« Le Fils de
l’homme quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur le terre ?»
Aujourd’hui, on
pourrait poser la question suivante : trouvera-t-il des églises
ouvertes , et des lieux les Chrétiens se retrouvent pour prier, et
partager sa Parole ?
Trouvera-t-il sur
terre des femmes et des hommes animés par la Foi, pour faire vivre la
fraternité, la compassion, la force du pardon, avec leurs voisins,
dans
leur travail, dans leur famille, là où ils vivent ?
Jésus donne une
clé de réponse :
Il interpelle ses
disciples - c’est à dire nous
aussi
aujourd’hui – sur la nécessité de toujours prier – prier pour la
réalisation du Royaume de Dieu – sans jamais se décourager. Et pas
uniquement
dans la perspective inconnue d’une fin du monde, car il vient déjà dans
notre
présent
Comment
est-ce que je reçois cette interpellation
de Jésus dans ma vie de prière ?
Ma vie de prière
est souvent bien pauvre ; je n’en vois pas beaucoup les fruits, et
cela me
décourage parfois.
J’ai prié pour la
guérison de mon père, et sa fin de vie a été très difficile,
J’ai prié pour la
réconciliation de ce couple ami, et ils viennent de se séparer,
J’ai prié pour ce
jeune qui veut faire sa vie tout seul, et je le vois s’engager sur des
chemins
de traverse.
Alors, j’ai
rejoint un groupe de prière : nous avons prié pour les vocations
dans
l’Église, et pour la paix dans le monde, mais…
Chacun peut
alimenter cette liste douloureuse qui met notre foi à l’épreuve : Dieu
est-il
aux abonnés absents, est-il sourd et indifférent à nos cris, à nos
demandes les
plus légitimes ?
Et aussi à nos
demandes très concrètes : J’ai prié pour gagner au loto...et je
n’ai pas
été exaucé ! (pas encore !)
Mais alors :
pourquoi Jésus nous dit-il dans l’Évangile de ce Dimanche :
« bien vite,
il fera justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit »
Et le
Psaume affirme: « Non,
il ne
dort pas, ne sommeille pas, le gardien d'Israël ».
Y’a un truc qui
cloche. Qu’y a-t-il de si mystérieux dans la prière ?
Est-ce que nous
prions mal, ou pas assez ?
C’est peut-être
moi qui suis sourd aux réponses de Dieu, et aveugle à ses signes ?
Je suis peut-être
arrivé à croire que la prière est une activité purement humaine, centrée
sur
mes besoins, un appel à un Dieu SOS Réparateur, un Grand Manitou, qui
pourrait
répondre à tous mes désirs à moi.
J’ai peut-être
l’ambition de mettre la main sur Dieu ? De Lui souffler ce qu’il doit
faire.
Comme si Dieu ne
connaissait pas mes désirs les plus profonds, alors qu’il est mon
Créateur, et
qu’il me connaît depuis le sein de ma mère, « lui
qui a
fait le Ciel et la Terre ».
J’ai peut-être
oublié que prier, c’est se mettre sous l’influence de l’Esprit Saint, se
recueillir pour se rendre docile à Dieu qui prie en moi.
Ce n’est jamais
Dieu qui est absent, mais parfois moi…
Alors qu’il monte
à Jérusalem pour y vivre sa Passion, Jésus nous dit que prier c’est
consentir à
plus grand que soi : « Non pas ma volonté, mais la
tienne ! » Comme un enfant qui se remet à son père en toute
confiance.
La veuve de la
parabole n’avait aucun pouvoir face au juge, elle ne pesait pas
grand-chose : elle incarne l’impuissance et la souffrance. Et
cependant,
par la confiance en sa prière, elle a obtenu justice.
Obtenir justice
pour nous, c’est peut-être nous
ajuster
à Dieu, rapprocher notre désir de celui de Dieu.
Le Père Jean
CORBINEAU nous avait donné un jour cette image : lorsque le bateau
rentre
au port et va s’amarrer
au quai, le
matelot tire sur le cordage qui est fermement fixé au quai
... mais ce n’est
pas le quai qui s’approche : c’est
la
bateau qui se rapproche du quai !
La foi, c’est ce
lien qui me relie à Dieu, même s’il est ténu : Jésus disait à ses
apôtres
qu’une graine de moutarde suffit à déraciner un grand arbre.
Quand il y a une
pénurie de moutarde dans nos magasins, c’est pas trop grave…
Mais s’il y avait
pénurie de Foi sur la Terre ?
C’est pourquoi
Jésus met en garde ses disciples : nous devons veiller en Église à
préserver la Foi, en nous et autour de nous : notre prière
patiente,
modeste, régulière comme une respiration, nous transforme jour après
jour; la
prière c’est ce qui permet aux chrétiens de continuer à croire au monde
nouveau
que Dieu nous a promis, et d’y travailler.
Tout à l’heure,
nous allons prier ensemble :
« Notre Père
(…) Que ta volonté soit faite » : c’est le moment de croire
à ce qu’on prie !
Et nous allons
d’abord élargir nos intentions de prière à l’universel : Dieu
n’agit qu’à
travers nous, et c’est en nous encourageant ensemble, que nous pourrons
nous
dire : « Écoute
la voix du Seigneur, prête l’oreille
de ton cœur ».
La prière concerne
moins la demande de choses extérieures, que la demande de transformation
de
notre être, de notre désir, pour travailler au monde voulu par Dieu, et
reconnaître sa venue, même imperceptiblement.
Si notre action
est animée et éclairée par la prière, ce monde nouveau – le Royaume de
Dieu-
viendra.
Comme Moïse sur la
colline, et avec l’aide des frères, prions sans relâche pour les
combats
d’aujourd’hui.
Jésus
nous invite à la prière, comme une initiation
à la confiance à l’égard du Père, qui sait de quoi nous avons besoin. Ce
n’est
pas parce que nous prions beaucoup que Dieu nous fera justice ;
c’est
parce que nous prions que nous serons capables d’adopter la bonne
disposition
intérieure pour faire advenir le règne promis.
La
prière nous apprend à croire Dieu sur parole.
Je
vous propose de conclure avec cette belle
oraison du dimanche :
Dans ton amour inépuisable, Dieu éternel et
tout-puissant,
tu combles tous ceux qui t'implorent, bien
au-delà de leurs mérites,
et de leurs désirs ;
répands sur nous ta miséricorde,
en nous délivrant de tout ce qui nous
inquiète,
et en nous donnant plus que nous n'osons
demander.
Amen !
Emmanuel MERIAUX, diacre permanent
Eglise St Luc - Nantes
16 octobre 2022