Année
C
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21°
dimanche du Temps Ordinaire
Is
66, 18-21 ; Ps 116 (117), 1,2 ; He 12, 5-7.11-13 ; Lc 13,
22-30
Autoroute
des
vacances, circulation fluide. Ça roule bien, on avance vite. C’est bon,
on est dans les temps ! Et puis voici que s’annonce la barrière de
péage. En quelques instants, nous voilà considérablement ralentis, puis
complètement à l’arrêt, pendant de longues minutes dans une des
nombreuses files d’attentes, devant les barrières automatiques…
« Efforcez-vous
d’entrer
par la porte étroite » nous dit Jésus.
La
porte étroite, on voit bien ce que ça donne : là où la route
semblait facile, soudain c’est la bousculade, la ruée, l’embouteillage.
Tout le monde ne passera pas en même temps, il va falloir être patient,
attendre son tour… On a le temps de dire un chapelet !
Mais
au fait, quelle est cette « porte étroite » dont Jésus
nous parle ? Il ajoute : « beaucoup chercheront à
entrer et n’y parviendront pas ». Comme disait un petit
enfant du caté : « si la porte est étroite, il faut être
petit, sinon on ne peut pas entrer ». Donc, si beaucoup ne peuvent
pas entrer, c’est certainement qu’ils ne sont pas assez petits ! Le
bon sens de cet enfant nous donne une des pistes possibles pour
comprendre les paroles de Jésus. En effet, Jésus nous demande d’être
petits. N’a-t-il pas dit aussi : « celui qui n’accueille
pas le royaume de Dieu comme un enfant n’y entrera pas » ?
C’est au chapitre 18 du même évangile de Luc. Et dans son discours sur
la montagne des Béatitudes, dans l’évangile de Matthieu : « heureux
les pauvres de cœur, le royaume des cieux est à eux ». Les
enfants, les petits, les pauvres… On dit parfois que ce sont les
préférés de Dieu. Mais Dieu n’a pas de préféré, puisqu’il aime tout le
monde sans aucune distinction, d’un amour absolu et
inconditionnel ! Si ce ne sont pas ses préférés, les petits, les
pauvres, les humbles, sont les plus proches du Royaume de Dieu. C’est
pourquoi il leur est plus facile d’y entrer.
Cette
affirmation
n’est pas facile à entendre. Pourtant, depuis toujours, les prophètes
nous ont annoncé que les critères permettant d’entrer dans le Royaume de
Dieu – ou de bénéficier du salut, ce qui est la même chose – ne sont pas
nos critères humains habituels, mais ceux de Dieu. Nous en avons un
exemple dans la première lecture, où le prophète Isaïe s’adresse au
peuple juif, au nom de Dieu : « ainsi parle le Seigneur ».
Et que dit-il ? « Je
viens rassembler toutes les nations, de toute langue. » Il
faut se mettre à la place des israélites qui entendent ces paroles. Le
peuple juif, depuis l’origine, se sait être le peuple élu de Dieu. Fort
de cette certitude, chacun pouvait raisonnablement penser qu’en suivant
du mieux qu’il peut les préceptes de la loi de Moïse, il serait sauvé.
Pour résumer la pensée de l’époque : « Ma place est réservée
dans le Royaume de Dieu, et ma vie est l’occasion de faire en sorte d’en
être digne ». Mais en même temps, aucun d’eux ne pouvait imaginer
que des non-juifs, des étrangers, des païens qui ne connaissent pas le
Dieu d’Abraham, pourrait eux aussi être sauvés. Alors, quand Isaïe, mais
aussi tous les prophètes qui se sont succédé au cours de l’histoire,
rappelle inlassablement que l’intention de Dieu est de proposer le salut
à tous les peuples de la terre, le discours devient inaudible,
incroyable, et même scandaleux, au point que la plupart des prophètes
seront rejetés.
Cette
incrédulité
constante au cours des siècles révèle la distance entre la pensée de
Dieu et la pensée des hommes. Si Dieu a élu le peuple juif, ce n’est pas
pour en faire seulement un peuple privilégié. Cette élection, ce choix
particulier pour ce peuple, c’est un envoi en mission. Dieu attend du
peuple élu qu’il témoigne de la miséricorde de Dieu auprès de toutes les
nations, afin qu’elles connaissent, elles aussi, sa miséricorde. Mais
pratiquement dans chaque livre de la Bible, on peut se rendre compte que
chaque génération semble avoir oublié cette mission, et se complaît dans
une sorte de suffisance égoïste, excluant du salut tous ceux qui ne
vivent pas conformément à la loi de Moïse. Pire encore, l’exclusion
porte aussi sur les personnes faibles, pauvres, malades, qui sont
soupçonnées d’attirer la malédiction divine.
Tout
ce qui vient d’être dit du peuple de la Bible est encore vrai
aujourd’hui, hélas, chez nous chrétiens. La chance que nous avons de
connaître la miséricorde de Dieu nous oblige. Notre baptême fait de nous
non des privilégiés, mais des missionnaires, des évangélisateurs de tous
nos frères et sœurs en humanité.
C’est
vrai,
il ne va pas de soi pour chacun que les non-chrétiens bénéficient
également de la miséricorde de Dieu. Il ne va pas de soi que, malgré le
soin que nous apportons à respecter les règles, les rites, les
prescriptions religieuses, nous n’avons pas pour autant la certitude
d’être sauvé. C’est ce que Jésus veut rappeler dans sa petite
parabole : « Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu
as enseigné sur nos places ». Aujourd’hui, on dirait :
« nous sommes allés régulièrement à la messe, où nous avons bien
écouté ta parole et nous avons communié ». Même ceux qui ont
« mangé et bu en sa présence », même ceux à qui il a
« enseigné sur les places », n’ont pas l’assurance d’être
sauvés.
Cependant,
nous
le savons, frères et sœurs, et c’est le fondement de notre foi :
Dieu est amour, il n’est que miséricorde. Si Jésus parle de porte
étroite, ce n’est pas pour exclure certains a priori, mais pour
nous rappeler à tous que le chemin pour parvenir au salut comporte des
exigences. Puisque l’amour est exigeant ! La porte est étroite,
mais elle n’est pas fermée. Comme n'est pas fermée cette barrière de
péage, qui nous oblige cependant à renoncer à l’impatience, à la
facilité d’une vie bien dégagée sur l’autoroute de notre insouciance.
« Efforcez-vous
d’entrer par la porte étroite »
précise bien qu’il faut faire des efforts. L’effort de se faire petit,
comme disait cet enfant du caté, l’effort de se faire humble, d’imiter
Jésus qui s’est fait proche des pauvres, des malades, des petits. La
porte, c’est Jésus lui-même, il le dit dans l’évangile de St Jean. Il
est la porte, il est le chemin, il est la vie.
Alors,
rappelons-nous que plus on est petit, plus la porte paraît large !
et la miséricorde de Dieu est une porte, elle, largement ouverte à tous
ceux qui désirent suivre Jésus, en se faisant comme lui pauvre de cœur,
en accueillant avec humilité le petit, le faible, en donnant sa vie par
amour.
…
Profitons
de
ce petit temps de silence qui vient, frères et sœurs, pour nous
interroger, chacun au fond de son cœur : qu’est-ce qui peut
m’empêcher, moi, de passer par la porte étroite ? mon
orgueil ? mes péchés ? mon égoïsme ? mon
indifférence ?… Et demandons à Dieu de nous montrer combien est
large la porte de sa miséricorde !
Amen !
Daniel
BICHET,
diacre permanent
Le
21 août 2022
Maisdon
sur
Sèvre et Clisson
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