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1er dimanche de l'Avent

Jr 33, 14-16 / 1Th 3, 12-4, 2

Frères et sœurs,
Il y a quinze jours déjà, la liturgie du dimanche nous donnait à lire des propos de Jésus de style apocalyptique, tirés de l'évangile de Marc. Aujourd'hui, en ce premier dimanche d'une nouvelle année liturgique, nous retrouvons paradoxalement le même type de propos, extraits de l'évangile de Luc.
Si l'Église met une telle insistance à nous proposer de tels textes, assez difficiles à comprendre, il faut bien le reconnaître, c'est qu'ils doivent nous dire quelque chose d'essentiel, pour notre vie de chrétiens.
Or justement, dans l’Evangile d’aujourd’hui, je retiens trois mots : apocalypse, espérance et rencontre !
Apocalypse : dans le passage que je viens de lire, l’avenir présenté par Jésus ne ressemble-t’il pas à s'y méprendre à notre présent ?
Si Jésus faisait le même discours aujourd'hui, il nous parlerait sans doute de ces catastrophes écologiques qui nous menacent, de réchauffement climatique, d'îles submergées et de glaciers qui fondent avec rapidité. Il parlerait de tsunami et de CO², d'effet de serre, de déforestation et de lacs asséchés. Il parlerait également de guerres, de génocides, de conflits incessants, et peut-être du Sida. Certainement il évoquerait les peuples qui souffrent de la faim et ceux qui souffrent de l'oppression causées par des pouvoirs corrompus qui les contraignent à émigrer... Bref, il dirait notre aujourd'hui, comme en son temps il disait les malheurs de son époque, ainsi que les catastrophes qui étaient restées dans la mémoire des peuples. Car des cataclysmes, il y en a toujours eu ; la science nous apprend que des étoiles sont déjà mortes…, que sur notre terre, des espèces sont apparues et d'autres ont disparu… On sait aussi que l'homme a tendance à sécréter lui-même les instruments de sa propre fin…
C’est pourquoi il est important de nous remémorer que le mot « apocalypse » est un mot grec qui signifie dévoiler, lever un coin du voile. Eh bien Jésus lève un coin du voile qui cache la signification réelle des événements du monde, de notre vie personnelle et de l'histoire de l'humanité avec tous ses drames ; de tout cela ne peut advenir que du bien : un monde nouveau.
Je viens d'employer le verbe advenir parce que c'est exactement celui qui convient pour entrer dans le temps de l'Avent (en latin Adventus), cet avenir que Jésus nous invite à envisager en redressant la tête et en regardant « plus loin que le bout de notre nez »… dans une perspective pleine d'espérance. Certes, quand on est dans la tourmente, au milieu de difficultés de toutes sortes, il n'est pas facile de tenir debout ; on risque sans cesse de perdre pied. Jésus lui-même, à Gethsémani, a connu la détresse et a prié pour que « cette coupe s'éloigne de lui ». Mais il a su se reprendre. Et aujourd'hui, il nous invite à vivre, dans la conjoncture actuelle, debout, éveillés, vigilants, courageux. Je souligne les expressions qu'il emploie : « Redressez-vous et levez la tête », « Tenez-vous sur vos gardes », « Restez éveillés et priez sans cesse. » Voilà un beau programme pour quiconque veut être pleinement un homme ou une femme, lucide et responsable.
    Alors, que veut donc nous dire Jésus ? Essentiellement que des crises comme celle qu'il allait lui-même traverser quelques jours plus tard – sa propre mort – ou comme celles que traverse notre humanité aujourd'hui, ne doivent pas nous terrifier. Car, de toute crise, peut sortir un avenir meilleur. C'est pourquoi, dans sa prophétie apocalyptique, il associe une catastrophe et ce qu'il en résulte : une rencontre ! Et pas n’importe laquelle : la rencontre entre Dieu lui-même et l’humanité, en la personne de Jésus son Fils.
Notre attente de ce jour du Seigneur, quand viendra « le Fils de l’homme », consiste donc à poursuivre nos efforts vers la sainteté, dans notre quotidien, sans révolutionner nos habitudes. Dans un contexte d’annonce apocalyptique… et de catastrophes… ces quatre semaines de l’Avent nous sont données comme un temps pour prendre conscience de cette espérance. Mettons-les à profit pour préparer notre cœur à cet avènement, peut-être en prenant le temps de nous arrêter pour faire le point : Quel regard je porte sur le monde ? sur l’avenir… ? Où en est ma relation à Dieu ? De quelle nature est ma relation aux autres ?     
Cette réflexion peut nous amener à nous poser la question d’une réconciliation nécessaire, avec Dieu, avec moi-même, avec d’autres… ? Cette réflexion pourra aussi peut-être nous amener à oser un geste d’amour…, à entamer une démarche de paix envers une personne…, à développer en nous la culture de la rencontre ?
