l’Ancien Testament pour
introduire les prophètes : « la parole de Dieu fut adressée à
Jean, fils de Zacharie ». Il s’agit donc bien d’un véritable
prophète. Il est même le dernier prophète, celui qui devra s’effacer
progressivement pour laisser la place à Celui qu’il annonce :
Jésus, le Messie attendu depuis tant de générations de croyants. Notre
calendrier liturgique, d’ailleurs, le signifie bien : on fête la
nativité de Jean au solstice d’été, quand la durée du jour commence à
décroître, pour laisser place à Jésus, dont la nativité est fêtée au
solstice d’hiver, alors que la durée du jour va en
s’allongeant. Jean est donc bien un prophète. Et quel était le thème de
prédication favori des prophètes ? la conversion. Jean, lui aussi,
celui qu’on appellera Jean le Baptiste, « proclamait la conversion
pour le pardon des péchés ».
Conversion. Toutes les lectures de ce deuxième dimanche de l’avent tournent autour de ce mot : Conversion.
Le
dictionnaire nous apprend qu’il signifie « changement radical
d’orientation ». Les moniteurs de ski, quant à eux, désignent par
conversion le demi-tour sur place.
Dans la première lecture et
dans le psaume, pourtant, ce mot n’apparaît pas. Mais il y est question
d’un retour : le retour vers Jérusalem du peuple en exil à
Babylone. Au-delà du fait historique vécu par un peuple, il s’agit du
départ d’une terre hostile - symboliquement, celle du péché - vers
Jérusalem, « la ville choisie par Dieu », donc, -
symboliquement encore - , vers le Royaume de Dieu. Il s’agit bien là
d’une conversion : « Quitte ta robe de tristesse et de
misère, et revêts la parure de la Gloire de Dieu pour toujours ».
C’est la conversion définitive de tout un peuple. Et ce retour vers
Dieu se fera d’autant mieux que la route sera aplanie, les fossés
comblés, les montagnes et les collines abaissées, les chemins tortueux
redressés.
St Paul utilise la même idée quand il écrit dans sa
lettre aux Philippiens : « dans la droiture, vous marcherez
sans trébucher vers le jour du Christ ». Et cela, écrit-il, afin
que « la clairvoyance vous fasse discerner ce qui est le plus
important ».
Nous y voilà : la conversion qui nous est
demandée, consiste à prendre le temps du discernement. Qu’est-ce qui
est le plus important ? Dans ma vie, aujourd’hui, qu’est-ce qui me
fait vivre ? Qu’est-ce qui me rend heureux ? Et donc aussi,
par contraste : Qu’est-ce qui m’empêche de vivre ? Qu’est-ce
qui entrave ma route ? Quelles sont les collines que je doive
abaisser, les ravins qu’il me faut combler ? Ces collines, ces
ravins, ce ne sont pas forcément ce qui nous entoure, ces difficultés
qui peuvent parfois nous accabler, les événements subis, comme la
maladie, la souffrance, le décès d’un proche, la perte d’un travail…
contre ces malheurs, que pouvons-nous faire ? Non, ce qui est de
mon ressort, ce sur quoi je peux avoir prise, ces chemins tortueux que
je dois redresser, ce sont les miens. N’ai-je pas des comportements,
des habitudes, qui viennent contrarier ma marche vers Dieu ? Par
exemple, la soif de consommation induite par notre mode de vie
occidental, de pays riche, cette soif n’a-t-elle pas à être pensée,
reconsidérée, dépassée, en un mot : convertie ? En cette
période d’achats de cadeaux en tout genre, avoir, posséder des biens en
surabondance, vouloir toujours plus, pour être dans son époque, pour
paraître aux yeux des autres, n’est-ce pas là un chemin tortueux et
semé d’embûches ? Un chemin qui m’éloigne de moi-même, qui
me distrait de ma vraie vocation qui n’est pas de paraître aux
yeux des autres, mais au contraire de regarder l’autre, et d’y voir le
visage du Christ ? Ces biens que je possède ou que je convoite ne
sont-ils pas des risques d’égarement si je me laisse entraîner sur
ce chemin ?
Il ne s’agit pas de tout jeter en vrac. Il s’agit de
prendre ce temps de recul qui nous est proposé aujourd’hui, pour
discerner et éventuellement changer de cap, faire une
« conversion ».
Cet exemple que je viens de citer, cette
surabondance, ces excès, se classerait plutôt dans les « collines
à abaisser ». Mais ma vie est aussi faite de manques, de
« fossés à combler », ma route est aussi abîmée par des
ornières, parfois coupée par des ravins qui gênent ma progression. En
cette période de l’Avent, je peux prendre le temps, dans mon cœur, de
reconnaître mes manques, mes difficultés de toutes sortes. Oui, je sais
que ma route est tortueuse, oui, je sais que je ne suis pas comme je
voudrais être. Mais, chrétien, je sais que, même avec mes chemins
tordus et cabossés, je suis unique pour Dieu, mon Père, et qu’il
m’aime. Tel que je suis. C’est cela, la Bonne Nouvelle que Jésus vient
annoncer, et à laquelle Jean Baptiste nous prépare. Je peux bien sûr me
dire : « Je ne suis pas digne de cet amour » et refuser
de croire à cette Bonne Nouvelle. Mais je peux aussi, pour répondre à
cet amour, qui est toujours premier, avoir envie de me mettre au
travail pour redresser le chemin, aplanir les montagnes et combler les
ravins de ma vie. Avec l’aide de Dieu.
Oui, prenons le temps,
restons éveillés, pour voir et reconnaître la présence de Dieu qui
habite nos vies, aujourd’hui, depuis sa venue dans le monde par ce
petit enfant pauvre et nu que nous fêterons à Noël. Prenons le temps de
regarder ce qui, dans notre vie d’aujourd’hui, nous rend heureux et
nous révèle la présence de Dieu. C’est ce à quoi nous sommes invités en
ce temps de l’Avent. Nous pouvons écrire le fruit de notre réflexion
sur un morceau de papier que nous pourrons glisser dans l’urne-cadeau
laissée à notre disposition dans chacune des églises de la paroisse.
Comme un cadeau que nous échangeons les uns avec les autres. C’est
ainsi qu’à Noël, en rassemblant ces témoignages, nous pourrons, en
Eglise, rendre grâce à Dieu pour sa présence au cœur de nos vies.
Daniel BICHET, diacre permanent.
Sommaire année C
retour vers l'accueil