Développer la culture de la rencontre : c’est justement ce que nous suggère notre évêque dans sa dernière lettre pastorale : préparons notre cœur à la venue du Seigneur en nous ouvrant à la rencontre… je le cite :
« Un dilemme se présente à nous… construire des murs ou des ponts… ? »
 Et bien F&S, pour nous aider à trancher, il nous invite à cheminer au cours de ce temps de l’Avent, en nous référant à la visite de Marie à sa cousine Elisabeth et à contempler cet épisode de la Visitation que nous lirons le 4ème dimanche de l’Avent, avant d’accueillir « Dieu lui-même qui vient nous visiter ».
(Je ne vais pas commenter le cheminement qui nous est proposé en paroisse et que vous retrouverez dans ce feuillet qui est mis à votre disposition.)
Le Père James écrit : « La personne humaine est faite pour la relation. Et cette relation va jusqu’à la rencontre. Les seuls textos, mails ou tweets ne suffisent pas. Il faut la rencontre fraternelle, les relations d’amitié, de travail, ou de voisinage. Et que se passe-t-il dans cette rencontre ?      Le jour de la Visitation, Elisabeth, remplie de l’Esprit-Saint, est porteuse d’une parole inattendue : elle confirme Marie dans sa mission en la reconnaissant « mère de mon Seigneur » (Lc 1, 43). Cela rejoint parfois nos expériences : celui ou celle que nous visitons est porteur d’une parole pour nous. Le Seigneur nous précède en Lui. Il nous attend ! »
Ne reconnaissons-nous pas là une invitation à ouvrir notre cœur, nos yeux, nos oreilles, nos mains, la porte de notre maison, une fenêtre sur le monde (comme celle que les enfants viennent d’ouvrir) … ?
Pour ma part, cela m’évoque des expériences vécues lors des rencontres de quartier ou lors des permanences d’accueil baptêmes : j’y arrive avec mes préoccupations et j’en repars joyeux et enrichi d’avoir croisé le Seigneur et d’avoir vu son Esprit à l’œuvre, en l’autre puis en moi.
Tout comme notre présence ici ce matin (ce soir) : ne nous permet-elle pas de faire le lien entre notre vie quotidienne et la liturgie, nous invitant à une rencontre fraternelle les uns avec les autres ? Arrêtons-nous sur quelques-uns des moments de nos célébrations :
Au commencement, nous nous accueillons les uns et les autres.
Dans le « Je confesse à Dieu », nous supplions nos frères de prier pour nous, pécheurs.
Puis la prière universelle porte devant Dieu les intentions de tous nos frères en humanité.
Enfin, au terme de la célébration, nous sommes envoyés servir nos frères.
A chaque célébration eucharistique, à chaque fois que nous célébrons en communauté, Jésus vient à notre rencontre, il se rend présent  à chacun(e) comme celui qui nous aime, comme celui qui lave les pieds de ses disciples et leur demande de faire de même. Cependant nous pouvons avoir peur de nous laisser entrainer dans ce grand mouvement d’amour car on voit où cela commence mais jamais où cela nous mènera…
Or, tout à l’heure nous avons entendu le prophète Jérémie nous rappeler cet oracle du Seigneur : « Voici venir des jours où j'accomplirai la promesse de bonheur que j'ai adressée à la maison d'Israël ».
Des derniers prophètes Jean Paul II est celui qui a redit avec force « n’ayez pas peur ! ».
Rappelons-nous les paroles de l’Ange à Marie : « Sois sans crainte, Marie » elle qui allait voir sa vie bouleversée par ce Oui donné dans la confiance. L’ange encore qui s’adresse à Saint Joseph : « Joseph, fils de David, ne crains pas » et nous pouvons déjà penser aux bergers qui voient cette grande lumière à la crèche :
« Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle »
Alors, frères et soeurs, ne craignons pas de nous ouvrir à la rencontre, de nous accueillir avec nos différences, ne craignons pas de dire oui aux appels de l’Eglise pour nous engager à aller vers nos frères, en commençant par les plus fragiles, laissons-nous guider par l’exemple de la Visitation de Marie à Elisabeth, comme un appel à vivre dans nos journées de véritables visites pour partager notre joie de vivre et de croire.
 Ainsi adviendra ce « jour du Seigneur », que nous sommes appelés à attendre en ces semaines de l’Avent, avec l’espérance du veilleur ; en préparant nos cœurs, en communiquant autour de nous cette espérance par des actes concrets, par des attitudes dignes de ce que nous sommes : des abatteurs de murs, des pécheurs pardonnés, des bâtisseurs de ponts, des vivants ressuscités.
Bon Avent, bonnes rencontres et bonne année !    

Amen

Patrick Javanaud (avec la complicité de mes frères prêtres, diacres et de l’Esprit-Saint)
Le 2 décembre 2018

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